❄ Prologue (partie 2)

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Musique : Life in her yet de Rag'n'Bone Man. 


— Du calme, mon garçon, Andreï est malade et c'est moi qui le remplace. Mais vois-tu, je n'ai guère l'habitude de m'occuper d'autre chose que de la cuisine, donc...

— C'est bon, Rodrigue, tu sais bien que je ne dis ça que pour embêter ce brave Andreï ! Raconte-moi plutôt pourquoi tu es dans la Conspiration, je ne te pensais pas comme cela.

— Ma fille se marie bientôt, j'avais besoin d'argent... dit le cuisinier comme si son coffre vide pouvait expliquer une trahison pareille envers la couronne.

Il jeta un regard méfiant dans le couloir désert avant d'ajouter :

— Et puis, le roi n'est pas fait pour le pouvoir, contrairement à son père, feu sa majesté royale notre bien aimé souverain.

Le jeune homme eut un petit rictus amusé devant l'abus de titres honorifiques qu'avait fait Rodrigue. Il l'interrompit d'un geste de la main alors qu'il allait se lancer dans une louange de leur précédent roi.

— Au lieu de rester planté là à discuter, va plutôt réparer la porte là-bas, lui ordonna-t-il en désignant négligemment le passage obscur derrière lui. Tu seras plus utile ainsi.

Il s'élança vers le couloir du château juste après avoir chuchoté plus pour lui-même que pour le cuisinier :

— Je vais dire à Vera que l'opération Bonhomme de Neige commence maintenant.

Il imaginait facilement Rodrigue cligner des yeux avec étonnement, un tic qu'il avait d'aussi loin qu'il s'en souvienne.

Un léger tremblement parcourait le jeune homme de toute part, léger mais tenace. D'appréhension ou de doute ? Il ne le savait pas lui-même. Ce dont il était sûr par contre, c'était de la signification de ce nom de code et de ce qu'il allait devoir accomplir. Il eut un autre petit tremblement, tout aussi inexplicable que le précédent. Ou du moins, c'était ce qu'il se plaisait à dire, parce qu'il savait très bien pourquoi il tremblait. Il avait peur. Et même si c'était ce qui le rendait Enchanteur, il ne voulait pas de cette crainte, ce sentiment qui le rendait faible et qui le faisait renoncer trop facilement. Bon sang, il n'avait que vingt-et-un ans ! Certes, il n'y avait pas d'âge pour devenir assassin, mais quand même ! Car malgré sa manie, qu'il savait agaçante – et ô combien amusante –, de parler anglais à tout bout de champ alors que personne n'y comprenait rien, puisqu'il était l'un des rares à être allé dans le monde des humains, le jeune homme avait conscience du fait qu'il était apprécié.

Après ce qu'il s'apprêtait à faire, plus rien ne serait pareil... de sa vie au royaume tout entier, ils ressentiraient tous les conséquences de son acte.

«Non, mon cher, ce n'est pas le moment de céder à la sensiblerie. Tu dois faire quelque chose, et tu le feras !» s'ordonna-t-il mentalement. 

Le plus difficile de sa mission restait à venir, mais le jeune homme comptait sur l'aide de Vera, sa plus proche amie – et aussi la seule – depuis son arrivée au château, qui était servante ici. C'était d'ailleurs elle qui montait la garde au bout du couloir. Ce passage n'était emprunté que par les serviteurs et ils avaient tous été réquisitionnés pour la célébration de la naissance de la princesse, sauf qu'on n'était jamais trop prudent. Il pouvait toujours y avoir un imprévu de dernière minute, un coup de poignard vicieux de la part de la destinée.

Dès qu'il fut assez proche d'elle, le jeune homme apostropha son amie :

— Vera !

— J'ai cru que tu ne viendrais jamais, soupira-t-elle avec soulagement.

La Revanche de l'HiverOù les histoires vivent. Découvrez maintenant