Au prix de la liberté

Chapitre 3

Les jours passent à mon plus grand bonheur car cela est signe du retour de mon père et de sa parfaite convalescence. Heureusement il n'est pas des personnes âgées têtues, non lui il respecte ses médicaments et son régime donc je n'ai rien à lui dire ou lui reprocher.

"Aïcha, deux policiers sont là et veulent vous voir", m'informe Adja la femme s'occupant du ménage.

Papa: qu'est ce que la police peut bien faire ici?

Moi: je ne sais pas Papa nous allons bientôt le savoir.

Je me dirige vers la porte sereinement sachant que je n'ai absolument rien à me reprocher.

Moi: bonjour messieurs.

Policier: Mlle Sokhna Aïcha Sarr vous connaissez Monsieur Lamine Dieng?

Moi: bien sûr c'est l'expert comptable de mon entreprise. Pourquoi cette question?

Policier: il a été assassiné hier dans l'après midi à son domicile.

Moi: oh mon Dieu, m'exclamais-je en mettant ma main sur ma bouche.

Policier: reconnaissez vous ce mouchoir?

Moi: mais oui c'est le mien. Il y a mes initiales dessus et je ne m'en sépare jamais. Que fait-il avec vous?

Policier: nous l'avons retrouvé sur le lieu du crime et trois témoins ont affirmé vous avoir vu entrer et sortir dans sa maison où il habitait seul, au moment du meurtre. L'un des témoins, la bonne de la victime, dit vous avoir vu planter une aiguille dans le dos de son employeur. Et Monsieur Dieng est mort d'une injection de poison. Vous êtes donc Mlle en état d'arrestation pour homicide volontaire et fraudes fiscales.

Vous savez cette impression que vous avez où vous vous forcez à vous dire que tout n'est qu'une mauvaise blague mais qu'intérieurement vous savez que c'est bien vrai? Cette impression où vous voyez de vos yeux brillants toute votre vie s'effondrer comme un château de cartes de plusieurs étages? Cette impression où vous doutez de vos sens et de votre lucidité tellement cela vous semble être un cauchemar? Cette impression où vous savez que vous êtes innocent mais vous ne dites rien pour autant parce que vos cordes vocales refusent de vous obéir car trempées dans la surprise? Eh bien c'est ce que je ressens et bien plus même. Je n'ai même pas ressenti les menottes qu'on a placé autour de mes poignets. C'est seulement quand mon père, qui a assisté à toute la scène, m'a parlé, que je me suis réveillée de mon état de transe.

Papa: ne t'inquiètes pas ma chérie. Je sais que tu n'as rien fait de ce dont on t'accuse. Soit juste patiente je te sortirai de là le plus vite possible mon cœur. Je t'aime.

Je n'ai même pas eu le temps de lui répondre que l'on me pousse dans la voiture de la police comme une brebis qu'on force à avancer. Je ne sais même plus quoi penser ni quoi faire, ni quoi dire. Je suis juste perdue dans un terrain vague où rien ne me semble familier.

Alors que je pensais émerger de cet affreux cauchemar, me voilà, à l'issu de mon procès qui vient de s'achever, condamnée à 25 longues années de prison pour homicide volontaire et fraude fiscale. Ce qui était plus stupéfiant, c'est voir les trois témoins affirmer m'avoir vu sur le lieu du crime jusqu'à même décrire exactement ce que je portais ce jour-là, et également le fait que l'on me présente des documents que j'ai moi-même signé de ma main preuve des fraudes que j'ai faîtes. Le comble c'est que je ne signe jamais un document sans l'avoir lu auparavant et ce qui m'a été présenté, jamais de ma vie je n'y ai apposé ma signature. Jamais de ma vie je ne mentirais ni tuerais ni même tricherais. J'ai beau être arrogante, vantarde, prétentieuse, indisciplinée, je suis une femme d'honneur et de principes et jamais je ne les bafouerais. C'était ma parole face aux innombrables preuves contre moi. Et pour tout le monde le mobile du meurtre est une évidence, je voulais apparemment me débarrasser de cet expert comptable qui était la seule personne capable de me dénoncer pour les fraudes. Tout ceci est si absurde. Cependant je ne me laisse pas vaincre. Ce n'est pas dans mes habitudes de renoncer, d'abandonner, et ma liberté je vais la recouvrer dignement. De plus tant que mon père, Tata Amina et Mamour croient en mon innocence, rien ne pourra me ralentir. Je me sens chanceuse d'être en ce moment difficile de ma vie avec les personnes que j'aime. Les autres qui se disaient être mes amies ont prit leurs jambes à leur cou après ces événements et le pire c'est qu'ils prennent un malin plaisir à me railler avec leur "je le savais, une aussi jeune femme ne peut être aussi riche sans être passée par des magouilles, elle n'a eu que ce qu'elle mérite". Je sais qu'Allah ne m'abandonnera jamais, voilà ce qui me fait ne pas perdre les plombs.