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Chapitre 2

-Eros, t'es vraiment chiant en ce moment, me dit Fabien assis sur un banc à côté de moi, tu passes moins de temps avec nous et tu vas tous les deux jours chez cette vielle cloque pour apprendre à jouer du piano !

-Tu peux pas comprendre.

-Bien sûr qu'il comprend pas, ricane Isabelle en passant ses bras derrière nos épaules nous faisant sursauter, il est autant mélomane qu'un lapin nain.

-Un lapin nain est plus mélomane, je rajoute en faisant une bise sur la joue de la rousse, comment tu vas ?

-Super ! Et encore plus depuis que je sais que je vais pouvoir t'écouter faire du piano !

-Comment ça ? Nous demandons en chœur avec Fabien.

Elle comptait venir avec moi chez le vieux ?

-Suivez-moi.

Elle se lève et nous la regardons bizarrement. Puis d'un geste commun, nous nous levons et la suivons. Ce qui est bien avec Isabelle, c'est qu'elle met de la bonne humeur dans nos vies.

Nous arrivons près de la vieille gare, vers le passage sous terrain pour aller de l'autre côté de notre quartier. Mais avant de rentrer dans le tunnel, à l'extérieur de la gare, se trouvait un piano.

-Mais qu'est ce qu'un piano fait là ? Demande Fabien les bras ballants.

-La mairie a enfin accepté le projet "culture dans nos rues", et ont installé un piano dans chaque quartier de nos trois petites villes.

C'est vrai qu'en ce moment on voyait beaucoup d'affiches pour ce projets sur nos murs. Je n'aurais jamais pensé qu'avec leur argent, ils achèteraient pour nous des instruments de musique et les placeraient dehors. Encore plus dans notre quartier... Bon après comme il se situe juste à côté de la gare, c'est déjà plus compréhensible.

-Allé, Eros, tu nous joues un petit morceau ? Me demande Isa les yeux brillant.

Je regarde autour de moi. Ce n'est pas que je me cache, ou que je n'assume pas le fait d'en jouer, non. Je n'en ai juste jamais joué en publique.

Je me tourne vers Fabien, espérant trouver son soutien. A la place, il me sourit de toutes ses dents et croise les bras.

-Ça sera l'occasion de me faire découvrir ces musiques que tu aimes tant.

Vaincu, je m'assois sur le siège.

-Je ne joue pas si bien que ça, je tente de m'échapper.

-En six mois, j'espère que ce vieux t'as au moins appris quelque chose d'autre que comment utiliser un plumeau !

C'est vrai qu'en plus de jouer, je suis devenu maniaque -enfin selon mes amis- et ne supporte plus la saleté.

-Vas y ! S'exclame le châtain en s'adossant au mur.

Je pose mes mains sur le clavier, et commence à jouer. Je vois les gens passer autour de moi, parfois s'arrêter un moment et reprendre leur chemin, d'autres ne s'attardant pas sur moi. Je distingue une mère qui essaie de traîner son fils à suite. D'après ce que je vois, ils rentrent des courses, mais le petit garçon ne veut pas bouger.

-Laisse-moi écouter ! Rechigne le gamin en tirant sur la mère de sa main.

La mère finit par céder en soupirant et les deux restent jusqu'à la fin.

-On peut y aller maintenant ? Demande la mère en soupirant.

Je n'entends pas la suite, par ce qu'Isabelle passe devant moi et m'applaudit.

-J'ai adoré !

-Je reconnais que c'était bien, dit Fabien en souriant.

Je décide de continuer à jouer et Fabien qui commençait à s'ennuyer fini par partir, suivi d'Isabelle.

A la fin de l'un des morceaux, le petit garçon qui s'était arrêté avec sa mère saute sur le siège et se tient debout juste à côté de moi.

-Apprends-moi à jouer ! Il s'exclame les yeux pétillant.

Je regarde autour, à la recherche de sa mère. Mais le gamin était tout seul. Lisant dans mes pensées, le petit garçon s'assoit à coté de moi répond à ma question en pointant du doigt l'immeuble derrière la gare.

-Comme on habite juste là, maman a bien voulu que je reste écouter. Mais je dois rentrer avant l'heure du goûter.

-Ah.

Il reste assis à me regarder.

-Alors ?

-Alors quoi ?

-Tu veux bien m'apprendre à jouer comme toi ?

-Je ne suis pas prof de piano.

-Mais tu joues bien.

Il pose ses petites mains sur les touches et je remarque le contraste entre lui et le vieux. Il commence à appuyer sur plusieurs notes faisant des dissonances horribles.

-Arrête, arrête, arrête ! Je m'exclame en secouant mes mains devant lui, tu n'entends pas que c'est moche ?

-C'est moche ? Demande le petit en s'arrêtant.

-Imagine que le piano soit une personne, et qu'il te parle, j'explique en posant mes doigts sur plusieurs notes créant un bruit immonde, là il crie.

-C'est le même son qu'avec moi.

-Et là, il parle, je continu en posant cette fois mes doigts sur d'autres touches.

-C'est plus jolie comme ça.

Je joue une petite mélodie et m'arrête.

-Il chante ? Demande le petit brun en regardant mes mains.

-Si tu veux.

-Et il faisait quoi tout à l'heure, quand tu jouais tout seul ?

Je réfléchis un instant et me vient une illumination.

-Il dansait ! Je m'exclame.

Il relève la tête, des étoiles pleins les yeux.

-Moi aussi je voulais danser quand tu jouais.

-C'est le but.

C'est ainsi que je commençais à lui donner quelques notions de base sur les touches du piano. Il n'y comprenait pas grand chose, mais son visage alors qu'il essayait d'assimiler les informations était assez drôle à voir.

-Galileo ! S'exclame une femme en arrivant devant nous, je t'avais dit de rentrer avant le goûter !

Le petit garçon se fige et grimace.

Je décide de me lever et d'intervenir, pour ne pas qu'il ne se fasse trop réprimandait.

-Excusez-moi madame, c'est de ma faute. J'ai voulu lui apprendre, et il n'a pas du voir le temps passer.

Le petit hoche rapidement la tête et m'envoie un regard plein de remerciement.

-Galileo ? Jouer d'un instrument ? Lui ? Tu as du courage... marmonne la mère en tendant sa main vers l'enfant, nous allons rentrer maintenant.

Le brun attrapa sa main et me fit un petit signe.

-Vous reviendrez demain ?

J'acquiesce.

-Alors à demain !

J'entends la mère du brun se fâcher contre lui et un sourire glisse sur mes lèvres. Drôle d'après midi.