Lorsque les rayons du soleil caressent délicatement ma peau, la première réaction de mon cerveau endormi est la surprise. J'ai dormi une partie de la journée et une nuit entière. Décidée à ne pas rester affalée, je me lève et tire mes rideaux. Le jour pointe seulement le bout de son nez. Il ne doit pas être plus de six heures, j'ai le temps d'aller au lycée. Vêtue le plus simplement du monde, je descends silencieusement ces vieux escaliers grinçants. Pour une fois, je hais le bruit qu'ils renvoient. Je vais réveiller ma mère.
— Azélie ?
Flûte... Jouant la carte de l'ignorance, je stoppe tout mouvement et retiens ma respiration. Après quelques secondes, les pas de ma mère s'éloignent et sa porte de chambre claque. Je l'ai échappé belle. Excitée à un point inimaginable, j'attrape une pomme et quitte la maison. Je serai en avance au lycée, mais qu'importe. Chaque endroit sur Terre éloigné de ma mère est un paradis. Le petit mot laissé sur le bar est ma garantie de passer une bonne journée, aussi je prie pour qu'elle le lise avant de s'affoler et de venir me chercher.
Seule avec comme unique compagnie mon subconscient, je déambule dans les rues ternes de ma petite ville. Habiter en altitude est une idée de ma mère. Malgré mon mécontentement initial d'un tel éloignement de la grande ville, je dois avouer que l'air frais emplissant chaque jour mes poumons est d'une pureté délicieuse. Lentement, mes deux boîtes de porcelaine enveloppent chaque minuscule et infime particule d'air comme si celle-ci était la dernière. Au son des gargouillements de mon ventre, je repense à la réservation faite la veille par Sébastien dans mon restaurant préféré. Situé à plus d'une demi-heure d'ici, ce petit coin de paradis sert les meilleurs nems du monde.
❄❄❄
Février est là, les touristes affluents et dans ces moments-là, le village de Notre-Dame de Bellecombe semble reprendre vie. Les nombreuses stations de ski aux alentours permettent à ce village, mort une grande partie de l'année, de reprendre vie l'hiver et tel le phénix, de renaître de ses cendres.
Arrivée à mon arrêt j'attends patiemment mon car. Lorsque celui-ci apparaît dans ma ligne de mire, l'excitation déborde de mon petit corps malade. À moitié vide, je prends place au fond du car. Mes écouteurs enfoncés dans les oreilles, le sourire aux lèvres, je goûte enfin à la liberté. Le paysage défile à une vitesse folle et les flocons s'écrasant contre les vitres ne font qu'accentuer mon petit moment de bonheur. Demain, je serai en vacances et j'ai appris la semaine dernière que ma mère doit s'absenter tout le week-end. Cette opportunité unique me permet d'avoir des perspectives, des projets et cela fait trop longtemps que je n'ai pas pris le temps de réfléchir à ce que je ferai le lendemain. Au fond de moi, une euphorie perdue refait surface. J'ai hâte.
En descendant de mon car, quarante minutes plus tard ce jour-là, j'ai la sensation de devenir une nouvelle personne. En pénétrant l'enceinte de mon lycée tout m'émerveille. Pourtant, je déteste mon établissement perdu dans la ville d'Ugine. Cela fait une semaine que je ne suis pas revenue et le moindre détail m'apparaît comme incroyable. Je détaille chaque élève avec intérêt, chaque couloir avec curiosité. Je suis simplement heureuse de reprendre une vie normale. Ici, les regards ne se font presque plus suppliants. Depuis la révélation de ma maladie, une année scolaire est passée, les gens oublient. Excepté mon « petit-ami » et ses amis... Heureusement ou malheureusement pour moi, ils restent introuvables.Lorsque mon premier cours débute, le silence dans la salle de classe se fait. Comme à mon habitude, je m'installe au troisième rang à côté de la fenêtre. Ni trop au fond, ni trop devant, je passe quasiment inaperçue. Chaque emplacement doit être stratégique, rester discrète, voire invisible. Suivre le cours sans rechigner et ne pas m'intéresser aux autres.
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Le Réveil des Éléments
FantasyComment pouvait-elle s'imaginer, comment pouvait-elle penser que sa vie était basée sur un mensonge, sur une simple et possible erreur médicale ? Pourtant, au plus profond de son âme, quelque chose lui criait que cette vie n'était que la couverture...