Jehan avait quitté l'auberge de Reold au milieu de la nuit. Il avait emporté un grand sac à dos, une carte d'Éridia et des vivres en plus de son équipement. Un peu plus de trente lieues le séparait de Callas et il espérait couvrir la distance entre trois à quatre jours de marche. Il entama sa route à travers la rue principale de Brenaïs, parcourant environ un mile avant de trouver la sortie nord, qu'il franchit sans problème.
Delà, il suivit la Saune, qui prenait sa source dans les montagnes des Hauts de Callas et serpentait à travers la Vallée de l'Aube, séparant les plaines et la Baie de Callas à l'ouest et les marais ainsi que les Roches à l'est. Après avoir marché une heure environ, il s'était retourné mais n'avait rien ressenti au départ de sa nouvelle vie. Il suivit simplement le cours d'eau, remontant son courant en traversant les vertes prairies et le terrain agricole de sa baronnie, qu'il connaissait très bien.
Jehan marchait de nuit, son paquetage cliquetant plus ou moins buryamment selon l'égalité de l'herbe sous ses pieds. La clarté de la lune lui permettait de se guider plus aisément . Un vent léger secouait les arbres alentours, parsemant de leurs feuilles les champs s'étendant à perte de vue. De temps à autre un quelconque animal s'arrêtait afin de le guetter et s'enfuyait bien avant que le baron n'ait pu l'apercevoir.
Il avait encore la sécurité des alentours de son village, avec ses cabanes isolées de paysans vivants à l'écart afin de travailler dans les champs. Jehan s'arrêta au pied d'un grand pommier, dont les fruits sauvages tombaient régulièrement sur le sol herbeux avant d'être subtilisés par les divers rongeurs résidant dans ces contrées. Il en prit une et la croqua ; elle était relativement acide et pas tout à fait mûre. Tant pis ! Il la finit tout de même et posa son paquetage à sa gauche, s'adossant contre l'arbre.
Ilsortit sa gourde et entreprit de boire un peu de son contenu ; de l'eau claire et fraîche de la Saune. Il vida son outre et alla enquête de la remplir. Une fois fait, il ouvrit son sac et en sortit un morceau de pain noir, du fromage de chèvre, une tranche de porc salé et quelques olives. Jehan sourit à leur vue car il savait que sa passion pour ces fruits était connue de toute sa baronnie, aussi, il soupçonna Reold d'en avoir laissé plus que nécessaire. Après avoir mangé, il avait sorti une pipe qu'il avait bourré de tabac local et avait paisiblement fumé. L'air frais lui ébouriffait les cheveux et transformait la fumée blanchâtre en diverses formes plusou moins originales. Il soupira un long instant et se dit que la vie actuelle aurait pu être belle sans les événements ayant récemment occurrés. Il rangea et ferma son sac, ouvrit celui de couchage qu'il déposa sur un lit de feuilles mortes et récolta du petit bois.Comme il n'avait pas plu depuis quelques jours, il était très sec et prendrait facilement pour un feu.
Jehan ramassa également des pierres qu'il déposa en cercle autour, puis installa son bois au centre. À l'aide de son couteau et d'une pierre, il frotta jusqu'à l'obtention d'une timide étincelle. Souffler, compléter le bois, le feu avait pris et durerait quelques heures pendant lesquelles il pourrait tranquillement dormir.
Il se déshabilla, entra dans le sac de couchage avec ses vêtements et ses armes contre sa peau. Le feu le protégerait des nuisibles grâce à sa fumée et il aurait chaud aussi. Jehan s'endormit les mains jointes sur son ventre, lentement abaissé et élevé par la respiration de l'être au repos.
Au petit matin, il fut réveillé par un contact froid sur son visage. Surpris, il ouvrit les yeux. Quelque chose lui tombait dessus et fondait aussitôt. Il ouvrit à nouveau les yeux et s'habitua à la clarté de la matinée. Il était environ huit heures et la neige commençait à tomber. De la neige ! Désormais, l'environnement deviendrait plus hostile, le gibier plus rare et la vie plus difficile. Le noble s'habilla et prit un déjeuner rapide puis débuta sa journée de marche. Il avala les miles, suivant la Saune qui serpentait à travers les champs. À la fin de la journée, il était arrivé à environ deux miles de l'entrée sud de la Vallée de l'Aube. Il se tourna vers l'est et admira la vue. Au loin, il pouvait contempler les Roches, un gigantesque amas de pierres et de cailloux assemblés en un point et formant de véritables montagnes. Personne ne savait d'où venaient ces minéraux ni qui les avait amenés là-bas. Certaines fables pour enfants parlaient de Golem de Pierre, immenses créatures taillées à même la roche qui se confrontaient dans de titanesques batailles, mais comme personne n'en avait jamais vu depuis les vingt mille dernières années, ces Golem avait largement disparu de la pensée des hommes.
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Les Âmes Perdues
FantasyLorsqu' Aude et sa fille ramènent un étrange poignard d'un voyage marchand et sont retrouvées mortes la semaine d'après, Jehan de Prunellier - Baron de Brenaïs - comprend que son passé de Compagnons l'a rattrapé. Invoquant le mythe du Serment de San...