DÉPRESSION QUAND TU NOUS TIENS

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En fait, il commence à plonger dans une dépression profonde. Cela faisait plusieurs années que cela ne s'était pas produit. Des épisodes hivernaux avec de la tristesse et un ralentissement général. Mais qui répondent à une majoration de traitement. Avec le soutien de son psychologue en séances psycho comportementales. Le printemps vient à bout de tout çà.

Au début, je pense que c'est une petite rechute . On est quand même loin de la mauvaise saison.

Le psychiatre qui le suit depuis plusieurs années ne s'inquiète pas plus que moi. Il renforce la même thérapeutique, recommande la psychothérapie et quelques conseils d'hygiène de vie. Trois repas équilibrés, trente minutes de marche et des heures de coucher raisonnables. On fait déjà tout çà, à longueur de temps, depuis son dernier épisode mélancolique.

Au lieu d'amélioration, c'est la descente inéluctable en spirale infernale. Rien n'y fait.

La fatigue l'envahit. Il n' a plus le courage de faire quoique ce soit. Il s'enferme dans ses ruminations anxieuses. Il a peur de tout. De nous perdre, de mourir.Je sais que ses voix le hantent mais il refuse d'en parler.

Les nuits, il reste des heures éveillés, les yeux rivés au plafond. Il a essayé la musique, la télé, les écouteurs sur les oreilles pour me permettre de dormir mais cela le gênait. Il se contente de garder la lumière et il attend. Il se lève pour aller aux toilettes ou boire un verre d'eau et se recouche.

Il est avec moi dans la chambre conjugale, mon sommeil est haché au fur et à mesure de ses déplacements. Au moins, il n'a pas de cauchemars, efficacité des cachets ou absence de sommeil ?

De toute façon, autant il ne peut se passer de ma présence, autant il ne supporte pas que je le masse ou le touche trop longtemps ou de façon appuyée. Il dit que tout contact est douloureux, Electrique. Ma présence est pourtant nécessaire, c'est lui qui décide de nos contacts.

Il est sinistre et irritable. Il se pique d'un rien, un geste, une parole, un regard. Une minute de retard, et il part dans des reproches et des récriminations sans fin. Il tient des propos dévalorisants. Je suis une empotée, une incapable, une bêtasse. Une cruche quoi ! Doublée d'une méchante et ingrate. Je fais tout mal, à contre temps. Je ne comprends rien à sa souffrance, à ses besoins. Dixit ses propos.

Pour l'estime de moi, c'est formidable. Heureusement, Anne parvient à tempérer ses dires quand ils prennent des proportions insupportables. Elle sait le raisonner et le faire revenir à une certaine réalité et calme.

 Elle me rassure sur mes compétences, mes soins que je lui porte et mon comportement dévoué. C'est une pépite cette femme. Elle a toujours le mot juste pour me rasséréner et me donner le courage de continuer. De prendre la bonne distance avec les troubles psychiques de Yann.

Elle ne fait pas que de me soutenir moralement. Elle est là physiquement. On se partage la préparation des repas, les courses. Elle est auprès de lui pour me laisser souffler un après midi, une ou deux fois par semaine .

A chaque fois, Yann se plaint que je l'abandonne mais elle le réprimande gentiment  et il finit par montrer son mécontentement en boudant. Elle me convainc de poursuivre ces sorties pour que je tienne le coup.

J'ai moins le feu sacré qu'il y a quelques années. J'ai vieilli, mes sentiments ont tiédi. La maladie prend trop de place dans notre vie. Je m'épuise. Les semaines, les mois passent et aucune amélioration significative.

D'accord, il se lève, se lave, s'habille et se nourrit. Mais, il ne s'occupe à rien, ne s'intéresse à rien, dort très peu. Il est toujours très susceptible avec moi parce que je suis au premier plan. Avec ses filles qui finissent par ne plus venir qu'en coup de vent et sans leurs enfants.

LE TROIS DE MOI A TOITOù les histoires vivent. Découvrez maintenant