Chapitre 2 : Encore une journée trop longue | TW

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[TW : Homophobie, Biphobie, Alcool, Violence physique]


Les journées me paraissaient bien trop longues ces derniers temps. Elles se ressemblaient toutes et j'en arrivais même à les oublier. Après tout, la plupart du temps, j'avais du mal à y voir un quelconque intérêt. Puis j'essayais de me rassurer en me disant que ma routine pourrait s'atténuer grâce à la fête de Jack, parce que ce n'était pas mon travail qui me soulagerait.

En arrivant sur les lieux, Caterina ne m'adressa pas le moindre regard ni même le moindre bonjour. J'étais inexistant à ses yeux. Je n'aurais jamais dû lui dire que j'étais bi. Il était évident qu'elle le prendrait mal, mais j'ignorais que ce serait à ce point. J'avais beau entendre les sales histoires de mon entourage, je ne pensais pas que ça m'arriverait. Je pensais pouvoir en être épargné.

Je ne restai pas longtemps aux côtés de Caterina et me rendis aux urgences en espérant pouvoir me rendre utile. Mes tâches n'avaient rien d'extraordinaire, elles étaient toujours les mêmes. Cependant, j'avais l'impression que quelques personnes commençaient à m'épier. Pendant un instant, je crus que mon piercing – que j'avais encore omis d'enlever – en était la raison, mais même sans, ils ne cessaient de me regarder comme si j'avais la peste.

En ayant marre de cette atmosphère pesante, je sortis un instant de l'hôpital pour m'allumer une clope. C'était peut-être le seul avantage que je trouvais à cette mauvaise habitude que j'avais reprise. Je pouvais prétendre avoir plus besoin d'une clope que de prendre l'air. Au moins, j'avais une excuse pour fuir.

Dustin, un infirmier que je croisais de temps à autre, s'approcha de moi. D'habitude, il me parlait à peine et se contentait de me donner juste des ordres sous prétexte qu'il était plus diplômé que moi.

— Hey ! C'est vrai que t'es bi ? me demanda-t-il sans penser un seul instant que sa remarque était déplacée.

Je le dévisageai, le temps de considérer sa question. Visiblement, il était vraiment sérieux et attendait une réponse.

— Tu penses pas que c'est personnel ? Et que ce soit vrai ou faux, qu'est-ce que ça t'apporte ? Est-ce que je viens te voir en te demandant si t'es hétéro ? Non...

Il leva les yeux au ciel, comme si j'exagérais, comme si j'étais celui en tort.

— C'est ce que disent les gens, pas la peine de t'en prendre à moi. Il paraît que tu l'as dit à Caterina... Et ta mère est pas lesbienne ?

— Mais... Tu te rends compte que tu dis juste de la merde et que tu me casses les couilles ?

Il fut surpris de ma réaction, mais il reprit rapidement son sérieux et affichait désormais un air blasé. Il n'allait tout de même pas me faire l'affront d'être vexé, sauf que j'en espérais déjà trop de sa part...

— Je te posais juste une question, pas la peine de s'emporter, me lança-t-il comme un reproche.

— Mais tu te rends pas compte que tu me demandes de faire un coming out ? Tu te rends pas compte de l'importance de tes mots ? l'interrogeai-je, assez furieux.

Je n'attendais plus la moindre réponse de sa part. Je jetai ma cigarette au sol et revins à l'intérieur. Et soudainement, je compris que tout le monde était au courant. Caterina n'avait clairement pas gardé la langue dans sa poche.

Et leurs regards me suivirent les jours suivants. Parfois, j'avais le droit à quelques questions déplacées. Mais jamais je ne leur répondais. Je n'avais pas à leur dire avec qui je couchais, si j'avais trompé mon ex, comment je m'y prenais avec un homme ou encore si j'avais le SIDA.

Le Corbeau et la Colombe - Tome 2Où les histoires vivent. Découvrez maintenant