Part. 4

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Claquant la porte d'entrée, je laissai glisser mon dos le long de celle ci, me recroquevillant doucement sur moi même. Comme si c'était la seule manière de calmer mon cœur encore dans l'incompréhension. Je pris ma tête en main, tirant légèrement sur mes cheveux blonds.

«Qu'est ce qu'il m'a pris putain ?»

De un j'ai complètement sombré dans la folie pour aller jouer dans la rue, de deux j'en ai pleuré comme un gosse.
J'avais plus que honte de tout ça et malgré le fait que je m'étais juré de me souvenir de chaque seconde, mon cerveau floutait malgré lui chaque visage que mes yeux avaient effleuré. Comment était cette femme au sac à main bordeaux ? Et la petite fille qui l'accompagnait ? Elle claquait des mains n'est ce pas ? Et toute cette foule derrière, comment était elle ?
Je ne m'en souviens plus.

Cette fois c'était des larmes de rage qui venaient me piquer les yeux, j'étais plus que furieux, contre moi même, mais je me refusais de les pleurer cette fois. Franchement, qu'est ce qu'il m'arrive ? J'ai l'impression que tout est incompréhensible pour mon être quand il s'agit de YoonGi. Pourtant je suis conscient de mes sentiments envers lui. Je le sais. Pourtant ce qui m'échappe c'est pourquoi, comment ? Je ne le connais pas pourtant mon cœur a décidé de s'enticher d'un inconnu, comme ça. Ce n'est pas que je ne le veuille pas, il faut dire que physiquement c'est très compréhensible. Mais je doute que cela se passe comme ça en général.

J'en eus marre de me focaliser sur des pensées noires et me levai, légèrement apaisé. Après tout si je l'aime, c'est normal que je fasse ce genre de choses qui ne me ressemblent pas. Je n'ai plus qu'à assumer, bien que je doute qu'il soit du même bord que moi. Il est vraiment beau, il doit avoir la côte avec les filles ; Cette pensée même m'assène comme un coup de poignard dans le cœur d'ailleurs.

J'allume alors la chaine hi-fi, mettant le son inhabituellement fort pour noyer mon chant, dont le phrasé vacille encore à cause de mes sanglots. Pourtant je ne suis plus triste enfin c'est l'impression que j'en ai.

Dire qu'en temps normal j'aurai peur de la réaction des voisins lorsque je ferme une porte, tout me change radicalement en ce moment. J'en souris.

«Et c'est tant mieux.»

C'est fascinant la manière qu'a la musique d'apaiser tout. Mieux que l'alcool, mieux que la drogue, pourtant beaucoup ne l'ont pas compris. Ou n'y ont jamais accordé d'importance. Je finis par rire de moi même entre deux chansons, essoufflé presque et la gorge chaude, un de ces rires nerveux mais qui relâche toute la pression accumulée. J'allais mal, putain de mal et en l'espace de 5 minutes c'est comme si je me libérais de tout. Mais pas de là à dire que je vais bien à nouveau, le mal de tête causé par mes larmes est toujours bien là pour m'empêcher d'oublier.
Jetant un regard désespéré à l'horloge, je constatai pourquoi j'étais carrément fatigué. 23:17.

***

Je marchai d'un pas lent vers la FAC. Depuis mon déménagement, les 10 minutes que je faisais en bus auparavant étaient désormais faites à pied, et ça me gênait beaucoup moins. Je n'apprécie vraiment pas les transports en commun, surtout avec les garçons un peu rudes de mon lycée. Plus besoin de m'arracher les tympans en enfonçant les écouteurs à fond dans mes oreilles pour éviter d'entendre les incessants :

«Eh pédale ! Tu suces ? J'espère que tu me mates pas. Putain la poisse on est pas loin du pdJ'te jure il harcelait un gars de ma classe l'année dernière. J'aimerais pas être l'un de ses potes.»


J'avais beau vouloir m'en foutre, au fond, ça me blessait toujours un peu ; ça me dégoûte surtout qu'ils me délivrent tant de méchanceté gratuite à cause de ce que je suis.

Arrivé pas loin du portail, j'apportai mes écouteurs à mes oreilles, sans musique. Depuis le début de tout ça, j'ai l'impression que le moindre murmure, le moindre rire s'adresse à ma personne, et il me prend parfois de dévisager des personnes qui ne faisaient rien du tout. La paranoïa. Avant, je flippais affreusement de me faire frapper, tabasser en arrivant, mais heureusement, ça ne m'est jamais arrivé encore, ce qui dissipe peu à peu cette appréhension. Comme quoi les gens ont beau s'adonner aux moqueries, jamais ils n'iront se déchaîner physiquement pour leur opinion.

Je passais le portail où quelques rares élèves arrivés en avance comme moi, fumaient ou étaient sur leur téléphone. Pas de remarque. Je traverse la cour encore déserte, quelques internes viennent seulement de sortir du réfectoire, pas de remarque, alors je profite de cet instant de solitude pour écouter tranquillement de la musique dans un des recoins du hall où je me réfugie tout le temps. L'endroit se remplit peu à peu alors que les musiques défilent dans mes oreilles, soudain j'entends des bruits de pas qui viennent dans ma direction. En quelque sorte habitué, je relève la tête vers ceux qui venaient vers moi, les défiant presque du regard, même si je ne l'assumerai pas bien longtemps. L'un des garçons commence son petit show, plantant son poing dans le mur juste au dessus de mon épaule gauche, un sourire narquois s'étirant peu à peu sur son visage.

Quand je parlais de violence physique, je n'incluais pas ces petites altercations avec des gars qui cherchent leur virilité dans le machisme, et l'homophobie. Pas bien méchant.

«Eh le gay tu --
-Non je ne sucerai pas ta petite queue de puceau si tu veux savoir.
-Mais putain ferme ta gueule tu t'es pris pour quoi au juste ?
-Pas une victime comme toi en tout cas.»

Je le vois serrer le poing, rendant ses jointures pâles. Un des mecs qui l'accompagnait pose discrètement sa main sur son coude, lui demandant implicitement de ne rien faire. Je le reconnais. Il est grand, les cheveux blond décoloré comme moi, et les yeux tirés en amande. Il a pas l'air d'être bien méchant, alors qu'il ne traîne qu'avec des ratés comme eux. Pourtant je le vois, quand je me fais insulter, aller faire goûter son poing à mes 'harceleurs' qui ne reviennent jamais mais qui laissent toujours place à de nouveaux qui subissent la même chose.

Je ne sais pas pourquoi il fait ça, j'imagine qu'il est du même bord que moi mais ce n'est pas pour ça que je ressens l'envie d'aller faire copain-copain avec lui.

Non sans une injure, ils s'en vont, traînant des pieds bruyamment. Ils me saoulent. Tout me saoule. C'est le moment que choisit la sonnerie pour retentir.

Après les cours de la matinée, je n'ai pas le courage de manger à la cafétéria et opte pour l'une des brasseries à proximité. Ça m'évite également de possibles nouvelles réflexions à supporter. Croquant dans le sandwich que je viens de commander, je laisse mes yeux rivés sur la table propre et vide en face de moi, laissant mes pensées divaguer. Celles ci finissent toujours par se diriger vers le même point.

C'était l'année dernière, le point de départ de tout ça. J'ai pensé être tombé amoureux, mais ne l'étant jamais été auparavant, je me suis trompé, en quelque sorte. Une erreur qui me coûte cher aujourd'hui.

J'étais sorti avec un garçon, qui n'était pas du genre discret, lui, et qui m'a forcé en quelque sorte à nous exposer à plusieurs reprises dans l'enceinte du lycée. Je n'étais pas timide mais l'idée ne me tentait pas, ce n'est pas que je n'assumais pas mon orientation sexuelle, mais je ne savais pas trop. Tout se passait bien jusqu'à ce qu'il y ait une fin, évidemment.
Le fait est que lors de notre rupture, je me suis tout pris dans la gueule. Alors que lui, rien, pas d'insultes pas de problèmes. On dit toujours que même après une rupture les sentiments subsistent, mais ce n'est clairement pas mon cas. Il est devenu la personne que j'abhorre le plus au monde.

Tout ça parce que t'es parti avec une fille, JungKook.

It's Been So Long • (YoonMin) Where stories live. Discover now