Chapitre 10

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On récapitule.

Gel : Ok

Chemise repassée (très important) : Ok

Parfum : Ok

Sourire : À travailler encore.

« - Eh bien dites donc, c'est qu'il est tout beau mon fils !

- Maman !

- Je pensais que c'était juste un ciné entre amis ? Dis-moi Milo...Y'aura une fille c'est ça ? Celle dont tu me parles souvent ?

- Oui...Hé ! J'ai besoin d'un avis féminin. Je suis comment ?

- Très beau. Tout mignon.

- Je ne sais même pas pourquoi je te demande, t'es pas franche. Tu me trouveras toujours beau.

- Ce n'est pas de ma faute ! Mon fils est ma fierté ! »

Je retourne dans ma chambre, je regarde l'heure sur mon portable et je m'aperçois qu'il est presque temps pour moi de partir.

« - Milo tu es prêt ?

- J'arrive papa ! »

Au même moment, un message de Roméo

« Que la force soit avec toi ! Ou que le sort te soit favorable. Choisis. Tu me raconteras ça ! »

Parce que m'envoyer deux répliques cultes du cinéma, ça m'aide vachement !

Je vous jure...

J'ai l'impression d'être en nage. J'angoisse. Je stresse. L'idée d'être tout seul aujourd'hui avec Keena a fait son petit bout de chemin dans mon esprit et c'est comme si je n'avais pas dormi de la nuit. Pourquoi fallait-il qu'une simple sortie me préoccupe autant ?

J'arrive alors au cinéma le premier. Je dois avoir dix minutes d'avance, juste assez pour prétendre l'avoir attendu. Les filles ne sont pas les championnes du monde de la ponctualité, c'est bien connu.

Comment elles justifient ça d'ailleurs ? Ah oui : « Mieux vaut arriver en retard, que moche. »

Toutes les deux minutes, je regarde l'heure. C'est obsessionnel. Keena peut arriver d'un moment à l'autre !

Respire Milo. Reste cool. Elles n'aiment pas quand un mec est trop collant ou trop mielleux. Fais ressortir l'homme qui est en toi ! Gonfle tes pectoraux inexistants, relève la tête, ai un regard brillant.

Soudain, mon téléphone vibre.

« - Oh c'est elle ! C'est elle ! »

Décroche imbécile.

« - Allô ?

- Coucou Milo !

- Salut Keena, tout va bien ?

- Dis-moi vous êtes déjà au cinéma Roméo et toi ?

- Ah euh...non...Je suis tout seul. Roméo s'est souvenu qu'il avait un entraînement, du style, dernière minute...Donc me voilà ahaha !

- Oh...Je vois... »

L'intonation dans sa voix parait baisser progressivement.

Qu'est-ce que ça veut dire ?

« - Milo...Je suis désolée, mais...Je ne pourrais pas venir. J'ai aussi un empêchement de dernière minute.

- Ah ouais ? Rien de grave j'espère ? Enfin..Je veux dire...C'est dommage...

- Non, non, ne t'en fais pas ! Juste un truc perso à régler. Tu ne m'en veux pas ?

- Non... »

Si à mort ! Je suis sur mon 31 pour des huîtres peut-être ?

« - Je me rattraperais, c'est promis ! C'est juste que...

- Non, mais je comprends. Y'a pas de problème.

- Tu es vraiment gentil Milo. On se voit lundi au lycée du coup ?

- Ouais...c'est ça...À lundi. »

Elle raccroche la première avant même que je n'eus le temps de dire ou de rajouter quoi que ce soit d'autre.

Aïe. Milo à terre. Milo touché.

Pourquoi est-ce que mon euphorie d'il y a cinq minutes est partie ? Pourquoi est-ce qu'il faut que ça tombe à l'eau ?

Pourquoi est-ce qu'il faut que ça fasse aussi mal ?

Être déçu, ça vous arrache un bout de vous-même.

Sortant du cinéma, ne sachant pas trop où aller et ne voulant surtout pas dire à mes parents que je venais de me prendre le vent du siècle, j'ai marché jusqu'à la bibliothèque en face du lycée.

Pourquoi la bibliothèque ? Aucune idée. Je déteste cet endroit. Je n'y mets pratiquement jamais les pieds, mais étrangement, c'est comme si instinctivement, je savais que j'allais y trouver du réconfort.

« - T'as une sale gueule. »

Margaux. Margaux est là. Près de l'entrée, les bras chargés de livres, me dévisageant de la tête aux pieds.

« - Oh...Je vois...Elle t'a posé un lapin.

- Dit...Je peux rester avec toi ?

- Ça dépend. Tu vas m'imposer ton humeur déprimante toute l'après-midi ou pas ?

- Je suis désolé...

- Pourquoi tu t'excuses ?

- Parce que je crois que je vais t'imposer mon humeur déprimante.

- Génial... »

Posant ses livres sur un petit comptoir à côté d'elle, mains sur les hanches et lâchant un des plus longs soupirs de l'histoire de l'humanité, Margaux finit par me faire signe « - Viens voir un coup.

- Quoi ?

- Discute pas, viens c'est tout. T'as un truc bizarre sur la tête.

- C'est ma tête en générale qu'est bizarre.

- Milo. Ferme ta bouche et approche. »

Sous un tel ordre, je me suis exécuté et à peine suis-je arrivé à sa hauteur, que ses deux bras vinrent s'enrouler autour de moi.

Margaux m'enlace.

« - Mais je...

- Tais-toi. Juste, tais-toi. Je ne ferais pas ça tout le temps, ni à tout le monde, mais j'ai lu dans un article qu'un câlin ça soulageait les peines de cœur.

- Margaux ?

- Quoi ?

- Merci. »

Parce que des filles comme ça, trop rustres, trop directes et peu féminine, on en avait besoin plus souvent.

« - Que ça ne devienne pas une habitude, je te préviens de suite.

- Tu es gentille, toi.

- Il est là le problème...Je suis « gentille ». »

Et sans que je ne m'en rende réellement compte à ce moment-là, Margaux était devenu en très peu de temps, le même genre de personne que moi.

Celles qui sont « gentilles », peut-être même trop.

Mister Fleur BleuOù les histoires vivent. Découvrez maintenant