Chapitre 23 : Coupable ?

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What you want-Evanescence

Quand je suis revenue dans la maison après le départ des parents de Wade et de Wayne, je n'ai trouvé Wade nulle part. Je n'ai pas cherché à comprendre où il se trouvait ni ce qu'il s'était dit avec ses parents. Cela ne me regarde pas. C'est ses démons. Il doit les gérer comme il le veut. Lorsque je suis allée me coucher, je n'ai pas tardé à rejoindre Morphée. Je me suis dit que j'avais gagné une victoire mais j'avais tort. Je me suis réveillée à 2h du matin. Depuis je suis dans le bureau de Wade assise à même le sol avec pour seule compagnie les dossiers de mon père. Des rapports de constructions ainsi que leurs autorisations de construire, les subventions demandées par tel commerce et j'en passe. En lisant tous ces chiffres, je comprends pourquoi mon père rentrait parfois d'humeur maussade. Chaque pochette est triée par code de couleurs. Je les ai toute faites sauf une. Celle-ci est en rouge annotée« dettes ». Avant de l'ouvrir j'essaye de me remémorer si mes parents avaient des endettements, malheureusement ce n'est pas le genre de chose dont on parle auprès de ses enfants. C'est ça le souci aussi avec cette affaire, j'étais trop jeune pour me souvenir de chaque détail. J'étais tellement focalisée sur ma propre vie que je ne me suis pas souciée de celle de mes parents qui était menacée. Je soulève les élastiques de la pochette en question puis soulève la feuille cartonnée. Je prends le premier volet du dossier. Hank Jenkins. Le petit ami de May... je commence ma lecture et au fur et à mesure des pages ce que j'y lis me comprime le cœur. Hank a demandé un échelonnage concernant les factures d'hôpital de sa femme. Je me souviens que May m'en avait parlé quand je suis revenue à New-Port. Martha est décédée d'un cancer du sein il y a trois ans m'avait-elle dit. Le cancer s'est manifesté il y a douze ans, elle avait fait une rechute des années plus tard. C'est ça le problème avec le cancer, on le combat mais on ne sait pas s'il va revenir ou si on l'a vraiment vaincu. Dans le cas de Martha Jenkins, le cancer a gagné en laissant un mari endetté à vie. Mon père a refusé sa demande. Dans ce genre de métier, maire en l'occurrence, on ne peut pas prendre de décision par pitié. Mon père a fait plusieurs recherches pour savoir quelle réponse donner à Hank. Étant donné qu'il avait déjà mis une hypothèque sur sa maison et que son commerce n'était pas assez fructueux pour avoir un crédit mon père n'a pas pu appuyer sa demande. J'ose imaginer la réaction de Hank. À sa place j'aurai fait un massacre... Soudain, une sensation de panique m'envahit. Et si c'était lui ? Depuis que je suis ici, aucune piste n'a mené à quelque chose de concret. Hank lui a un mobile. Et même si ça me déchire le cœur de l'admettre, ça ne peut être que lui. C'est aussi là que je comprends comment un homme respectable avec de bons rapports avec tout le monde peut commettre l'irréparable. Je me lève, les jambes ankylosées. Je dois absolument en informer Wayne. Cet homme est peut être le meurtrier de mes parents. Concernant Cassie je n'ai pas d'explication plausible. Lui seul pourra nous donner la réponse. Peut-être qu'elle s'est enfuie par peur qu'il ne s'en prenne à elle...

Je consulte l'heure sur mon portable. 8H45. Avec un peu de chance il sera déjà debout. Je colle mon téléphone à l'oreille puis attends qu'il décroche. Alors que je m'y attendais le moins, j'entends sa voix rocailleuse me répondre.

— Allô ?

— Wayne, c'est Dy. J'ai peut-être trouvé quelque chose dans les dossiers de mon père. Je peux te rejoindre chez toi ?

— Euh il est quelle heure, là ?

— Bientôt 9h.

— Je dois être au poste pour un contrôle routinier vers 10h30 ? Je t'envoie un message quand j'ai fini.

— Ça marche. À tout à l'heure.

Sans attendre sa réponse je raccroche puis je me décide à aller courir un peu histoire de me déconnecter de cette réalité.

Foulée par foulée je gravis tant bien que mal la côte qui mène à la marina. New-Port, comme dans n'importe quelle ville, il n'y a pas grand-chose à voir. Ici, le seul lieu à peu près vivant est la marina. Voir les voiliers suivant le mouvement de l'eau à un côté relaxant. Les commerçants bordent la mer ce qui apporte un peu plus de vie. À bout de souffle je décide de m'arrêter au café du coin pour me réchauffer avec une bonne tasse bien fumante. Je m'installe à une table puis passe commande. J'admire l'envol des mouettes qui se déplacent toujours en groupe. En déployant leurs ailes, elles sont maîtres d'elles-mêmes. Elles peuvent aller où elles veulent sans se soucier de ce qui se passe autour d'elles. Comme un ballet magique vers une nouvelle aventure. Ma boisson chaude posée devant moi, je règle la note puis prend la tasse et hume les odeurs du café torréfié.

— Dylan ?

En entendant mon prénom je tourne ma tête et vois Hank. Comme quoi le hasard fait plutôt bien les choses. Je ne sais pas avec certitudes si c'est bien lui qui a ôté la vie de mes parents alors je fais comme si de rien n'était et l'invite à s'asseoir près de moi. J'ai dans l'idée d'en apprendre plus sur lui.

— Hank est-ce que je peux vous demander quelques petites choses sur vous ? Étant donné que vous êtes avec ma tante vous comprenez bien que je voudrais en savoir un peu plus sur vous.

— Bien sûr, je comprends parfaitement. Je n'ai rien à cacher vous savez. Je suis un vieil homme sans histoire.

— Alors parlez-moi de vous, je lance avec un petit sourire timide.

— Et bien je ne suis pas vraiment un homme sans histoire comme je viens de vous dire, mais que voulez-vous on ne va pas refaire l'histoire.

— Comment ça ?

— Quand j'étais jeune, un peu plus jeune que toi je me suis fait arrêter pour plusieurs délits. J'étais encore mineur à l'époque donc ça ne m'a pas porté préjudice. Il faut dire que ma famille d'accueil a laissé des traces.

Cet homme est une énigme à lui tout seul. Je ne comprends absolument pas de quoi il veut parler.

— Une famille d'accueil ?

— Oui mes parents étaient des toxicomanes, les services sociaux m'ont donc placé en foyer puis en famille d'accueil en attendant qu'une vraie famille veuille bien de moi. Heureusement pour moi ce fut le cas trois ans plus tard. Je n'y croyais plus. Tu sais plus on prend de l'âge moins on a de chance d'être adopté. La veille de mes 10 ans, Dieu m'a donné une famille, une vraie.

Sa confession me fait froid dans le dos. Je me rappelle le récit de May, le soir où elle s'est faite abuser. Ce qu'il me dit est à peu près mot pour mot ceux de sa confession quand je suis venue la voir. Je vois Hank continuer son histoire mais je ne l'écoute plus. Pour moi ça ne fait aucun doute. Hank est derrière tout ça. Le viol de May et le meurtre de mes parents. Je coupe court à cette discussion prétextant un rendez-vous. Sans attendre je me sauve. En arrivant près du poste de police, je percute de plein fouet Wayne. Essoufflée je reprends mon souffle. Il m'interroge du regard et je lui avoue tout ce que Hank vient de m'annoncer.

— Putain j'en reviens pas depuis tout ce temps il était là ! Je préviens Elliott pour son arrestation.

Je hoche la tête. Il disparaît pour revenir quelques minutes plus tard.

— Il s'en charge. Il m'a aussi informé pour me dire que l'on pouvait voir Andy dès aujourd'hui. T'es partante ?

— Oui, mais que va-t-il advenir pour Hank ?

— Elliott va le mettre en garde à vue pour 48h et va le questionner en mettant une équipe sur le coup pour récupérer le maximum de preuve.

Le sort de Hank est jeté. Wayne et moi allons de ce pas rendre visite à Andy, en espérant que celui-ci soit aussi coopératif, car je ne sais toujours pas ce qu'est devenue Cassie.

Présumé coupable [ terminé ]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant