JEORG

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Elle se dressait en amont d'une haute colline surplombant les autres et la vallée. La baie s'y trouvait à une toise au sud. Entourant la cabane, un bois compact de pins et de sapins se dressaient fièrement, la protégeant. Jehan grimpa la pente et suivit le sentier, qui s'avéra être beaucoup plus net qu'escompté. Il batailla avec les branches et recevait sans cesse des griffures de la part de ses dernières. Au bout d'un moment qu'il jugeait long, il arriva au sommet. Bien qu'il eût anciennement bu le contenu de son outre, ils'était aperçu qu'il ne possédait plus de sensation de soif. À vrai dire, ni la fatigue ni la faim ne le prenait plus.

Le noble toqua à la porte et patienta. La porte s'ouvrit, laissant apparaître son hôte.

C'était un homme âgé d'environ une septantaine d'années, dont les multiples rides tarissaient son visage amaigri par la pauvreté et son mode de vie précaire. Ses grands yeux sombres s'ouvrirent à la vue de son visiteur, puis il laissa apparaître des dents gâtées par le temps lorsqu'il lui sourit. Il avait un nez aquilin, nu de barbe et de moustache, de fines cicatrices sur les joues – séquelles des conflits passés. Pendait à son maigre cou une amulette. Il était dressé de vêtements simples, ainsi que d'un ceinturon et d'une dague ébréchée en fer. Des pantalons de jute, de vieilles chaussures usées en cuir, il avait tout l'air d'un aventurier proche de la fin.

–Jeorg, mon vieil ami ! Comment vas–tu depuis toutes ces années ? s'enquit par principe le baron. « Toujours dans cette cabane ? »

–Jehan ! Ah ! Quelle surprise ! Oh, je me suis enfin remis du décès de mon épouse. Je l'ai enterré il y a six ans déjà. Le chien y est passé l'année d'après.

–Reçois mes tardives condoléances, mon ami ! répondit-il d'un ton neutre.

–Merci... Mais entre donc, ne laissons pas le froid nous engourdir. Allons !

Jehan s'essuya les pieds avant d'entrer et laissa son ami refermer la porte derrière lui. Ils s'installèrent sur de fins tabourets en bois de sapin à une table ronde également en sapin marquée de toute part. La maison n'offrait qu'une pièce carrée et l'on pouvait aisémentent faire le tour d'un regard.

Adossé le long du mur, un lit et une commode à son chevet. À son centre, un feu ronronnait depuis la cheminée et chauffait agréablement la pièce. Il y avait un espace pour cuisiner. Une fenêtre située de l'autre côté permettait d'observer le temps et les bois. La neiges'était intensifiée ; elle tombait maintenant dru. Pour le reste de la maison, principalement des outils ; pelle, pioche, faux, un arc, un carquois, des flèches à embout en fer, et bien d'autres choses encore.

–Alors, Jehan,dis–moi. Qu'est–ce qui t'amène aussi loin de Brenaïs ? Tu en as marre de la vie paisible de seigneur ?

–Pas tout à fait, Jeorg ! Verse–moi donc un thé bien chaud et je t'expliquerai en détails les événements récents et les plus anciens.

Ils conversèrent des heures durant, prirent un grand repas de chasse composés d'escalopes de chevreuil marinées au miel et aux épices, d'une poire au vin, de choux–rouges et d'étranges petites nouilles pour accompagner. Jeorg avait toujours été un prodige en cuisine, et les années nullement à l'encontre de son savoir.

–Tu vas donc à Callas ? Le voyage ne va pas être des plus paisibles, mon ami. Reste ici cette nuit, prends un repos bien mérité et demain, tu partiras avec mon arc et mes flèches ; ils te seront plus utiles qu'à moi.

–Oui, en effet, tu en sais plus que moi sur cette région ! Je crains de ne pas arriver à temps, maintenant que les neiges de l'hiver sont déjà tombées !

–Je ne possède pas les meilleures connaissances sur cette vallée. Tu as déjà fait la plus grande majorité du chemin, mais il te reste encore les Hauts à grimper. Tu y rencontreras de dangereuses créatures ; araignées, salamandres de glace, renards des neiges et des loups.

Les Âmes PerduesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant