Mon lycanthrope favori

Chapitre XXVII : Danger et décision

Amaryllis et moi avons appris en lisant le dossier sur les Minuit que leur territoire principal se trouvait à environ quatre heures de train depuis chez nous, en France, pays voisin au nôtre. C'est aussi de ce pays que vient Gary, d'ailleurs.
J'aurais bien voulu aller directement sur le terrain pour vérifier certaines choses mais je ne peux pas m'absenter aussi longtemps. Et pas sans Amaryllis.
Je ne tiens pas à l'exposer au danger en nous jetant peut-être dans la gueule du loup, c'est la peine de le dire, en allant sur le territoire des Minuit mais nous avons commencé ensemble et je lui ai promis que je ne ferai rien sans elle.
L'hiver approchait à grands pas. Bientôt, ce serait Noël. Cela faisait quelques mois que nous n'avancions pas, en rien. Nous avions étudié des dizaines de fois le dossier sur les Minuit et le rapport écrit sur Edward Gargow mais tout cela avait une limite. Nous avions relevé des informations paraissant banales parmi les autres mais en y prêtant attention, nous avions souligné deux points sombres dans le dossier des Minuit. On ignorait l'origine de la naissance d'Anna, la jeune héritière actuelle de la meute, et feu le fils de Fabrizia était mort en tombant dans les escaliers chez eux. Un loup-garou qui meurt en tombant dans les escaliers, c'est impensable ! À moins de tomber la poitrine sur une lance, un javelot ou une épée, et même en essayant de se tordre la nuque, c'est impossible. Les lycanthropes sont bien trop résistants pour cela. Un bête escalier ne tuerait pas un loup-garou. Mais ces documents contenaient toujours le même nombre d'informations et nous commencions donc à voir le bout du tunnel sans même avoir vu la totalité de son intérieur.
Mais la veille, j'ai appris avec grand bonheur une bonne nouvelle !

Aujourd'hui, je cours au gymnase depuis mon arrêt de bus avec une joie que je ne cherche pas à dissimuler. Mes pas sont longs et élancés, comme ceux que fait un loup pendant sa course. Quand Amaryllis me voit débarquer tel un boulet de canon dans l'entrée, elle ouvre des yeux légèrement surpris. Il est vrai qu'il est plutôt rare de me voir très joyeux de si bon matin et surtout, faire un effort physique qui risque de me faire suer sans que l'on ne me l'ait demandé...
-Tu as l'air de péter la forme, Alexis ! me dit-elle avec un sourire en s'approchant de moi.
-Et comment ! dis-je en épongeant mon front avec un petit mouchoir sorti des tréfonds d'une de mes poches.
-Quelle est la bonne nouvelle que tu dois m'annoncer ? me sourit ma petite amie.
-Comment sais-tu que...
-Vu ton expression, ce n'est pas bien difficile de deviner ! me coupe-t-elle avec un clin d'œil.
Je reprends mon souffle. Je halète mais mes entraînements ont quand même un peu de bon, je ne suis plus aussi facilement épuisé.
-Pour te dire, tous les deux ans, chaque meute sous les ordres des Primus se fait contrôler par l'alpha des Primus en personne ! Les prochains sur la liste, quelques jours après Noël, sont, devine qui ?
-À tout hasard, me dit Amaryllis en fisant mine de réfléchir. Les Minuit ?
-Oui ! je confirme avec un excès de joie dans la voix. Mon grand-père tient absolument à m'emmener lors de sa prochaine inspection chez eux ! Nous pourrons peut-être trouver quelque chose en plus chez eux, directement sur le terrain !

Mais ce ne fut que le soir que mon enthousiasme retomba, et bien vite...
-Comment ça ?
-Pardon, Alexis, mais c'est comme ça !
-Je ne peux pas emmener Amaryllis avec moi ? Et pourquoi ? Elle est, comme vous adorez dire, ma compagne, oui ou non ?
Mon père, en face de moi, tente de me raisonner. Mais je ne veux rien entendre. Je suis indissociable d'Amaryllis.
-Je ne peux pas l'infirmer, Alexis, tu as raison sur ce point. Mais amener une humaine, civile et qui n'est pas entraînée, là-bas, ce serait du suicide !
-Elle tient à venir ! Elle me l'a dit elle-même !
-Nous ne pouvons pas prendre le risque d'exposer une civile au danger, surtout de cette trempe-là ! Tu sais très bien combien les Minuit sont une meute aussi redoutée que redoutable !
Je sens la colère monter en moi.
-Ne parle pas d'Amaryllis comme si tu ne la connaissais pas ! C'est une humaine, plus faible que les loups-garous, je ne peux pas le nier, elle est censée être une civile, c'est vrai mais elle n'est pas une civile classique car elle connaît l'existence des loups-garous ! Elle n'a pas arrêté de travailler et d'enquêter avec moi, elle sait parfaitement à quoi s'attendre et surtout en tant qu'humaine !