#18 Alie (inédit)

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C'est le jour J. On est vendredi ! Le jour que je redoute encore plus depuis hier. Et maintenant, que je suis en train de finaliser tous les préparatifs pour ce soir, je le crains toujours plus. L'appel de Sven hier n'a fait qu'augmenter la pression dans mes veines. Moi qui avais bêtement cru que sa demande n'était pas définitive, ou tout simplement un de mes nombreux rêves. Mais non, tout est bien réel maintenant que je pose ma pancarte où est inscrit : "Fermeture exceptionnelle ce vendredi soir pour réception privée". Le service du midi n'a pas encore commencé mais j'ai déjà la boule au ventre pour ce soir. Et puis, impossible pour moi de jouer à la femme invisible et de me cacher derrière mon bar toute la soirée, avec les deux danses que je suis censée honorer, c'est cuit. C'est sûr et certain qu'il va me voir et me regarder. Et je suis même persuadée qu'il va en profiter pour rager après moi. Il était peut-être saoul l'autre nuit, mais je sais qu'il n'a pas apprécié que je le traite comme un vulgaire coup d'un soir. Monsieur ne doit pas avoir l'habitude. Mais comment aurai-je pu lui dire, ou même lui expliquer, la douleur que j'ai ressenti après ça. Dans ses bras, je suis si bien, comme si j'avais enfin trouvé ma place. Et savoir que tout est différent pour lui me fait mal. Mais là, j'ai pris les devants et l'ai privé de garder le contrôle sur moi. En lui coupant l'herbe sous le pied, j'ai touché son égo de mâle, et je pense que c'est avant tout pour ça qu'il m'en veut. Si seulement je n'étais pas naïvement tombée amoureuse de lui à Camden, tout aurait été plus simple pour nous deux.

Une fois le service du midi terminé, je dois descendre tout le matériel au sous-sol pour ce soir. Faire les sushis en haut ne sera pas pratique et une perte de temps phénoménalement inutile. Diego est déjà dans la boîte en train d'installer un deuxième bar lorsque j'arrive les bras chargés de légumes. Le bar habituel servira pour la préparation des sushis car il y a des frigo intégrés, et le seconde sera destiné aux boissons. Il me reste à faire cuire des kilos monstres de riz et couper des caisses de poissons. J'ai demandé à mes acolytes de venir plus tôt pour m'aider à tout bien préparé. Il n'y aura pas de place pour l'erreur d'organisation ou l'imprévu. Vu ce qu'on me paie, tout doit être parfait. Je dois aussi installer une urne à l'entrée du club. Sven me l'a faite livrer ce matin car il tenait à faire sa boîte à chansons comme à Camden. Tous les invités écriront une chanson de leur choix, qu'ils devront déposer dans l'urne, et que Diego passera au hasard dans la soirée. Je trouve ça cool en fait. Plus cool que l'idée de devoir faire face à Jake ce soir. Pourvu que sa Barbie de l'autre soir ne soit pas là. Sinon je crois bien qu'elle finira par avoir les deux baffes que je lui ai promis dans mes pensées.

Non ! Il faut que j'arrête de penser à elle, à lui. Il fait ce qu'il veut. J'ai été son plan cul, il en a un nouveau maintenant. Ça ne devrait pas m'atteindre, jamais. Alors pourquoi j'ai envie de hurler ? Pourquoi j'ai envie de l'étriper ? Pourquoi j'ai envie de pleurer ?

Et merde ! Voilà que je me fatigue toute seule !

Je reprends mes préparations en demandant à Diego de mettre de la musique, ça m'évitera de trop réfléchir.

***

Vers dix neuf heures, les premières personnes commencent à arriver. Plus ou moins cent cinquante personnes sont attendues ce soir. Tray et Luna sont prêts au bar. Terry, Jana et moi aussi sommes parées pour débuter à remplir nos plateaux. Les deux sœurs sont toutes excitées à l'idée de passer la soirée en bas pour changer. Elles n'ont toujours travaillé qu'en haut et sont ravies de profiter d'un bonne soirée tout en travaillant.

Alors que je suis en train de terminer quelques makis pour les installer avec les spring rolls de Jana, un beau gosse à la peau mate viens vers moi. Le sourire placardé sur le visage, comme toujours.

- Hey ! comment va la déesse du tango ? lance-t-il joyeux.

- Je vais bien merci. Et toi ? Remis de ta belle cuite ? J'espère que t'as changé de potes pour la soirée, sinon, tu es condamné à attendre un taxi ou à ne pas boire.

- Moi ? Pas boire un vendredi soir ? Quelle tristesse, se moque-t-il en me faisant rire. J'espère que t'as révisé ta salsa beauté parce que moi je pète le feu !

- T'en fais pas pour moi Eddy, dis-je en souriant. Ma salsa va parfaitement bien.

Il me regarde l'air charmeur comme à son habitude. Décidément, celui-là, rien ne l'arrête.

- Tiens, dit-il en me tendant une grande boîte allongée.

- C'est quoi ? dis-je choquée car je pensais que c'était un cadeau pour Jake.

- Bien, étant donné que je paye 3000 dollars pour danser avec toi, il est hors de question que tu restes en jean ma belle.

Je pouffe de rire en coupant le reste de mes makis. Il a le don de détendre l'atmosphère celui-là. Je sens bien les regards de Terry et Jana qui doivent sûrement se demander s'il y a quelque chose entre nous deux. Pourtant, il n'y a absolument rien. Il pose la boîte sur le comptoir voyant que j'ai les mains prises.

- Et mets ta robe maintenant ! annonce-t-il en s'éloignant de moi ensuite. Faut que tu sois prête quand je l'aurai décidé !

- Et puis quoi encore ?! dis-je en râlant faussement, avec le sourire.

- Il n'est franchement pas discret pour te brancher celui-là, lance Terry.

- C'est sa façon d'être, je pense qu'il branche toutes les filles à qui il adresse la parole. Il y a des mecs comme ça, qui ne reculent devant rien et qui n'aiment pas l'échec-ris-je.

- Si tu le dis, ajoute-t-elle, perplexe. Combien de sashimis tu veux en tout ? poursuit-elle.

- Pour commencer, cent au saumon, cent au thon, et cent crevettes. On verra à l'allure où ça part et on avisera.

- Ca roule !

- Jana, pour les spring rolls, encore soixante-douze pièces et ça ira, dis-je en m'adressant à la soeur de Terry. Tu pourras passer aux californias ensuite.

- Ok boss !

La pression monte à grande vitesse et je n'ai pas hâte de voir ce cher Monsieur Adams passer la porte de mon club. Certes, cette soirée va me ramener une belle somme, mais quand je vois dans quel état ça me met, je me dis qu'une soirée classique bien agitée m'aurait été moins difficile à supporter. Enfin, un deal est un deal, et quand je dis, je fais. Je ne suis pas le genre de personne à donner sa parole à tout bout de champs sans jamais rien respecter. Je ne fais pas de promesses, jamais, mais ma parole doit suffire. Espérons que tout se passe bien pour tout le monde et que je ne fasse pas une syncope sur le bar quand Jake arrivera.

Aime-moi [Tome 2 Supplie-moi]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant