Chapitre I

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Une brise légère entre par la fenêtre grande ouverte de la cuisine. Celle-ci offre une vue splendide sur le jardin arrière de la maison, délimité par un simple grillage haut d'un demi mètre environ. Plus loin on aperçoit l'orée de la forêt, précédée par des terres en friches dont personne n'a jamais fait mine de vouloir en reprendre l'exploitation.En quelque pas je traverse la cuisine et fonce sur la machine à café, amie fidèle des matins difficiles. Sans elle je ne pourrais jamais survivre à toute ces courtes nuits que je passe depuis le début de mon adolescence, conséquences logiques de longues et pesantes insomnies .

Une fois le café mis en place dans le filtre, ainsi que le réservoir d'eau rempli au quart, je ferme le tout et lance la machine. L'habituel ronron se fait entendre et me berce, manquant de me faire me rendormir sur place. Un exploit que ce serait, dormir debout. Je me demande si quelqu'un à déjà essayer...


- Je devrais peut être installer un tapis bien épais dans la cuisine, me dis-je, avant de réaliser que je me laisse encore envahir par des pensées absurdes.


Pour ne pas risquer l'endormissement je me penche sur l'évier adjacent à la cafetière et fais couler l'eau, froide. Sans me laisser le temps d'hésiter je plonge la tête sous le jet d'eau. Celui-ci me frappe le visage de plein fouet et un peu de liquide entre dans mon nez et mes yeux. Je me redresse brusquement en toussant et crachant, parfaitement réveillée cette fois-ci.

« -Qu'est ce que tu fais ?!me lance brusquement ma mère qui vient d'entrer dans la cuisine.Elle lâche un un baîllement sonore tout en contemplant mon drôle de manège avec un air réprobateur.

-J'essaie juste de me réveiller, je réponds laconiquement.

-Franchement, tu pourrais tenter des méthodes moins brutales, ou tout simplement attendre le café... Tues vraiment...

-Maman, ce n'est pas le moment »


J'ai conscience que lui parler ainsi n'est pas une solution mais je n'ai vraiment pas envie de recommencer l'éternel débat sur mes problèmes de sommeil, surtout pas ce matin. La nuit que je viens de passer est l'une des pires depuis bien longtemps et ma mère semble soudain s'en rendre compte. Elle me murmure qu'elle est désolée et va s'asseoir à la table de la salle à manger sans rien ajouter, après avoir attraper du beurre et du jus d'orange dans le réfrigérateur.

Pendant ce temps, ce que je considère comme le saint graal du moment continue son impitoyable besogne,traitant aussi durement que possible les pauvres grains de café sans défense. Sachant que la boisson chaude sera bientôt prête, je reste contempler le jardin qui s'offre face moi. Le gazon fleuri à beaucoup donné de lui cette année, se répandant même en dehors des parcelles où il était initialement prévu. Il empreint d'un aspect un peu plus sauvage et naturel le jardin tenu avec tant de soin par mon père et ma mère conjointement.

Je sursaute en remarquant une ombre étrange à l'orée de la forêt, alors que je me demande ce que ça peut bien être, la chose informe tourne sur elle même pour se retrouver face à moi. Je ne sais pourtant pas exactement si il y a un devant ou un derrière à cette créature car elle ne possède aucun signe distinctif. Pas de visage, pas de membre, juste une forme flou et filiforme ressemblant a un gaz en suspension. Fascinée parla beauté de la chose, je reste la fixer pendant ce qui me semble une éternité.


Ce moment de pur magie aurait pu durer bien plus longtemps sans l'intervention de ma mère, qui vient l'interrompre en posant brutalement une de ses mains osseuses et dure sur mon épaule droite. Aussitôt je perds ma concentration, et l'ombre semble s'effacer comme sous l'effet d'une brosse de tableau à craie. C'est à ce moment là que je prend conscience que je tremble.J'ignore quand cela a commencé mais ça ne fait qu'ajouter de la matière à la confusion qui règne déjà dans mon esprit.

RequiemOù les histoires vivent. Découvrez maintenant