Le Réveil des Éléments

La petite marque

Lorsque sonne la fin de mon calvaire, je réalise que tout devient un peu plus supportable avec Léon à mes côtés. Nous sommes plus forts à deux et je regrette de ne pas l'avoir abordé plus tôt. Ce garçon est tout simplement magique.

— Azé ? Tu es de nouveau partie dans ton monde.

Surprise et honteuse de n'avoir pas écouté, je rougis.

— Excuse-moi Léon. Je réfléchissais.

— Heureux que tu sois de retour bablette. Je te disais que mon bus n'allait pas tarder. Je dois y aller.

La journée est officiellement terminée. Je vais rentrer chez moi, reprendre mon ennuyante routine et attendre que les cours reprennent. Malgré ces tristes perspectives, l'idée d'inviter Léon ce week-end me redonne le sourire. Sans perdre une minute, je lui fais part de l'absence inespérée de ma mère.

— C'est cool. Tu pourras être seule et faire ce que bon te semble.

— À vrai dire, je voulais savoir si...

L'interruption importune de ses amis me coupe l'herbe sous le pied. Léon rit avec eux et comme s'il se souvenait enfin de ma présence me refait face.

— Excuse-moi Azélie, je dois vraiment y aller. Mon bus va partir sans moi. Passe de bonnes vacances bablette.

Il part entouré de ses amis. Léon me quitte aussi vite qu'il est apparu ce matin. Comme si le destin refusait de m'accorder une journée de répit, je vois mon car prendre la route sans moi. Je me mets à courir aussi vite que mes jambes me le permettent, en vain. Mon car s'éloigne.

— Mais ce n'est pas vrai !

J'ai probablement crié plus fort que prévu, car de nombreux élèves se mettent à pouffer dans mon dos. Essoufflée, je me penche en avant et pose mes mains sur mes genoux. Mon souffle erratique m'oblige à inhaler ma "Ventoline" heureusement toujours avec moi. Après avoir repris ma respiration, je réfléchis à mes différentes options et une seule me paraît sensée, ma mère. J'attrape mon téléphone au fond de mon sac et compose son numéro.

Une sonnerie...
Allez répond !

Deux sonneries...
Elle me fait la tête.

Trois sonneries...
Je vais devoir rentrer à pied !

Quatre sonneries...
Ugine - Notre-Dame de Bellecombe à pieds...

Cinq sonneries...
Je vais probablement mourir de froid avant d'être arrivée.

Six sonneries...
Une corde, que l'on me procure une corde.

Bonjour, vous êtes bien sûr le répondeur de Garance Mont. Je suis indisponible pour le moment. Veuillez laisser un message après le signal sonore ou rappeler un peu plus tard, merci au revoir.

Bip...

— Maman, c'est Azélie. Je t'appelle parce qu'il se trouve que j'ai manqué mon bus et je suis seule devant mon lycée. Viens me chercher s'il-te-plaît. Je commence à me les geler ici.

Je n'ai plus qu'à prier pour qu'elle ne soit pas trop occupée et pense à vérifier son téléphone. Petit tour sur Google Mapp histoire de me déprimer d'avantage. Je tape lentement Ugine - Notre-Dame de Bellecombe. Les résultats affichés me font presque pleurer. 27 minutes en voiture et 3h38 à pied. À quoi est-ce que je m'attendais, 20 kilomètres de montée séparent mon village de mon lycée. Mes deux boites de porcelaine ne me permettront définitivement pas d'arriver tout en haut. Je dois donc me restreindre à patienter et espérer que ma mère arrive.