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- Hey...tu sais qu'un beau jour ça ira, pas vrai ?

A vrai dire c'était plus fort que moi. Je craquai facilement. Honteuse, je baissai le regard vers ma tasse de chocolat.

L'homme au bonnet -du moins Deen dorénavant- me faisait perdre pied plus que quiconque. Il était certes maladroit dans ses propos mais il possédait cette aisance époustouflante de tout déballer d'une traite, puis de jouer avec sa voix et les émotions qui s'y dégageaient.

-Lilo, je suis....

-Ça va aller Deen. Ça va aller.

Je me le répétai encore, il hocha légèrement le menton et passa ses longs doigts sur sa barbe qui ornait sa mâchoire carrée.

-Il...

-Il était différent, fin....pas si différent que ça au bout du compte.

Deen but une légère gorgée de son café tout en me fixant assidûment. Il ne faisait que ça depuis tout à l'heure; me fixer et boire son café noir sans sucre.

-Il était malade.

-Malade ?

-Oui, il souffrait de schizophrène.

-Waw...

Sa voix se perdit dans l'ambiance calme et posée du Smile. La musique datant des années 80 semblait couvrir le chuchotis qu'occasionnaient les quelque personnes ici présente.

-Il...je ne sais pas, je crois que je lui ai plu depuis le premier cours. Plus les jours passaient et plus il me fixait intensément. Je n'ai jamais été ce genre de fille qui avait une extrême confiance en soi, je me disais qu'il y devait y avoir quelque chose sur mon visage ou qu'il voulait tout simplement me demander mes cours. Au final, je finissais juste par lui sourire poliment. Un soir, il m'a envoyé un message sur Facebook et lui et moi avions commencé à discuter.

-Il est vraiment venu te parler sur Facebook ? Je faisais ça au collège pour pécho moi.

Je ne pus m'empêcher de sourire, il fut satisfait de sa remarque et m'étudia encore sans sourciller.

-On se parlait beaucoup puis quand on se croisait il était très timide...Beaucoup, en vérité. Je l'aimais bien, j'avais enfin quelqu'un avec qui parler et qui me comprenait. Au bout de plusieurs semaines, il m'a avoué être malade. Je...sur le coup je ne savais pas trop quoi faire. J'ai posé mon téléphone et j'ai réfléchi pendant de longues minutes. Puis je me suis mise à flipper. Tellement flipper que je ne voulais plus lui parler du tout mais... j'ai fini par prendre mon téléphone et l'ai rassuré en lui disant que ça ne changerait rien. Que je me fichais éperdument qu'il soit malade ou non. Sauf que ça a tout changé. Il devenait de plus en plus entreprenant, il me proposait des soirées et...

Bordel c'était encore trop tôt, je fermai les yeux en respirant lourdement. Je l'avais laissé partir sans le retenir, certes mais ça restait foutrement douloureux d'en parler à haute voix. Il avait accaparé toutes mes nuits, et m'avait permis de me sentir mieux. 

Là, maintenant, la solitude me retombait en pleine gueule.

-Tu n'es pas obligé.
Ne put-il s'empêcher de souffler en me souriant timidement.

-Ok.

Je me tus quelques secondes. La mine déconfite, Deen accusa le coup

-Une personne normale me dirait "non mais je vais quand même continuer".

Les larmes au bord des yeux, je pouffai d'amusement

-C'est encore ça le problème, je ne suis pas normale même face à un schizophrène.

FULGURATION [TOME 1]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant