MYSTÉRIEUX POIGNARD

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Quelques jours avaient passé et aucun signe relatif à la dague. Jehan l'observait chaque soir avant de se coucher et chaque matin à son lever et il la maudissait. Personne ne connaissait la vérité et il ne tenait pas à ce que quiconque l'apprît. Sombre et peu élogieux, tel était son passé. Enterré lors de sa fuite des Îles et aujourd'hui pourtant, il craignait de le voir resurgir. Il passait plus de temps avec son fils, malgré la colère de ce dernier, lui enseignant l'art d'écouter son peuple, de répondre à ses requêtes.

–« Une tâche très importante, qui requiert patience et compréhension » !

–Comment pouvez-vous rester patient lorsque chaque jour est identique aux autres ? Père, je vous en supplie, revenez sur votre décision, je l'aime !

–Quel avenir vois-tu pour elle ? Isir, mon garçon, tu es de sang noble. Tu dois te marier à une noble également, telle est la tradition. Un jour, tu comprendras...

–Vous dites toujours cela, père ! Et pourtant, je ne puis le comprendre. Je vis ici, mais je ne ressens pas la vie telle que vous. Je suis las de cette situation. Pourquoi ne puis-je pas entrer à l'académie de Berghet ? Ils forment les seuls conjurateurs de tout Éridia !

–Avant l'amour et maintenant la vie de la magie, tu ne fais que changer d'opinion tel un voyageur de routes. Tu dois te forger une destinée qui durera à travers tes actions et ton nom. Car, une fois partit de ce monde, seul ton nom ou tes exploits survivront. Le monde se souviendra d'Isir le Conquérant et non d'un bas noble ayant épousé une basse naissance dans le but de la quitter pour rejoindre des conjurateurs dans une lointaine contrée.

–Comme c'est injuste et inexacte ce que vous dites, père ! Voyez-vous, je n'ai nulle intention de quitter Guéronde ; je compte partir avec elle dans mes voyages. Ainsi, nous nous marierons et aurons une descendance qui perdura.

–Encore cette intention de quitter Brenaïs ? Te souviens-tu des leçons de Maître Ernur ?L'héritage de ma baronnie te revient, ainsi que sa responsabilité.Tout pouvoir implique responsabilité, mon fils. Ce peuple, ces gens autour de toi ; ils travaillent pour toi, te servent, et en retour, tu les protèges et tu les aimes ! Tel est ton devoir !

–Ce devoir n'est admissible que si vous pratiquiez la féodalité telle que le Roi Mortelande l'a déclarée ; or, vous avez établi un domaine indépendant, cela ne signifie-t-il pas que vous n'envisagez pas d'héritage ? Ainsi, je serais libre de mon destin.

–Et qui reprendrait mes terres à mon trépas ? Tu es vif d'esprit mon garçon et tu sauras utiliser ce potentiel à bon usage, crois-en mes paroles. Pour le moment, restons-en là et grave ces instants dans ta mémoire ;ils seront là pour te redonner courage des années plus tard, lorsque tu te questionneras sur l'utilité de ta vie.

–Et à propos de Guéronde ?Je crois comprendre que mon rêve de devenir conjurateur n'est pas permis, mais me permettrez-vous au moins d'accéder à celui-ci ? Je ne puis concevoir la vie sans elle, j'en suis si amoureux !

–Le vrai amour ne naît pas précipitamment mais par le temps !

–Oui, « et seul ce dernier permet de le vérifier », vous me l'avez déjà dit de nombreuses fois, père. J'attends une réponse claire !

–Tu es bien mon fils, mais si tu attends de la franchise de ma part, sache que ma réponse est non. Elle n'est pas un parti envisageable pour toi. Les lois sont à obéir !

–Alors dans ce cas, je ne puis vous considérer comme mon sang. Je partirai sous peu, laissez-moi simplement un cheval et un sac de vivres !

–Ah ! Comme tu penses être sérieux ! Avec les années, tu comprendras la logique de mon raisonnement. Rentre vite avant que ta mère ne me le fasse remarquer !

Les Âmes PerduesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant