Chapitre 7

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Arrêté à un nouveau feu rouge à deux cent mètres, je continue d'espionner Mika par le rétroviseur. Il semble perdu, étrange pour une personne qui dit vivre à côté.

Il traverse la rue, tourne à gauche puis reviens sur ces pas. Il continue son chemin, re-traverse la route pour emprunter la rue de droite. Il revient encore sur ces pas et s'arrête.

Amusé, je souris. Le pauvre est totalement perdu. Désespéré, il recherche un panneau, effectue un tour sur lui-même puis un aller et retour. Je décide de faire demi-tour. Ma voiture s'arrête à sa hauteur, pour la seconde fois de la soirée.

J'ouvre la fenêtre.

— « Tu es vraiment sûr d'habiter par ici ? »

Gêné, il baisse les yeux en se grattant la nuque. Il sourit timidement, les yeux toujours rivés au sol.

— « Allez viens, monte. »

Il s'exécute enfin et ouvre la portière. Il s'assoit sur le siège passager, refermant la portière derrière lui.

— « Merci, c'est sympa... » Me dit-il, d'une petite voix à peine audible.

— « Où est-ce que je te dépose ? »

— « South Kensington »

Un ricanement incontrôlable sort de ma bouche.

— « Ah oui, en effet, c'est juste à côté. » Fis-je remarquer.

Il se renfrogne dans son siège, sans un mot. Je l'ai vexé ?

Nous sommes au nord de Londres. Le quartier de Mika est situé au sud, à une vingtaine de kilomètres. Le pauvre aurait mis un temps fou à pied.

Le fait de ne plus l'avoir face à moi me rend plus à l'aise. Le regard fixé sur la route j'en oublie presque le fait qu'il met troublé toute la soirée.

Une chanson de Queen se fait entendre à la radio, je remarque le genoux de Mika bouger au rythme de la musique. J'augmente le son, je sens apparaître un sourire sur son visage.

— « T'aime Queen ? » Me demande-t-il, brisant le silence qui s'est installé depuis quelques minutes.

Je hoche la tête.

— « Qui n'aime pas ? » Répondis-je.

À son tour, il hoche la tête.

— « Tu as raison. J'ai beaucoup étudié la musique de Freddie Mercury lorsque j'avais 14 ans, cet homme est fascinant. Ce groupe a tellement apporté à ma musique. »

— « Pourquoi ? »

— « Queen a été pour moi une manière de comprendre comment faire le lien entre le classique, la pop et le rock, que ce soit dans la voix, la progression harmonique ou la couleur de la musique. Je viens de l'opéra, de la musique classique, et j'ai longtemps cherché une manière de tout canaliser dans la pop. Queen m'a prouvé que c'était possible. »

— « Ta façon de voir les choses est intéressante. Donc si je comprends bien, tu composes ta musique ? »

— « Oui » Me répond-t-il, dans un hochement de tête. « Je compose et j'écris mes textes. »

Je reste sans voix face à cette révélation inattendue. Cet homme n'est pas seulement un chanteur talentueux, il est auteur et compositeur.

— « Ça fait longtemps que tu es dans la musique ? »

— « Assez oui. J'avais sept ans lorsque j'ai composé ma première chanson, elle s'appelait Colère. »

Mes yeux s'écarquillent. Un instant, je détourne les yeux de la route pour m'assurer qu'il ne se moque pas de moi. Non. Il semble sérieux, pas un seul instant il ne se moque de moi.

Le chemin du destin | Tome 1Où les histoires vivent. Découvrez maintenant