Ce fut vers quinze heures que je me rendis dans le quartier culturel et entrai dans une bibliothèque remarquée plus tôt. Parmi d'autres de l'avenue, c'était la plus grande : située dans l'angle, elle s'étalait sur les trois étages de la bâtisse qui l'accueillait. L'endroit était calme, chaleureux et soigné. L'intérieur, tapissé de bleu roi et d'or et composé de meubles finement sculptés. Sur certains murs ou planches latérales des étagères étaient affichés des schémas ou dessins travaillés de fleurs, d'arbres et d'animaux en tout genres.
Je me dirigeai vers l'archiviste, un quinquagénaire aux cheveux courts et gris. Il leva ses yeux vers moi et les planta dans les miens, à nouveaux visibles : ma capuche était rabaissée, un sort rendant mes prunelles noisette plutôt que péridot.
-Bonjour, que puis-je faire pour vous jeune homme ?, me questionna-t-il d'une voie rauque par l'âge bien que chaleureuse.
Je réajustai ma sacoche sous le bras, le saluai d'un "bonjour" puis lui répondis d'une voix cordiale et en y mettant les formes :
- Je suis à Enkaria pour quelques temps et je suis chercheur de métier. Je viens donc à vous pour proposer mes services.
L'expression du vieil homme se teinta d'intérêt et il sourit.
Coutumié de ces entretiens, j'interprétai sa réaction comme positive. Les chercheurs étaient rares : le peu qui l'étaient officiaient souvent dans les grandes capitales où la demande était plus forte, la solde plus intéressante.
Sans surprise, mon âge - dix-sept ans – ne l'arrêtait pas puisqu'à Svana, comme dans beaucoup d'autres saïn, on travaillait dès treize ans. Âge où les jeunes entrent dans des corporations et apprennent le métier.
L'archiviste ne disait rien, semblant attendre que je continue.
-Je peux bien évidemment vous montrer mes précédents travaux... (Je vidai mon sac de ses feuilles) Je dessine autant la faune que la flore. Ici, j'ai croqué quelques fleurs des jardins de du centre-ville. Et là, des animaux qui se trouvaient au bord du fleuve.
Pendant mon discours, je lui avais tendu un par un les feuillets. Il les examina avec attention,tout à sa réflexion silencieuse.
-Mes domaines de prédilection sont les reptiles et les rapaces, ayant étudié leur morphologie plus en détails que d'autres espèces, ajoutai-je. Je dessinais de nombreux oiseaux de chasses lors de mon emploi précédent chez une famille de nobles du Nord, amateurs de sciences naturelles. Ils voulaient étoffer leur bibliothèque sur le sujet.
-Eh bien jeune homme, commença enfin l'homme de lettre, vos travaux sont tout à votre honneur : je vois peu souvent, il est vrai, une telle précision. Pour ce lézard à queue courte par exemple : ces bestioles se déplacent à toute vitesse, il nous a toujours été difficile de les étudier de près... Je vous achèterais bien celui-ci donc. Par-contre pour les camélites, nous avons toutes les informations déjà... Grâce à un vieil ami, passionné par les plantes de type Arlenuus (Je hochais la tête une fois... comme si je savais de quoi il parlait). Les dessins des ailes des pélicans dorés sont très intéressants également. Je vous le prendrai bien pour compléter cette encyclopédie ci.
Il me pointa du doigts un épais ouvrages sur son bureau.
-Il s'agit d'une encyclopédie des oiseaux des contrées du Sud.Voyez-vous, cela fait des années qu'elle est incomplète. Et sans un bon dessinateur, elle le restera encore, faute de références visuelles...
Je saisis le sous-entendus au vol et répondis :
-... Et vous souhaitez que je travaille dessus, je suppose... ?

VOUS LISEZ
Chroniques d'un Passeur de Mondes (M/M)
FantasíaAerrel est un jeune passeur de mondes, un "Essaïn". Son devoir est de voyager de territoires en territoires, et tous lui font vivre de fascinantes - mais éreintantes - expériences. Pour cela, il doit éviter d'attirer l'attention de quiconque... Sva...