♪ Bring me to life - Evanescence
J'ouvre difficilement les yeux. La place de Wade est vide. Je la touche. Elle est froide. Je m'étire, enfile sa chemise de la veille et pars à sa recherche. Je ne sais même pas quelle heure il est. Le rez-de-chaussée est baigné par le soleil. Je continue mon expédition et trouve Wade assis, recroquevillé dos à moi dans la cuisine. Je l'entends chuchoter.
— Tu parles à qui ?
Il tourne sa tête et me fait signe de me taire. Je m'approche doucement de lui sans faire de bruit. Je relève la tête pour comprendre ce qu'il se passe. Ce que je vois est tellement mignon que mon cœur se réchauffe immédiatement. Wade caresse prudemment un chaton roux tandis qu'il tente de boire un peu de lait. Le bébé chat émet des ronronnements. Wade souffle comme s'il était soulagé d'avoir apprivoisé l'animal. Je l'interroge du regard. Il se décale lentement du petit animal et se redresse.
— J'ai entendu des petits bruits avant que le soleil ne se lève, je me suis réveillé pour voir ce que c'était et quand j'ai ouvert la porte la boule de poils faisait ses griffes sur le bois. Quand il m'a vu, il est venu se frotter contre mes jambes et est rentré comme s'il était chez lui. En attendant que tu te lèves à ton tour, je me suis occupé de lui.
— Et pourquoi avoir attendu que je me réveille ?
— Je souhaiterais qu'on le garde, qu'en penses-tu ?
Je suis désarçonnée par sa question. Mon cœur bat à cent à l'heure. Jamais en revenant ici, je ne me serai doutée de ça. Pourtant Wade sait bien que dès que le coupable est derrière les barreaux je reprendrai ma vie. Celle que j'ai à Manhattan. Je recule pour mettre de l'espace entre lui et moi. Je m'assois sur le canapé et frotte mon visage de mes mains.
— Dy ?
Je souffle, relève la tête et affronte son regard plein d'espoir.
— Wade, je...
— Tu quoi ?!
Je sens à l'intonation de sa voix qu'il perd patience. Alors je lâche tout d'une traite.
— Dès qu'Andy, Logan et toi êtes innocentés, je repars...
Je m'apprête à continuer mon débit mais il m'en empêche.
— Ouais pour récupérer tes affaires. Logique.
Je secoue la tête et déglutis.
— Non je repars pour toujours.
Je fixe la cheminée face à moi. Je ne peux et ne veux pas affronter son regard. Un coup violent me fait sursauter. Je tourne enfin la tête vers lui. Son regard est noir de rage. Du sang dégouline de son poing gauche. Pas besoin d'avoir le Qi d'Einstein pour comprendre le pourquoi du comment. Sa voix rauque me sort de ma torpeur.
— Prends tes affaires et dégage de chez moi. De ma vie. Je ne veux plus jamais te voir Dylan.
Des larmes silencieuses coulent le long de mes joues rougies par la honte. Quelques minutes plus tard, je franchis le seuil de la porte. Plus j'avance et plus mes larmes, qui ne m'ont pas quittées depuis qu'elles ont commencé à couler, dégringolent sur mon visage. Je monte dans la voiture et repars chez May.
Je suis affalée dans le lit quand tante May entre dans la chambre. Voyant mon état, elle me prend dans ses bras et me console en silence. J'ai dû m'assoupir car la chambre est plongée dans le noir. Je m'empare de mon téléphone posé sur la table de chevet. 18H06. Je n'ai rien mangé de la journée, mon ventre grogne. Étant donné les événements je n'ai rien pu avaler. Une fois de plus j'ai merdé. Je suis restée campée sur mes positions. Je comprends la colère de Wade. Mais après tout ce qui s'est passé, entre tous les secrets et les mensonges, ce n'est plus un gouffre qu'il y a entre nous mais un putain de cratère. Prise de crampes violentes, je décide qu'il est temps de descendre et de m'alimenter un minimum même si la joie n'est pas là. J'arrive à pas de loup dans le salon. Ma tante, surprise de me voir, referme vivement un tiroir. Lorsqu'elle me voit, elle me lance un sourire forcé. May qu'as-tu à cacher ? C'est ça le problème. A chaque fois qu'elle me voit ou que je lui pose des questions, même anodines, soit elle change de sujet soit elle se sauve.
— Je ne pensais pas que tu allais te réveiller ma puce.
— Il faut croire que mon ventre crie famine.
— Je vais nous faire un bon petit plat dans ce cas.
Elle me fuit aussitôt. Je fronce mes sourcils. Mon instinct d'enquêtrice reprend le dessus malgré l'état de mon cœur. Je regarde derrière moi pour être sûre qu'elle ne revienne pas sur ses pas. Je m'approche du tiroir et le tire doucement et lentement pour éviter le moindre bruit. Une fois ouvert, je découvre un vieil album de photos. Je guette une fois de plus derrière moi. Tante May chante dans la cuisine une chanson d'Otis Redding. Je soulève la couverture de l'album. Une photo d'un nourrisson prise à la maternité. Sûrement une de Cassie ou de moi. Je continue de le feuilleter et plus les pages défilent plus je me rends compte qu'il s'agit d'un garçon. Mais pas n'importe quel garçon. Il s'agit d'Andy. Pourquoi est-t-elle en possession de l'album photo contenant des photos d'Andy bébé. Je n'ai jamais connu la mère D'Andy, puisqu'elle est décédée un an avant ma naissance. Elle et May étaient-elles amies ? Même si c'était le cas, cet album devrait être chez Elliot. Ma tante, me sortant de mes réflexions, m'informe que le dîner est prêt. Je repose l'objet dans le tiroir et le referme avec précaution. Je m'installe autour de la table de la cuisine et découpe le poulet aux pruneaux. Le repas se passe dans un silence qui pourrait réveiller un mort. May le rompt.
— Comment va Ashton ?
— Elle va bien.
— Tu n'étais pas chez elle ?
— Euh si bien sûr.
— Dylan arrête de me mentir. J'ai vu son père hier et il m'a informé que sa fille était chez lui.
Je repose les couverts dans l'assiette.
— J'étais chez Wade.
— Oh. Et ?
— Et quoi ?
— Vous deux, vous...
— May tu veux savoir quoi ? Si lui et moi nous nous sommes remis ensemble ? La réponse est non. Je ne peux pas.
— Pourquoi tu te mets autant de barrières invisibles ? Tu es jeune ma puce. Si Wade est ta rédemption accepte la. J'ai toujours su que tu n'avais pas pu l'oublier.
— Il n'y a pas que lui que je n'ai pas pu oublier. Je dois te rappeler toute la merde qui nous est tombée dessus ? Qu'il ait fait de la taule pour un crime qu'il n'a pas commis ? Tu veux que je te rappelle que mon meilleur ami a tenté de mettre fin à ses jours et qu'en ce moment même il est entre la vie et la mort ?! Et sans parler d'Andy qui est hospitalisé pour dieu sait quoi dans un asile ?!
May craque et se met à pleurer. Je n'aurai pas dû déverser ma colère contre elle. Elle n'y est pour rien. Je me lève pour la prendre dans mes bras, pour m'excuser mais elle m'en empêche en levant une de ses mains. Je déguerpis d'ici. Je prends mon manteau, les clés de la voiture et me rue dehors. Une feuille pliée est posée sur le capot de la caisse. Un caillou est posé dessus. Je l'enlève et prends le papier. Quand je le déplie, je découvre une écriture faite de majuscule.
« SANS LE VOULOIR TU M'AIDES DANS MES PLANS. SANS TOI A SES COTES, IL RESTE DEMUNI. COMME LOGAN. PERSONNE NE SE SOUCIE DE LUI PAS PLUS QUE DE WADE. LA FIN APPROCHE. TIC TAC D. TIC TAC. »
Je me retourne dans tous les sens dans l'espoir d'apercevoir quelqu'un. Mais c'est peine perdue. Le papier est gelé. Il est là depuis très longtemps. Le maître chanteur est déjà bien loin. Je relis le mot qui a été écrit à mon intention. Cette personne croit qu'elle m'a évincée. Mais elle ne me connaît pas. Elle ne sait pas que la rage qui me ronge depuis tant d'années a besoin de réponse. Et que je suis prête à tout pour connaître le fin mot de ce cauchemar. Si la fin approche, comme il le dit si bien dans cette lettre, qu'il compte sur moi pour le devancer sur ses plans. Je n'ai toujours eu qu'une seule parole et même si Wade ne veut plus avoir affaire à moi, lui et moi nous n'avons pas fini « d'enquêter ». Qu'il le veuille ou non, il va devoir me supporter. Jusqu'à ce qu'il ne soit plus en danger.
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Présumé coupable [ terminé ]
RomanceHolly/Dylan est une jeune avocate de 28 ans vivant en ermite. Un appel en plein milieu de la nuit va lui faire rouvrir une ancienne enquête enterrée depuis 12 ans. La mort de ses parents et la disparition de sa petite sœur. Elle aurait dû mourir cet...