Coma 4

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Je n'aime pas la voir ainsi. Vite, une diversion !

– J'aimerais marcher un peu.

– Tu es sûre ? C'est trop tôt, non ?

– Plus on bouge, plus on récupère.

Elle n'a pas l'air convaincue mais elle se place devant moi et prend mes deux mains pour m'aider. La vache, c'est dur ! J'ai l'impression d'avoir cent ans. Je me déplie lentement. Quand, enfin, je suis debout, j'ai le souffle court et mes jambes tremblotent malgré ma volonté de les en empêcher. Finalement, je vais me contenter de marcher dans la chambre. En me tenant sur la barre qui court le long du mur, j'avance péniblement vers la fenêtre. Elle me suit à la trace, prête à me rattraper. Je me pose au coin et je regarde le paysage. Rien de bien folichon : des immeubles, des voitures, de la grisaille. Ma respiration se calme petit à petit. Mais mes jambes me semblent de plus en plus faibles.

– Angie ?

– Je suis là.

– Je crois que je vais tomber.

Elle se précipite sur moi et me prend dans ses bras. Les miens se referment sur elle naturellement. On dirait qu'ils ont l'habitude. Je suis calée entre elle et le mur, cela soulage mes jambes. Son corps contre moi, c'est étrange. Nouveau et familier à la fois. Son parfum m'envahit. Curieux, je ne connais pas de parfum exhalant le caramel. Ma tête s'est calée contre son épaule, comme une vieille habitude. Je ne me souviens pas mais mon corps semble reprendre ses marques. Je ne peux douter que nous sommes très proches. Je me sens en sécurité. Le stress que j'ai refusé de laisser monter se dilue dans la chaleur de son étreinte. Je relève ma tête de quelques centimètres pour déposer un bisou sur sa joue. Un goût salé atteint mes lèvres. Elle pleure ! Je resserre mes bras autour d'elle. Sa réaction n'est pas celle que j'attendais : elle sanglote franchement à présent.

– Tout va bien. Calme-toi, Angie. Je suis là.

Elle respire fortement et sèche ses larmes. Je capte son regard humide. Elle se pince les lèvres mais ne dit rien. Je l'incite à me parler :

– Dis-moi.

– J'ai eu si peur de te perdre.

– Mais je suis là maintenant. Et même si j'ai perdu la mémoire et que tout cela me paraît un peu bizarre, je sais que toi et moi on est proches. J'ai juste besoin d'un peu de temps. D'accord ?

– D'accord.

Son sourire me remplit de joie. Tout disparaît : juste elle et moi, en cet instant. Je détaille son visage. Pur, enfantin un peu, et ces yeux qui me dévorent ! J'en souris jusqu'à ce que mon regard se pose sur ses lèvres. Mon ventre se tend et je me sens attirée par ce rose vif. Je ferme les yeux un peu sous le choc : j'ai réellement envie de l'embrasser ! Je prends alors véritablement conscience de son corps contre le mien. Sa respiration s'est accélérée, tout comme la mienne. J'ai chaud d'un coup. J'ouvre les yeux pour limiter l'impact de son corps sur le mien et je me retrouve face à un sourire moqueur. Elle n'a rien manqué de mes réactions, on dirait.

– Tu me ramènes au lit ?

Cette fois, elle pince les lèvres pour éviter de se moquer trop ouvertement. D'accord, ça sonne un peu comme une invitation. Ce n'était pas le but ! En attendant, je peine vraiment à faire ces quelques pas. Je suis vraiment contente de me poser. Elle prend soin de remplacer le drap sur mes jambes, sans me regarder. Moi, je ne la quitte pas des yeux. J'ai besoin d'apprendre à la connaître : graver ses traits, sa silhouette dans ma nouvelle mémoire, ses attitudes, décrypter ses regards, ses mots, tout ce qu'elle ne dit pas. Pourquoi on s'est disputées ? Une dispute banale ? Une rupture ? Pour que je parte sans casque, cela ne devait pas être anodin quand même. En même temps, je n'ai pas trop envie de lui poser la question. Ce qui compte, c'est qu'elle est là aujourd'hui.

– À quoi tu penses, Jordan ?

Elle vient de me ramener à la réalité. Noyons le poisson discrètement.

– Pourquoi tu me demandes ça ?

– Parce que tu me fixes depuis un petit moment sans rien dire ?

– Ah ! ... Euh... Je me demandais... si on habitait ensemble.

– Oui. Dès que le médecin te donne le feu vert, on rentre chez nous. Cela te fera du bien d'être dans un environnement familier. Enfin... qui devrait l'être en tout cas.

– D'accord. Je...

Son téléphone m'interrompt brutalement. Qui est l'intrus ? En lisant le message, l'anxiété envahit son visage et elle rassemble précipitamment ses affaires :

– J'ai un truc à faire. Je reviens plus tard.

– Rien de grave ?

– Non, non.

Elle a déjà disparu dans le couloir. Me voilà bien désappointée. Qui peut la faire courir comme cela ? La déception et la peur prennent d'assaut mon petit cerveau sans défense. Je ne sais rien d'elle. Mon humeur vient de basculer vers les bas-fonds. Je ferme les yeux et tente de me relaxer quand la porte s'ouvre brutalement.

La roue du destin - Coma !Où les histoires vivent. Découvrez maintenant