Chapitre 9 : « Selected player »

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Un éclair de lumière parvient à me faire émerger de mon sommeil. J'élève mes bras par-dessus ma tête pour étirer mes muscles et une couverture chute à mes pieds lorsque mon corps quitte la surface en lin.

Ruben, à ma droite, est assis sur le canapé avec les jambes posées sur la table de salon et la tête posée sur le rebord. J'hésite longuement à prendre une photo de sa tronche, il n'est pas très beau avec sa bouche grande ouverte et le filet de bave qui coule de celle-ci.

J'abandonne l'idée, et tourne la tête vers Grenadine, mais à ma gauche, la place est vide.

Je chope mon téléphone qui était enfoncé dans le canapé, sous mes fesses, afin d'observer l'heure. Il indique neuve heures et vingt minutes.

Mon entraînement est prévu dans une demi-heure. J'ai à peine cinq minutes pour profiter de ma matinée avant l'effort physique.

Un détail me dérange. Rien que pour observer l'heure, une multitude de messages ne cessent d'apparaître sur mon écran. Les identifications, et les messages arrivent en masse. C'est horrible ! Il y a, principalement, des messages privés de Twitter, Instagram, Messenger... En un coup d'œil, je m'aperçois que la plupart des messages sont haineux, sans but réel, tandis que la minorité sont des messages encourageants.

Les messageries sont pleines à craquer, plus d'une trentaine de messages me sont envoyés par minute. Quel horreur ! Les notifications n'arrêtent pas de surgir sur le haut de mon écran. Prise d'une pulsion, je choisis de désactiver tous mes comptes. Plus d'Instagram, plus de Twitter, plus de Facebook, plus de Messenger. Plus rien.

C'est une bonne chose de faite.

Je me lève du canapé et un odeur de crêpe règne dans la pièce, qui m'attire presque immédiatement à la cuisine. Dans celle-ci se trouve mon amie qui prépare des gaufres avec une petite musique en fond.

Je m'approche discrètement de l'assiette qui contient plusieurs gaufres fumantes et essaye d'en attraper une. La tape de Grenadine sur ma main me fait faire machine arrière.

— N'y touche pas ! On mangera ça toute à l'heure, tous ensemble.

— Je ne peux pas passer la matinée ici, Grenad'.. Il faut que je file..

Elle souffle et lève les yeux au ciel en signe d'agacement.

— Bon.. Vas-y ! Prends ta gaufre et vas te préparer !

Je vois qu'elle n'est pas contente et c'est pour cette raison que je m'approche d'elle pour lui claquer un bisous sur la joue, en la remerciant.

Tout en mangeant ma gaufre, je récupère mon sac à main ainsi que mon écharpe. Je clame une dernière salutation à voix haute et quitte la maison de mon amie.

Mon oncle est chargé d'entraîner un petit groupe de jeunes ayant entre douze et quatorze ans. Il n'entraîne que les garçons, son ami s'occupe de l'équipe féminine. Le niveau du groupe, pour leur âge, est assez bon, même si ils peuvent considérablement augmenter leurs techniques avec un peu plus de concentration.

Les terrains sur lesquels ils s'exercent sont relativement en bon état. Malheureusement, quelques crevasses et zones asséchées s'y trouvent, mais en faisant attention, on peut y jouer.

Gonthier, mon oncle, se trouve sur la ligne de délimitation du terrain, et scrute attentivement les jeunes qui s'échauffent.

Cela fait trois ans que Gonthier m'appelle pour demander ma présence, ici, chaque mardi midi. Il me veut pour arbitrer ses matchs. Certes, ce sont des petits matchs, pas aussi impressionnant et techniques que celui d'hier mais l'ambiance est agréable, sans prise de tête.

J'examine attentivement l'échauffement poussé du groupe tout en marchant pour arriver aux côtés de mon oncle.

— J'ai raccourci la durée du match. Il ne dura que trente minutes. Pause à quinze minutes, cinq minutes de repos et on reprend pour la deuxième période.

J'acquiesce simplement. Les matchs habituels durent dans les alentours des quatre-vingt dix minutes. Le fait qu'il soit raccourci ne me dérange pas, mais cela m'intrigue. Connaissant mon oncle, jamais il ne ferait cela sans raison.

— Pourquoi écourter le match ?, je lui pose curieusement.

— L'équipe a été sélectionnée pour un tournoi départemental. J'évite de fatiguer les joueurs, m'annonce t-il.

J'oriente ma tête en sa direction et essaye de trouver ses yeux, mais sans succès. Il se concentre pleinement sur l'entraînement.

— Mais c'est absolument génial !

— Nous n'avons qu'été sélectionné, Alaïs.

Il ne me regarde toujours pas. Mon oncle a toujours prêté une importante attention à son travail. Il entraîne les joueurs et les perfectionnes ce qui fait de lui un entraîneur hors-pair. C'est un homme bon, qui fait tout pour que son équipe apprenne et aille loin. Je l'aime énormément pour cette partie de lui.

Un coup de sifflet résonne près de mes oreilles et me rappelle sur Terre.

— Je veux deux groupes ! Un avec chasuble et un autre sans, enseigne t-il.

Le souffle court, mes jambes me guident au bord du terrain pour boire quelques gorgées d'eau.

Le match est terminé. Même si sont de très jeunes joueurs qui sont sur le terrain, ce n'est pas pour autant que le match est lent ou ennuyeux. Bien au contraire ! Ça court de partout.

— Mademoiselle Corzet !, cri une voix qui me semble familière.

Je me retourne vers la provenance de cette voix et un vieille homme, bien habillé et portant des lunettes noirs apparaît dans mon champ de vision tandis qu'une vague surprise m'assaille.

— Monsieur Dume ? Que faites-vous là ? Je l'interroge.

— Je m'informe sur les nouvelles recrues, dit-il en me serrant la main.

Mon pouls accélère et mes yeux s'écarquillent. Sa phrase... a-t-elle un double sens que je ne comprends pas ? C'est impossible après l'énorme bourde d'hier.

— Suite à l'observation d'hier, j'ai eu le plaisir de constater que vous étiez dotée de capacités incroyables. Des capacités physiques mais également mentales. Votre endurance, votre patience mais surtout votre justesse me plait. Et le match de votre oncle m'a définitivement décidé. Je vous engage en tant qu'arbitre principale au sein de l'équipe du Paris Saint-Germain. Un contrat d'un an vous intéresserait-il ?

Pardon ? Un contrat ? Un an ? Je cligne plusieurs fois des yeux et m'apprête à me pincer le bras pour m'assurer que ce n'est pas un rêve.

— Bien sûr ! J'accepte !

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