Chambre 114

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Le cœur au bord des lèvres, je ravale mes larmes. Alors que tout s'enchaîne dans ma tête, je coupe la parole à la mère de mon ami et lui demande sans aucune politesse le numéro de chambre de Léon.

Le visage marqué par le stress, elle me répond simplement que la pièce est interdite d'accès pour le moment. Excédée par cette réponse qui ne rentre pas dans mes critères, je me retourne rapidement et me mets à courir. Je me précipite à la réception et ordonne qu'on me communique le numéro de chambre de celui qui souffre seul. L'infirmière, avec un ton faussement désolé, m'apprend que les visites ne sont pas acceptées pour l'instant. Je réitère alors ma question avec, cette fois-ci, plus de conviction. Elle me doit ce foutu numéro ! Qui est-elle pour isoler un malade ?

— Vous n'êtes même pas de la famille mademoiselle, je ne vous dois rien, je suis désolée mais vous allez devoir patienter.

Comprenant que je ne tirerai rien de cette fausse blonde, je prends la décision de négocier une nouvelle fois avec Madame Pouvier.

Me voyant approcher, cette dernière -alors en pleine discussion avec ma mère- se lève et marche dans ma direction.

— Je ne demande pas à le voir, je veux juste le numéro de la chambre.

— Je suis désolée, je ne peux pas te le donner. Tu t'y rendrais immédiatement et je ne veux prendre aucun risque quant au rétablissement de mon fils. Si moi, sa mère, peux patienter, tu le peux aussi.

— Je vous en supplie, je dois me rapprocher de lui, sentir sa présence. Il a besoin de moi ! Vous ne pouvez pas comprendre et je ne peux pas vous expliquer le pourquoi du comment, mais notre lien est fort !

— Écoute Azélie tu sembles être une jeune fille adorable et intelligente et je ne doute pas de votre connexion, mais je ne me répéterai pas. Viens plutôt me rejoindre dans la salle d'attente. Apprendre à te connaître me changera les idées.

Vexée qu'elle me considère comme une simple distraction, je passe à la vitesse suivante.

— Avec tout le respect que je vous dois madame, si vous connaissiez si bien votre fils, vous me permettriez de connaître au moins le numéro de sa chambre. Après tout, c'est moi qu'il a contacté après son accident, pas vous. Il me fait confiance tandis que vous...

Ses grands yeux gris me fixent ahuris. Touchée en plein cœur et l'égo meurtri, tout son être se tend. Elle déglutit difficilement et même si sa détresse me peine, je n'ai pas le temps de reconsidérer mes mots. La chose est dite et aucun retour en arrière n'est possible, c'est à moi de l'assumer.

Chambre 114.

Son murmure est si faible que je crois avoir rêvé. Mais, à bien observer sa mine déconfite et résignée, je sais que j'ai bien entendu.

N'ayant plus une minute à perdre, je lui tourne le dos et cours. Le corps encore faible de ma récente crise, je trébuche à plusieurs reprises et manque de m'écrouler contre un mur.

Mon souffle est erratique et chaque respiration me donne l'impression d'avaler un million de couteaux. Pourtant, il est hors de question de rebrousser chemin. Mon ami a besoin de moi comme j'ai besoin de lui.

Je m'arrête devant un plan de l'hôpital et cherche l'étage de sa chambre. Le troisième... Mes poumons me brûlent et mon souffle se fait court. Je vais devoir prendre l'ascenseur si je veux arriver là-haut entière. Dans l'éventualité où mes deux boites de porcelaine me lâcheraient, je ne lui serais plus d'aucune aide. Je m'empresse de rejoindre l'élévateur qui, malheureusement, est bondé et se referme sous mon nez. J'appuie nerveusement sur tous les boutons me faisant face.

Le Réveil des ÉlémentsOù les histoires vivent. Découvrez maintenant