Chapitre 4

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Debout au milieu des arbres, elle m'attendait. Ses cheveux blancs volaient autour d'elle telle une entité vivante, faisant échos à ses yeux et à la neige alentour.

          Étais-je chez moi ? Étais-je ailleurs ? Je l'ignorais.

          Son corps était maigre, presque rachitique, et dénotait une vieillesse que contredisait son visage avec si peu de rides. Pourtant, dans l'infini de ses yeux, je devinai une sagesse millénaire.

          Qui était-elle ? Qu'elle âge avait-elle ? Que me voulait-elle ?

          Elle fit un pas. Ses pieds nus s'enfoncèrent dans la boue. Son attention ne dériva pas un instant de moi.

          Voulait-elle me blesser ? Me parler ?

          J'éprouverai à la fois une curiosité dévorante pour cette inconnue, et un saisissant sentiment de terreur.

          Tandis qu'elle s'avançait, je ne bougeai pas. Dans tous les rêves où je la rencontrai, je ne bougeai pas.

          Une fois devant moi, elle fit le geste de me frapper. Je levai ma main pour me protéger, et ses doigts entaillèrent profondément ma paume, m'arrachant un hurlement de douleur trop aigue.

          Le cri scandalisé de ma sœur me réveilla en sursaut.

          — Du brun ? J'avais dit du parme !

          — Je ne trouve plus la palette, bredouilla une femme, visiblement effarée.

          — Retrouve moi ce maquillage, et vite !

          Trempée de sueur, je m'y une longue minute à comprendre que je venais de me réveiller d'un énième cauchemar. Les nuits où cette femme étrange m'apparaissait, je m'éveillais toujours tremblante, avec une impression de non-dit dérangeante.

          Je me redressai en position assise, essayant de remettre mes pensées en ordre pendant que mon ainée vociférait à pleins poumons en bas.

          Peu importe.

          Bien décidée à faire abstraction de ce rêve – comme des centaines d'autres – je fis un bref inventaire de ma personne. J'avais encore des marques sur les côtes et l'œil un peu enflé, sinon j'allais bien. En consultant mon réveil, je vis qu'il était 13h12. La cérémonie allait avoir lieu dans moins d'une heure.

          Je bondis sur mes pieds. Même si je n'étais pas sortie faire un tour cette nuit, je m'étais endormie très tard, tourmentée par mes pensées. J'étais fatiguée et courbaturée. Je pris le temps de m'étirer malgré les restes de douleur.

          Estimant que toutes les amies de Nadia étaient en bas pour l'aider à se préparer, je me faufilai dans la salle de bain. Je pris une douche rapide, puis me séchai les cheveux au mieux, mes gestes mal assurés. Je détestai être maladroite.

          Enroulée dans une serviette, j'allais sortir quand la porte s'ouvrit sur Kim. L'amie de Nadia, svelte et blonde à l'image de mon ainée, gronda de mépris.

          — Dégage de mon chemin, la maudite.    

          J'eus à peine le temps de me décaler qu'elle m'envoya un coup de coude dans les côtes. Je me figeai tant mon souffle fut coupé brutalement.

          — Tu ne m'as pas entendue ?

          Si, parfaitement. Je repartis au plus vite dans ma chambre, et refermai derrière moi avec les larmes aux yeux. Je griffai la marque sur mon cou, que je haïssais sans avoir besoin de la voir.

Mira ✔️Où les histoires vivent. Découvrez maintenant