6) Sainte-Mangouste

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Cinq jours. Il avait fallu cinq jours à Remus pour enfin se rendre à Sainte-Mangouste. Cinq journées lors desquelles il avait eut le temps de se remettre physiquement de sa nuit épuisante. Les périodes de lune décroissante n'étaient pas les plus agréables et il ne le savait que trop bien, surtout après des nuits aussi brutales et traumatisantes. Et même si les marques de coups et morsures laissées par Buck et Sirius étaient moins visibles, moralement, c'était une autre histoire.

Le visage de Mila n'avait cessé de le hanter. Maintenant qu'il avait récupéré une partie de ses forces, il n'avait plus d'excuses pour se défiler. D'autant qu'il était parvenu à acquérir de la poudre de cheminette auprès de l'un des nombreux camelots louches qui composaient la clientèle habituelle de la Tête de Sanglier...

Alors arrivé dans le grand bâtiment hospitalier londonien, il se rendit compte que son cœur commençait à battre la chamade dans sa poitrine. Alors, inspirant profondément, il s'avança en direction de la salle où devait normalement se trouver la jeune femme, celle où l'on s'occupait des morsures infligées par des créatures magiques... la salle Dai Llewellyn. Cette même salle où il avait été amené bien des décennies plus tôt, juste après avoir été lui-même mordu par le loup-garou qui revenait souvent dans ses songes.

Et tandis qu'il se dirigeait vers le premier étage, chaque marche lui paressait toujours un peu plus difficile à enjamber que la précédente. Tout sur lui paraissait lourd... ses affaires, sa valise et surtout sa culpabilité. Et quand enfin il parvint à la salle, ce fut pour lui une épreuve de parcourir la salle du regard. Il avait un instant espéré que Mila fusse absente mais non. Et il l'aurait reconnu entre mille.

Allongée sur un lit, une femme endormie, indifférente au brouahah ambiant et aux allers et venues des guérisseurs. Il se pinça les lèvres avant de se rapprocher d'elle d'un pas hésitant. Avec horreur, il vit que son visage était aussi verdâtre que maladif et se figea sur place, incapable d'avancer plus loin. La pleine lune elle-même ne l'aurait pas plus terrifié ! Et ce fut brusquement qu'il fut tiré de ses pensées lorsqu'un médicomage trébucha sur lui :

-Excusez-moi... fit Lupin dans un murmure.

-Pas de de souci, fit le magicien en continuant d'un pas pressé.

Remus ramena alors de nouveau son regard vers Mila et, considérant qu'elle était encore plongée dans un profond sommeil, se promit de repasser plus tard ce qui quelque part, lui faisait gagner quelques instants voire quelques heures.

Même s'il avait toujours veillé à être méticuleux et organisé en tant que professeur de Défense contre les Forces du Mal, il n'avait en rien préparé cette rencontre. Il ne savait en effet toujours pas quoi lui dire. S'il lui annoncerait ou non. Comment ? Si elle accepterait son aide, ses connaissances ou non... Tout ce qu'il savait, c'était qu'il se devait d'être là, prêt d'elle. Et même si Dumbledore ne le lui avait pas demandé, il serait venu de lui-même. De toute façon, on l'attendait nulle part ailleurs. N'ayant plus d'emploi, plus de famille... De tristes pensées avec lesquelles il s'affala dans l'un des sièges du salon de thé de l'hôpital, situé au cinquième étage et dans lequel errait un malheureux Lockhart en quête d'autographes à donner. Le bel homme n'avait d'ailleurs pas manqué d'apposer sa signature sur la valise de Lupin avant de s'en aller, satisfait d'avoir « rendu heureux un nouveau fan »

Secouant la tête avec dépit, Relus aperçut alors un journal posé sur la table basse devant lui. Le parcourant distraitement, il constata que l'agression de Mila n'était plus mentionnée nulle part. Il n'y en avait que pour la prochaine coupe du monde de Quidditch et seule une photo de Sirius Black glissée là entre quelques faits divers l'amena à siffler de dégoût. Il reposa le journal sur la basse table, contrarié.

C'était Pettigrow qui devait être recherché ! Pas son ami ! Remus se prit alors la tête entre les mains. Si seulement il n'avait pas oublié sa potion Tue-Loup, peut-être aurait-il pu utiliser sa forme de loup famélique pour traquer Queudver dans la Forêt Interdite... Mais non, sans cette potion, il avait tout juste réussi à garder ses esprits quelques secondes après la fin de son humiliante métamorphose sous les yeux de ses élèves. Juste le temps d'émettre quelques pitoyables gémissements canins alors qu'Hermione s'était naïvement approché de lui en l'appelant par son nom et ce malgré les mises en garde de Ron. Une initiative risquée car l'esprit de Lupin avait basculé dans la sauvagerie maudite juste après.

Cette potion aurait pu changé tant de destins si elle n'avait pas été oubliée... Et parmi ceux-ci, l'avenir de Mila, qui aurait pu être préservé des contraintes de la lycanthropie. Une Mila dont le père venait d'apparaître dans le salon. Et le regard de celui-ci croisa très vite celui de Remus.

-Encore vous... siffla-t-il.

Remus se contenta hocher la tête, embarrassé tandis que, sans y être invité, l'homme s'installa en face de lui et lui demanda sans détour :

-Qui êtes-vous ?

L'homme aux cicatricesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant