- GAGNÉ !
Bella jette ses cartes contre la table basse, énervée.
- C'est bon, ça m'énerve.
Après s'être levé sous le regard de ma mère et le mien, elle quitte la pièce. Ma sœur est une terrible mauvaise perdante ; il faut toujours que ce soit elle qui gagne, qu'elle détienne le pouvoir. Elle m'a très fortement manqué, mais je ne la reconnais plus. Elle nous prend de haut, fait son interessante. L'Australie n'a pas dû être bénéfique pour elle, je plains ses amies qui doivent la supporter. Au fond, elle a toujours eu ce caractère, mais j'avais espoir qu'il s'estompe en vieillissant : hélas, non.
- Laisse-la, me sourit maman.
- On refait une partie ?
Elle émet un grand bâillement et me sort une excuse en rigolant. Comme si son geste était mal poli. C'est tout à fait elle, elle est un modèle, un vrai.
- Je vais essayer d'appeler l'hôpital.
Je me lève pour l'embrasser avant de débarrasser tous les jeux sortis. Elle se précipite vers sa chambre, je l'entend fermer sa porte à double tours.
Roulant des yeux devant ce changement d'ambiance, je monte à mon tour dans ma chambre. Ne sachant pas quoi faire, je m'attaque à mon ordi. Il est ici 17h, donc 1h au Brésil où se trouve Maya. J'ouvre Messenger sans tarder et regarde si mon amie est connectée.
De Maya :
ma belleeeee
j'attendais que tu te connecte, un facetime ?À Maya :
j'allais te le demander :)L'écran affiche sa tête bronzée.
- L'été est à peine commencer et tu es déjà magnifique.
Elle rigole avant de poser ses coudes contre son bureau. Je la sens me détailler dans tous les coins, mes yeux se lève automatiquement, me sentant mal à l'aise.
- Alors ? Raconte moi ce que j'ai raté.
Zayn. C'est le premier mot qui me vient en tête. On ne sait peut être pas parlé, ni correctement vu, mais c'est ce qui chamboule mon début de vacances. Choquée, et je n'en attendais pas moins de sa part : elle saute de son lit. Je vois différentes phases sur son visage, ça passe de la joie, à la colère, au soulagement.
- Les voisins d'en face ont déménagé.
- Me dit pas qu'il s'est posé en face ?
Ses bras lâchent sa tête qui retombent dans un bruit fort sur le bois de son bureau. Un petit cri de douleur se fait entendre ainsi que des rires de ma part. Punaise, j'aurai dû enregistrer ça. Nous explosons de rire toutes les deux, et le sujet de Zayn dévie rapidement sur la ville sans moi. Intérieurement, je suis soulagée. Rien que le fait d'en avoir parlé avec elle m'a remémoré pleins de souvenirs que j'aurai préféré garder plus loin.
- Oh, Gigi. Faut que je dorme il est super tard chez moi.
Après un décompte, nous coupons toutes les deux nos caméras en même temps. Je n'aurai pas penser qu'elle aurait pu me manquer autant. Il est 19 heures dans la capitale française, j'attrape ma veste en cuir et sors de ma chambre. Escaliers dévalés, je tombe nez à nez avec ma mère.
- Où vas-tu à cette heure là ?
- Mh, j'ai besoin de prendre l'air. Je n'ai pas eu vraiment le temps de faire le tour du quartier depuis mon arrivée.
Elle attrape ma main en souriant ; je lui promet de ne pas traîner. Ma mère est forte. Je lui embrasse rapidement le front et cours dehors, ayant peur d'avoir du regret d'être sorti.
Je farfouille dans la poche de ma veste à la recherche de petits trésors. Par chance je tombe sur des écouteurs ainsi qu'une boîte de chewing-gum à la menthe ; je me sers donc avant d'enfoncer les oreillettes en lançant Hopeless Romantic de Wiz Khalifa. J'ouvre le portail et m'arrête net pour observer la maison qui se trouve en face ; oui je la connais. J'ai passé des heures devant ma fenêtre à observer le couple se disputer, les faux amis bourges défilés pour des soirées plus hypocrites les unes que les autres, et tout une vie de dérouler d'une famille riche.
J'active map sur mon téléphone et active la localisation pour me rendre à la Tour Eiffel. Grand classique, oui, mais il en a le mérite. Je sillonne les plus grandes rues, celles où je ne risque pas de croiser d'êtres suspects. Je ne suis pas trop rassurée à l'idée de marcher seule un soir comme cela mais cette ville a le dont de rendre tout sublime, nous faisant oublier le danger de la vie. J'aperçois enfin les lumières de la ville, le vrai centre. Le haut de la Tour est illuminé, j'en profite pour faire ma touriste et garde un souvenir de ce moment en prenant une photo.
Je continue de marcher le long de la semaine. De la musique attire mon attention, je me dirige vers le bruit. J'aperçois au loin, sur une place, un regroupement de personnes.- ...But I won't hesitate no more, no more. It cannot wait, I'm yours...
En souriant je rejoins les autres et apprécie ce que j'entend. Cette musique est magnifique, sa voix est si douce. Je m'autorise à repenser aux moment que j'ai passer avec Zayn cet été là. Je dépose un billet dans le chapeau du charmant jeune homme, une fois sa chanson terminé. A la vue de ce qui m'entoure, je constate qu'il a eu de l'effet. Tout le monde semble si heureux.
Je remonte vers la Tour Eiffel, prête à rentrer.
- J'ai besoin de respirer, tu comprends ça ?
Un frisson me parcours le corps à l'entente de sa voix. La sienne. J'essaie en vain de me retenir de le chercher dans la foule qui m'entoure. Je n'entend plus que lui.
- Gigi ?
Je me stoppe nette. C'est lui.
- Je sais que tu m'entends, fais pas la sourde.
Rien qu'au son de sa voix, je sais qu'il n'est pas dans son état.
- J'ai peut être tout simplement pas l'envie de te voir.
- C'est moi qui suis en colère.
Il est face à moi. Je ne vois que ses yeux, imprégné de rouge. Il a bu. Beaucoup. J'étais obligée à un moment où un autre de me confronter à lui. On habite l'un en face de l'autre, mais il a fallu que je le croise ici. J'étais venu prendre l'air et me voilà encore pire qu'en quittant la maison.
Je lui souris rapidement, et reprend ma route le plus vite possible.
- Ça se passe de mal en bien, continue-t-il.
Je ne dis rien. Il me suit.
- C'est difficile chez moi. Mais ça s'arrangera, hein ?
- Oui, sûrement.
- Tu es encore plus belle qu'avant.
Cette fois je tremble. Faites le taire, que ce supplice s'arrête pour de bon. Je ne le regarde pas, je sais qu'il est derrière moi. Je n'aime pas l'idée qu'il puisse me voir, voir l'effet qu'il a sur moi - quoique que sa mémoire lui jouera des tours, merci l'alcool.
- Personne ne peut nous séparer.
Je ne sais plus trop de quoi il parle. Fait-il toujours référence à sa famille ? Je me retourne d'un coup, prête à l'affronter, mais il n'est plus là.