Happy Ending Company

Chapitre 12 - Nul n'est parfait !

 Amy avait laissé les garçons la convaincre de leur confier la préparation du diner tandis qu’elle prendrait une douche. Sous le jet d’eau bouillante, elle s’étonnait encore de la complicité grandissante entre Jeff et cet homme. Ils n’avaient pourtant rien en commun. Puis elle repensa au visage rouge de colère de Christopher quand il les avait surpris, Andrew et elle, endormis dans les bras l’un de l’autre. Elle ne comprenait pas vraiment la réaction violente du jeune homme. Il aurait pu rester et lui demander des explications mais non, il était tout simplement parti en claquant la porte. Comme si elle lui appartenait déjà, alors qu’ils n’avaient eu qu’un seul rendez-vous ensemble. Amy se frotta énergiquement les bras et se laissa emporter par les effluves parfumées de son gel douche. Elle détestait par-dessus tout qu’on essaie de contrôler sa vie et Christopher ne ferait pas l’exception à la règle. Il devrait accepter toutes ses facettes s’il voulait continuer avec elle.

Elle se rinça ensuite rapidement puis s’enroula dans une grande serviette éponge. Elle n’était pas réellement pressée. C’était agréable de prendre soin de soi et de s’accorder du temps. Alors elle sécha ses cheveux puis les remonta en une queue de cheval haute. Ensuite elle passa un top rouge à bretelles et un jeans. Elle prit le temps de se maquiller et de se pouponner. Une fois terminée, elle s’observa quelques minutes dans le miroir qui lui faisait face. C’était mieux. Beaucoup mieux que ce matin en tout cas. Elle ne ressemblait plus à une vilaine gargouille et c’était toujours ça de gagné. Elle rangea un peu la salle de bain puis décida qu’il était temps de les rejoindre. Quand elle entra dans la cuisine, une délicieuse odeur l’enveloppa et la fit saliver. Les deux hommes riaient devant un verre de vin. Ils avaient l’air de très bien s’entendre. Peut-être même un peu trop bien et Amy avait la désagréable impression qu’elle était la source de leurs moqueries. Elle soupira fataliste avant de s’approcher plus près.

- Amy ? Est-ce bien toi ? Demanda Jeff sur un ton de surprise. Où est passée la vilaine femme troll de tout à l’heure ?

- La ferme, sorcière ! Répondit Amy. Personne n’est parfait, tu sais. Mais, au moins moi j’ai une excuse. C’est normal de ne pas ressembler à Miss Univers quand on est malade. Pour toi, par contre …

- Pardonnez-moi Princesse, le pauvre manant que je suis se prosterne à vos pieds ! Répondit-il en effectuant une grossière révérence.   

- Je comprends mieux votre comportement loufoque et votre passion pour les contes de fée, se joignit Andrew à la conversation. Vous vous êtes vraiment bien trouvés tous les deux.

- Tout juste, Auguste ! Répliqua Jeff. Et si tu veux te joindre à notre joyeuse équipée, il va falloir t’y faire. Je te verrais assez bien en preux chevalier avec une armure et une immense lance…

- Et si on mangeait maintenant, proposa Amy pour changer de conversation tout en faisant de gros yeux à son ami.

Elle ignorait quelle mouche avait piqué Jeff mais il était hors de question qu’Andrew fasse partie de sa vie. Il en savait déjà beaucoup trop sur elle après cette journée. D’ailleurs elle ignorait l’étendue des dégâts. Elle avait légèrement tendance à se transformer en poisson rouge quand elle avait des montées de fièvre. C’était comme ça depuis toute petite déjà. Elle délirait tellement qu’elle en oubliait presque tout. Ensuite venait invariablement le moment désagréable où les spectateurs de son humiliation se faisaient une joie de lui rappeler toutes les sottises qu’elle avait pu dire ou faire. Jeff prenait d’ailleurs un réel plaisir à lui narrer toutes ses frasques. La plus mémorable d’entre toutes eut lieu quand ils étaient encore à la fac.

C’était leur première année, cela faisait à peine deux mois que les cours avaient commencé. Amy habitait seule pour la première fois loin de ses parents. D’une nature timide, elle ne s’était pas encore fait d’ami. Enfin bref, ce fameux jour elle se réveilla dans un état plus que fébrile mais elle ne voulut pas rater son cours pour si peu. Un peu dans le brouillard, elle s’était levée et préparée à partir en quatrième vitesse. Une fois arrivée dans l’amphithéâtre, elle était allée s’asseoir au premier rang, comme elle en avait pris l’habitude. Elle avait sorti ses affaires de son sac puis enlevé son manteau, jusque là boutonné jusqu’en haut car elle avait de nombreux frissons à cause de la fièvre. Elle ouvrait à peine son manuel lorsque le professeur Richardson avait fait son entrée et était venu à son bureau juste devant elle. Elle lui avait alors lancé son bonjour habituel, celui-ci avait relevé la tête, très certainement pour lui répondre à son tour mais s’était figé net avant d’exploser littéralement de rire et de lui dire « Mademoiselle Wellington, je suis bien conscient que la mode chez les jeunes est assez extravagante de nos jours mais ne croyez-vous pas que cette chemise serait plus appropriée pour aller dormir que pour assister à l’un de mes cours ? A moins que vous ne jugiez mon intervention tellement assommante que vous en avez prévu une sieste ? ». Ce fut seulement après cette cinglante remarque, qu’elle s’était rendue compte avec horreur qu’elle avait oublié de changer de haut et qu’elle portait toujours sa chemise de pyjama sur laquelle était imprimée les personnages principaux du Livre de la Jungle. Mortifiée, elle s’était mise à rougir et était sur le point de fondre en larmes quand Jeff était venu s’asseoir à côté d’elle et l’avait complimenté sur sa tenue. Interloquée par la réaction du jeune homme, elle avait été prise d’un fou rire digne d’une hyène selon lui et ils avaient dû quitter la salle sous le regard désapprobateur de l’enseignant.