Les règles du jeu

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Chapitre 1 : les Règles du jeu

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Les débuts furent difficiles. C'était comme entrer dans un autre monde, un univers étrange, presque irréel, peuplé de SUGAR DADDY de tous âges, chacun avec ses propres exigences, ses demandes parfois inattendues, parfois troublantes. Petit à petit, j'apprenais à naviguer dans cet univers. Je m'habituais aux regards, aux rires, aux secrets. Les autres filles étaient polies, voire gentilles, mais je restais sur mes gardes. Dans les couloirs, les chuchotements s'entremêlaient, des rumeurs s'échafaudaient, toujours avec cette même trame : ici, les filles étaient en compétition pour leurs protecteurs. Cette rivalité flottait dans l'air comme un parfum capiteux, dans cette grande maison qui ressemblait à un manoir décadent. C'était un parfum invisible, mais omniprésent, qui semblait s'insinuer dans chaque recoin.

Un jour, la voix de Kylie me sortit brusquement de mes pensées. Cette voix douce et hautaine à la fois, un timbre que j'aurais pu reconnaître entre mille. Elle parlait d'un ton toujours un peu détaché, comme si elle planait au-dessus des autres.

— Kya, ça va ?

Je tournai la tête vers elle et tentai un sourire.

— Oui, Kylie, et toi ?

Elle fit un geste de la main, comme pour chasser la question.

— Si je suis là, c'est pour te dire qu'on ne travaille pas demain, annonça-t-elle, la voix teintée de cette supériorité qui ne la quittait jamais.

Je fronçai les sourcils, surprise.

— Ah bon ? Pourquoi ?

— Grand ménage, dit-elle simplement, avant de tourner les talons sans un mot de plus.

Je la regardai s'éloigner, son allure toujours élégante et contrôlée. Kylie avait cette image de "fille gentille", celle que tout le monde respecte et apprécie. Pourtant, quelque chose en elle me mettait mal à l'aise. Elle était aimée ici, dans cette maison close, respectée même, mais je sentais aussi un murmure de jalousie se faufiler dans les regards, dans les petits gestes. Comme dans tout groupe de filles, il y avait des rivalités, des alliances, et quelques exceptions aux sourires de façade. Je savais que je n'étais pas la seule à rester sur mes gardes.

— Eh, la nouvelle ! lança soudain une voix derrière moi.

Je me retournai brusquement. Une autre fille me fixait, son ton sec et incisif. Elle avait l'air de ceux qui ne perdent jamais une occasion de placer une réplique mordante.

— Moi ? répondis-je, un peu surprise.

Elle leva les yeux au ciel, agacée.

— Non, le singe là-bas, évidemment que c'est toi, ironisa-t-elle.

Je sentis mes sourcils se froncer malgré moi, un brin agacée à mon tour.

— Qu'est-ce que tu veux ? demandai-je, tentant de garder mon calme.

Elle s'approcha, les bras croisés, et me fixa sans sourire.

— La patronne m'a dit de te dire que, dès maintenant, tu fais partie de notre duo.

Je clignai des yeux, légèrement confuse.

— De... ?

— Moi et Samirah, répondit-elle en pointant une fille du doigt, un peu plus loin.

Je hochai la tête, tentant de faire bonne figure.

— D'accord. Moi, c'est Kya. Et toi ?

— Khéira, répliqua-t-elle sans sourire. Je te connais pas trop, mais vu que tu parlais à Kylie, tu dois être comme elle, ajouta-t-elle en levant les yeux, un brin méprisante.

Cette dernière remarque me laissa perplexe. Ici, tout le monde portait un nom d'emprunt, un masque, un personnage soigneusement construit. Cela m'avait paru étrange au début, mais peu à peu, je comprenais que c'était une protection.

— Je ne la connais pas vraiment, dis-je prudemment.

Khéira haussa les épaules avec une indifférence calculée.

— Bref, viens avec moi. On va chercher Samirah, comme ça vous ferez connaissance, dit-elle d'un ton presque hésitant, comme si elle s'ennuyait déjà.

Je hochai la tête, décidée à jouer le jeu.

— D'accord. Je vais me changer.

Elle me dévisagea avec un sourire en coin.

— Oui, c'est une bonne idée.

Je baissai les yeux, réalisant que je portais seulement une fine lingerie en dentelle. Je filai vers ma chambre pour enfiler un jogging noir et attachai mes cheveux en un chignon négligé, avant de la rejoindre.

— C'est bon, on y va, dis-je en revenant vers elle.

Nous partîmes ensemble pour retrouver Samirah, qui, apparemment, faisait des courses. En arrivant devant le centre commercial, nous attendîmes un moment. Je fus vite distraite par une silhouette approchant : une femme au teint clair, vêtue d'un jean déchiré, d'un haut blanc et chaussée de Stan Smith. En la voyant sourire, j'eus l'intuition que c'était elle, Samirah.

— Salut, ça va ? lança-t-elle, son sourire franc éclairant son visage.

Je lui répondis avec un sourire.

— Oui, et toi ?

— Très bien, moi, c'est Samirah.

Nous échangeâmes un sourire complice, et nous nous mîmes aussitôt à charger les courses dans le coffre de la voiture. Quelques minutes plus tard, nous étions en route pour la maison close. Le silence régnait dans la voiture, mais mes pensées bouillonnaient, cherchant à comprendre ce qui se passait vraiment ici.

Après un long moment, je brisai enfin le silence.

— C'est quoi cette histoire de groupe ? La patronne ne m'a rien dit, lâchai-je, un peu sur la défensive.

Samirah eut un léger rire, presque moqueur.

— Elle t'a pas parlé des SUGAR DADDY ?

— Non.

Elle haussa les épaules comme si c'était une évidence.

— C'est simple, ici, on est des filles de luxe, des escortes. Il y a des groupes parce qu'il y a une compétition entre nous pour attirer les meilleurs SUGAR DADDY.

Khéira, qui écoutait en silence, hocha la tête et ajouta :

— À la fin de l'année, on compte les gains de chaque groupe, et le groupe qui rapporte le plus gagne un prix. Franchement, c'est ridicule, mais ça attise les convoitises.

— Samirah ne l'a jamais gagné, c'est pour ça que tout le monde se déchire pour ça. C'est complètement stupide, renchérit Khéira avec une moue dédaigneuse.

Samirah leva les yeux au ciel en soupirant.

— Amen ! Enfin quelqu'un qui comprend... Mais méfie-toi des autres, et d'ailleurs... pourquoi t'es là, toi ?

Leurs regards se posèrent sur moi, scrutant mon visage, attendant que je dévoile enfin les raisons de ma présence ici, dans cet univers où les jeux de pouvoir et de séduction semblaient n'avoir aucune limite.

SUGAR DADDY ET MOTHER Où les histoires vivent. Découvrez maintenant