Epilogue 1

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Laurence

je suis épuisée. Je supporte les rayons et la chimio pour lui faire plaisir ainsi qu'aux filles. Il n'y aurait que moi, j'aurais tout abandonné. A quoi bon ? Je suis condamnée. Tout au plus quelques mois et dans quel état !

Le neurochirurgien a été très clair. Pas de chirurgie possible, la tumeur est située au cœur du cerveau et le pronostic est péjoratif. Les traitements ne sont que pour retarder l'échéance et améliorer le confort de mes derniers mois de vie.

Yann n'y a pas cru et m'a traînée chez plusieurs neurochirurgiens et cancérologues connus. La réponse est toujours la même : Retournez près de chez vous, on n'en fera pas plus.

Les premières semaines de thérapie m'ont permis de voir la tumeur diminuer. J'ai eu quelques mois de répit et elle a repris son expansion. Les drogues ne sont plus qu'à titre palliatif.

Je m'affaiblis de jour en jour. Yann le voit mais ne veut pas y croire. Il est là tout le temps, nuit et jour, y compris lors de mes hospitalisations. Il m'assiste pour tout et tient le décompte des rendez vous médicaux et des séances .

Anne est présente mais discrète. Elle assure une partie de l'intendance. Sa maladie a l'amabilité de rester quiescente. Avec elle, je peux discuter à cœur ouvert et évoquer ma mort prochaine. Yann ne veut pas l'entendre.

Çà me fait peur de m'en aller aussi tôt et aussi rapidement. J'avais encore plein de choses à vivre. 

Je regrette de ne pas avoir profité plus de ces dernières années. De m'être torturée par notre vie à trois au lieu d'être heureuse au jour le jour. On se pourrit l'existence pour des conneries. Et on pourrit celle des autres.

-Je ne sais pas ce qu'il va devenir sans moi. Comment il va parvenir à dormir ? Promets moi de veiller sur lui et de ne pas l'abandonner. Même s'il te fait une vie difficile. Au moins que le sacrifice que j'ai fait de t'accepter chez moi serve à quelque chose.

- J'ai tellement souffert de devoir le partager. Au début de ce cancer, je croyais que c'était à cause de la douleur que j'avais endurée moralement depuis toutes ces années. Finalement c'est toi qui a gagné la partie.  Tu vas l'avoir pour toi toute seule. Je voudrais être à ta place.

Anne m'interrompt :

- Il ne faut pas dire çà Laurence. Je te demande pardon pour tout çà ....

Elle éclate en sanglots ,

- Ne pleure pas, c'est moi qui pars . Toi tu restes. Tu dois être courageuse. La vie va être compliquée pour toi. Promets moi que tu vas t'occuper de lui coûte que coûte. De mes filles aussi.

- Je te le jure Laurence, répond-elle à travers ses larmes.

A Léa, je lui ai expliqué qu'elle ne devait pas en vouloir à son père. Que j'avais toujours été consentante et responsable dans cette histoire. Elle aussi, elle s'est engagée à veiller sur lui avec Anne. Elle est tombée enceinte, peu après l'annonce de ma tumeur mais je ne verrai pas ce nouvel être, je sais que ce sera une petite fille.

Avec Yann, je fais bonne figure, j'essaye de minorer mes douleurs et ma faiblesse. Maintenant, il me fait ma toilette, m'habille et me fait manger.Je me force pour lui faire plaisir.Je parviens encore à me rendre dans le salon dans un fauteuil médical. Quand il y a du soleil, il le pousse sur la terrasse.Je n'arrive plus à beaucoup parler. Nous communiquons par le toucher et le regard.

Toutes ces années que nous avons gâchées à nous torturer alors que nous nous aimons tellement. Pourquoi n'ai je jamais vraiment accepté ce ménage à trois ? Anne était malade, elle connaissait le prix de la vie et du bonheur. Moi, j'étais une petite épouse gâtée et protégée.Je trouve que le prix à payer aujourd'hui est élevé.

LE TROIS DE MOI A TOITOù les histoires vivent. Découvrez maintenant