Les skis sur l'épaule, je bougonne. Il est bien trop tôt pour me demander un aussi pénible effort physique. Le bout de chemin que je dois parcourir pour atteindre les pistes me paraît encore plus long que dimanche. La ville se réveille doucement et les rayons du soleil caressent ma peau. Mon manque de motivation s'estompe légèrement à la vue des pistes enneigées. Il n'y a, pour sûr, aucun plus beau spectacle que celui-ci. Il a neigé toute la nuit et les arbres sont recouverts d'une fraîche poudre blanche.
En payant mon forfait de ski pour la journée, le prix exorbitant me passe toute envie de rire. Accumulé à ça, le long et pénible téléski central. Ce n'est clairement pas mon jour. Je tente de visualiser le visage souriant de mon ami pour me redonner un peu de motivation. Il m'attend en bas des pistes, nous allons passer une journée ensemble à l'extérieur. De plus, mon élan de courage de la veille m'a permis d'être ici, de skier. Pourtant, cela ne parvient pas à me revigorer entièrement. Léon sera tout sauf joyeux et mon speech n'aidera en rien son humeur déjà médiocre. Mais qu'importe. Je dois lui dire ce que je pense même si cela ne lui plait pas.
❄❄❄
Me voilà sur ce petit Transvaal mais cette fois-ci, seule. Léon patiente de l'autre côté, au pied du Mont-Rond. À l'approche de l'arrivée, je le cherche des yeux et finis par l'apercevoir. Il se tient droit, les skis à la main et semble perdu dans ses pensées. Qu'il ne s'inquiète pas, j'arrive percer sa bulle de réflexion.
Comme prévu, je fonce sur lui et le percute brutalement. Nous manquons tous les deux de tomber et Léon s'apprête à crier de mécontentement lorsqu'il pose ses yeux sur moi. Hilare, je lui tapote l'épaule et il éclate de rire à son tour. Il en fallait peu pour effacer de son visage cet air morose.
— Allez, on y va !
Il hoche la tête et nous prenons tous les deux le grand télésiège. Cette fois-ci, nous jouons des coudes pour pouvoir nous asseoir côte à côte. L'ambiance légère qui plane entre nous risque à tout moment de voler en éclats, mais aucun de nous deux n'est prêt à y mettre un terme.
Contrairement à dimanche, la station est moins bondée et Léon insiste donc pour aller au point culminant, où la neige y est, apparemment, nettement plus fraîche. Je me vois donc dans l'obligation de céder.
Après trois pistes toutes plus agréables les unes que les autres, nous voilà sur le télésiège qui nous conduira au sommet de la station. Cet ancêtre avance si lentement que chaque ralentissement nous oblige à nous arrêter.
— J'espère sincèrement que cela vaut le coup car étant donné notre vitesse, mes doigts de pied auront gelé d'ici notre arrivée.
— Si nous arrivons un jour...
Je pouffe de rire et me tourne vers mon ami qui, lui, ne rit pas du tout. Je fronce les sourcils et lui donne un coup de coude.
— Qu'est-ce qu'il y a ?
— Je n'osais pas te le dire mais cela fait plusieurs jours que la station envisage de fermer ce télésiège. Il y a eu un accident. Un des sièges s'est décroché. La nuit précédant le drame il avait neigé et gelé ce qui avait fragilisé l'accroche au câble. Et c'est bien connu, une accroche gelée ne peut pas dégeler si le télésiège avance lentement... Alors ça a tout simplement lâché.
Le cœur palpitant, je ris nerveusement.
— N'importe quoi. Ça se serait su s'il y avait eu des blessés après un tel accident.
Le télésiège s'arrête alors au milieu de la pente pour la quatrième fois et mes mains deviennent moites. Je lève les yeux sur le câble et fixe l'accroche. Tout semble normal.
Le grincement produit au même instant par notre siège me fait pâlir.
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Le Réveil des Éléments
FantasyComment pouvait-elle s'imaginer, comment pouvait-elle penser que sa vie était basée sur un mensonge, sur une simple et possible erreur médicale ? Pourtant, au plus profond de son âme, quelque chose lui criait que cette vie n'était que la couverture...