10- la mutilation-

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   La mutilation rythmait mes journées.

Le matin, je regardais les cicatrices avec une pointe de fierté et un soupçon de regret.

En cours de journée, mes manches frottant contre elles me rapellaient que Cat me dirigeait.

Et le soir, je retrouvais mes aiguilles à coudre avec soulagement.

La mutilation rythmait mes humeurs.

Triste, quand j'avais envie de me blesser à nouveau.

En colère, paniquée, quand j'enchaînais les allers retours sur mes avant-bras, les larmes dévalant mes joues.

Apaisée quand, épuisée, je m'endormais bercée par les brûlures de ma peau échauffée.

Fière, lorsque j'admirais les cicatrices tracées aléatoirement, verticales, horizontales, obliques.

La mutilation était importante pour moi. Tellement que parfois j'y repense avec un peu de nostalgie et d'envie. Avec cette pratique, ma vie avait un semblant de rythme, j'avais des repères que j'avais placés moi-même, j'avais le moyen de mourir et de me sentir plus vivante que jamais. Pourtant, j'ai dû arrêter. Pour ne plus retomber, pour avoir une chance de toucher le bonheur du bout des doigts. Pour avoir la force de me hisser sur la pointe des pieds et toucher enfin les nuages.

C'est difficile.

Mais retomber dans la mutilation, laisser Cat m'étreindre à nouveau, revoir mon entourage se briser par ma faute me serait insupportable. Alors j'essaye, j'essaye chaque jour de lever les bras un peu plus haut, mais si le ciel est haut, le bonheur l'est encore plus.

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