prologue: Les Voix

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Comme promis, voici la fic qui a reçu le plus de vote.

Je tiens a vous prévenir, il n'aura pas ou très peu de nouveau chapitre pendant les 2 prochain mois car j'entre en blocus

Merci beaucoup de me suivre ^^

Le silence.

Un mot si simple, si absolu, l'absence totale de son...

On dit que le silence total est un mythe, quelque chose d'inconcevable.

Quoi que l'on fasse, où que l'on soit, il y aurait toujours du son, un écho de vie qui perturberait le calme : le bruissement de l'herbe balayée par le vent, un plancher qui grince, le cri d'un animal au loin...

Le silence absolu était impossible, et même s'il existait une magie ou une technologie capable d'enlever tous les sons de la Terre... il y aurait toujours une voix que rien ne pourrait arrêter, pas même le manque d'oxygène ou la surdité...

Nos pensées.

Dans le silence absolu, nos pensées devenaient assourdissantes, hurlant dans notre esprit, comme une voix parlant constamment à notre oreille...

Quelques fois, Harry se demandait si les sourds de naissance avaient cette petite voix eux aussi.

Il supposait qu'ils étaient dans le même cas que lui mais n'en avait jamais rencontré pour le confirmer.

Son regard se perdit sur l'horizon, l'herbe pliant sous le vent sans un bruit, allongé dans une petite prairie à quelques kilomètres de la maison des Dursley.

Il aimait venir ici. L'endroit était isolé, la maison la plus proche à plus de deux kilomètres... cela rendait donc cet endroit le plus silencieux auquel il pouvait aspirer.

Il prit une grande goulée d'air pur, un léger sourire aux lèvres.

Le silence était reposant...

Était-ce étrange pour un sourd d'aimer le silence ?

Probablement.

Mais les autres sourds n'avaient sans doute pas les mêmes problèmes que lui...

L'enfant laissa échapper un soupir de bien-être, fermant les yeux et se délectant du calme de sa prairie, laissant la sensation douce du soleil sur sa peau et l'odeur de l'herbe sèche l'envahir.

Le silence était total ainsi, le silence absolu soi-disant impossible... il laissa sa conscience glisser au fond de lui, son esprit vide et libéré de tout bruit parasite.

« Il est là ! Je vais lui faire sa fête pour m'avoir fait venir jusqu'ici ! »

Il gémit, frustré, émergeant des tréfonds de son subconscient au doux « son » de la voix de son cousin.

À contre-cœur, le garçon se dépêcha de se lever pour fuir vers la plaine de jeu avant de passer les barrières en un saut, sachant que son gros cousin ne pourrait pas l'enjamber et se dépêcha de regagner la banlieue.

Petit à petit, les cris envahirent à nouveaux son esprit, saturant sa tête et lui donnant presque immédiatement une migraine épouvantable.

Il courut jusqu'au numéro 4, essayant de faire abstraction des nombreuses voix qui lui agressaient le cerveau et pénétra dans la maison.

« Enfin ! C'est à cette heure qu'il rentre ?! Ce petit monstre... il va voir ! »

Harry sentit le plancher vibrer sous les pas de sa baleine d'oncle alors qu'il pénétrait dans le hall.

Son parent lui cracha une litanie d'insultes, ses lèvres remuant furieusement sans qu'aucun mot n'atteigne les oreilles de son neveu.

Pas qu'il eut besoin de les entendre pour comprendre cependant.

Enfin, le cochon arrêta de s'égosiller inutilement et le jeta sans douceur dans son placard, l'enfermant à double tour.

Poussant un long soupir, le garçon de presque onze ans s'allongea sur son fin matelas, les yeux rivés sur les marches au plafond.

Harry se demanda si quelqu'un remarquerait un jour qu'il était sourd, mais après presque onze ans il ne fallait pas trop espérer...

Personne ne l'avait remarqué jusqu'ici, pas même ses professeurs ou miss Figg. Remarque... personne ne lui avait jamais posé la question non plus...

Tout ça grâce à elles.

Les voix.

Son don.

D'aussi loin qu'il se souvienne, elles avaient toujours été là, remplissant le silence, comblant sa surdité.

Au début, elles étaient tellement nombreuses qu'il n'arrivait pas à les comprendre.

C'était dur, comme si votre tête allait exploser à tout instant, comme si vous passiez chaque seconde de votre vie dans un hall bondé plein d'écho.

En grandissant, il avait réussi à les ignorer, mettant de côté le brouhaha incessant pour qu'il ne devienne plus qu'un bruit de fond parfaitement agaçant.

A cinq ans, il arrivait à les rendre insignifiantes, se reculant au plus profond de son esprit, les faisaient ainsi taire temporairement.

C'était difficile, il devait beaucoup se concentrer. Parfois il n'entendait même plus le monde autour de lui, c'était le vide... simple, et relaxant.

Elles devinrent enfin supportables, mais redevenaient malheureusement présentes dès qu'il émergeait.

Un jour, il avait tenté de les comprendre, se concentrant sur une seule d'entre elles, curieux.

La première fut celle de son oncle, et ses paroles ne furent pas très agréables.

Puis, peu à peu, il les laissa fuser, pouvant percevoir celles proches de lui plus clairement, et avec de la concentration, celles les plus éloignées.

Au milieu de cette cacophonie, il parvenait à percevoir son nom quand il était prononcé, à entendre les cris de détresse, hurlant leur peine...

Avec le temps, il finit par comprendre ce qu'elles étaient : des pensées.

Il ne savait pas comment c'était possible, peut-être était-ce en lien avec sa « monstruosité » comme l'appelait son oncle.

Mais c'était néanmoins réel, il lisait les pensées.

Cette découverte l'avait emballé et terrifié à la fois.

Il se sentait unique, puissant ! Le petit garçon sourd pouvait entendre les pensées, qui ne serait pas excité à sa place ? Surtout quand ça lui permettait de combler son handicap.

Mais il avait vite déchanté quand il avait dû supporter les pensées de sa « famille ».

Tous les jours, entendre leur haine...

Une pensée était sans filtre, une pensée ne pouvait pas mentir.

Harry avait alors découvert l'hypocrisie des grandes personnes, leur pitié et leur fausseté...

Il dut faire face au mensonge bien trop tôt, bien trop souvent.

Il n'arriva plus à faire confiance.

Vraiment, lire dans les pensées n'était pas un don, c'était une malédiction.

La sienne.

Les voix de l'âmeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant