11- LIBERTÉ

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Cette tenue était une très, très mauvaise idée.

Pourquoi cette robe s'était-elle retrouvée dans mon sac déjà ? Ah oui ! Ma mère, c'était elle la cause de toute ce tissu coloré inutile. J'avais été obligée de l'informer de mon rendez-vous avec Julien, elle était prête à venir me chercher chez mon père dès ce soir. Heureusement qu'elle ne m'avait pas fait de cinéma ridicule à propos des garçons ou dans ce genre, je n'aurais pas supporté cette passade. La tenue qu'elle m'avait achetée était la chose la moins pire qu'il aurait pu m'arriver finalement. La robe était là, étendue sur mon lit alors que, vêtue d'une serviette de bain, je la scrutais comme un oiseau mort qu'on croise sur le trottoir. Je ne savais pas comment elle avait fait pour la trouver, mais sa couleur était identique à celle de mes yeux. Elle disait que cela s'accordait parfaitement à moi et qu'elle n'avait pas pu s'empêcher de la prendre. C'était une robe de tout ce qu'il y avait de plus simple, avec de fines bretelles à la place des manches. Et que faire pour mes cheveux ? A part passer une heure à les démêler, je n'avais pas vraiment des milliers de choix à ma disposition pour être présentable cet après-midi. Et ces fichues sandales noires me tuaient les pieds. Par pour le fin talon de trois centimètres de haut sur lequel je marchais mais pour la sangle qui se refermait sur mon pied. Mais si je ne voulais pas étouffer de chaleur, c'était ma seule option, surtout que j'oublierai vite ce détail un fois là-bas. Le soleil rayonnait derrière quelques maigres nuages tintés de gris surplombant la maison. Normalement, l'endroit où je me rendrais bientôt aurait un ciel assez dégagé pour ne pas avoir à baigner dans l'ombre une seule seconde.

Je dévalai les escaliers en ruine sans avoir cherché à me mettre un seul bijou, il valait mieux pour moi que j'en reste là.

- Elsa, tu es prête à partir ?! cria mon père du couloir.

Il avait omis que j'étais à deux mettre et qu'il était inutile de me réduire les tympans à néant dans ce cas-là. Je déboulai en trombe dans la pièce et m'empressai de me diriger vers la porte sans lui jeter de regards. Malheureusement, ma tenue inhabituelle ne pouvait décemment pas passer inaperçue !

- Quand tu m'as dit que tu sortais avec un ami... commença-t-il dans mon dos. C'était avec un garçon, pas vrai ?

Gênée, je me sentis rosir. Je pivotai lentement sur moi-même pour lui faire face et pris soin de maintenir la poignée de la porte dans ma main droite.

- Oui papa... On pourrait y-aller ? S'il te plait ?

Il sourit, ne rajouta rien cependant.

- Pas de problèmes, on y va.

Je m'écartai et il s'avança pour ouvrir la porte.

Il était parti, sa voiture rouillée avait finalement disparu. J'étais comme prévu installée sur le banc près du grand arbre, en train de croiser et décroiser les jambes à tout bout de champ. D'un côté, j'avais atrocement mal, pas à cause de mes chaussures minable mais sous l'effet effroyable de cette énergie tueuse. Si en souffrir était devenue une habitude, la douleur n'en était pas pour le moins agréable au fil du temps. Certes, le fait de le toucher ne générait plus ces éclats de courant entre nous comme à nos débuts, et c'était déjà un bien. Je ne saurais dire depuis combien de temps cela avait cessé définitivement mais j'avais l'impression que cela remontait à la fois où j'avais complètement dégénéré. Ce moment éprouvant lorsque j'avais senti cette rage incontrôlable m'envahir avant de déployer la force qui m'avait permise de jeter ce type à terre. Julien avait vécu l'identique phénomène à la suite du mien. Peut-être que cela signifiait que cette électricité pouvait évoluer, pouvait apprendre à être contrôlée pour ne plus nous causer de mal. Mais quand ?

La Force du Lien Où les histoires vivent. Découvrez maintenant