CHAPITRE 6

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Coucou ! On avance un peu dans l'intrigue avec ce sixième chapitre ! Bonne lecture !

CHAPITRE 6

Dimanche 11 octobre 2020, 14h35

— Oh, vous ne pourriez pas prendre les dos d'âne avec plus de douceur ? Il y en a qui n'ont pas la chance d'avoir un siège confortable !

Miranda ferma les yeux et se mordit la langue le plus fort qu'elle le put pour ne pas répliquer. Cet homme allait sceller sa tombe. Ils ne roulaient que depuis quelques heures et une envie de strangulation tenace ne la quittait plus. Louise, occupée à lire un vieux magazine, ne paraissait pas gênée par les plaintes pitoyables de ce que sa co-pilote considérait désormais comme un animal de compagnie agaçant. Si elle s'écoutait, cela ferait bien longtemps qu'elle l'aurait éjecté de la voiture à grands coups de pied dans l'arrière-train. Elle pivota la tête vers le gêneur, cramponné comme il le pouvait dans le coffre trop petit pour lui. Il n'avait pas de place pour étirer ses jambes, et encore moins pour tenir en position assise sans se cogner la tête. Elle lui lança un regard assassin qui le fit taire. Temporairement, tout du moins.

Leur petit tacot approchait des côtes du nord. Le vent glacial balayait les feuilles des arbres environnants. Miranda aimait l'automne. Tout n'y était ni trop chaud, ni trop froid et ses allergies au pollen la laissaient enfin en paix. Certes, il pleuvait beaucoup, mais après les étés caniculaires qu'ils côtoyaient depuis deux ans, le temps maussade sonnait comme une délivrance. La route avait été longue et complexe. Les autoroutes débordaient de cadavres de voitures, ce qui les contraignit à faire plusieurs détours. En tout cas, lorsque des légumes ne venaient pas compliquer un peu plus leur progression. Leur groupe approchait néanmoins de leur objectif initial : Berck-sur-Mer.

La ville avait bien changé depuis la Marée Rouge. Les littoraux avaient été le théâtre des plus grosses conséquences de l'apocalypse. Les baies, les plages, les restaurants débordaient de légumes qui y avaient poussé comme des champignons. La plupart des bâtiments alentours avaient été soufflés et tombaient en ruines comme si plusieurs siècles les avaient traversés. La voiture zigzaguait tant bien que mal entre les débris pour tenter de gagner la plage. Les zones sableuses paraissaient moins risquées à traverser que le centre-ville, où ils pouvaient se retrouver piégés par un de leurs envahisseurs en seulement quelques secondes. Elle ne voulait prendre aucun risque. Après encore quinze minutes de route au pas, ils aperçurent enfin l'étendue de sable.

Contrairement aux routes et aux bâtiments où le rouge avait fini par disparaître au fil des ans, la Marée Rouge avait laissé des marques indélébiles sur les plages qu'elle avait visitées. Le sable fin et blanc qu'on trouvait dans les magazines n'existait plus, remplacé par une bouillie brune et humide sur laquelle il ne valait mieux pas marcher si on tenait à la vie. Même les animaux avaient fini par l'éviter. En effet, élément insolite, les quais bétonnés débordaient de phoques gris et de veaux marins, entassés tranquillement sur les terrasses des restaurants. Les rares vérandas et parasols encore intacts les protégeaient du soleil. Nullement effrayés, les phocidés se contentèrent de regarder le véhicule ralentir, puis s'arrêter complètement au milieu de la route.

Malheureusement, l'envie de faire du tourisme n'était pas la raison pour laquelle Miranda avait été contrainte de s'arrêter au centre de la voie. À l'horizon, une tâche orange titanesque bronzait paresseusement au soleil. La jeune femme et son amie n'avaient croisé que deux citrouilles durant leurs deux années de fuite et à chaque fois, la taille monstrueuse de celles-ci leur avait coupé le souffle. La créature, aussi grande qu'un immeuble de sept étages, était si épaisse qu'elle couvrait la plage, ses berges et une partie du sud de la ville sous elle.

Macédoine | Roman post-apo avec des légumes géantsOù les histoires vivent. Découvrez maintenant