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Lenka était couchée, bordée et endormie dans son lit douillet depuis un bon moment déjà. Lui, il était assis dans la pénombre de leur maison, les ténèbres de la nuit. Il observait de ses yeux bouffis la flamme vacillante de la bougie devant lui. Il ne savait plus quoi penser. Sa tête était remplie de remords, de regrets, de chagrin... Il s'était dit tellement de fois déjà que jamais il n'aurait dû la laisser partir à la marche.

Depuis deux semaines, il avait perdu toute sa joie. Il pensait la retrouver en ramenant sa fille à la maison la semaine passée. Il avait réussi à sourire en allant la chercher ! Mais son sourire s'est évaporé rapidement.

- Où est maman ? avait-elle dit en arrivant à la maison.

Son coeur s'était serré, ses larmes se sont formées et ses sanglots ont éclatés. Il a serré tellement fort la petite dans ses bras qu'elle n'a pas osé demander à nouveau sa question. Il avait demandé à Mikuo de surveiller la petite fille pour pouvoir aller voir sa bien-aimée.

- Non, Len. Je vais t'y conduire. Miki va veiller sur Lenka et Maika va être là aussi. Tu ne prends pas le volant. C'est trop dangereux.

Il se prend la tête pour une énième fois. Il tremble, il pleure. Il ne dort presque plus ces derniers temps. Il a d'énormes cernes et commence à avoir de la difficulté de s'occuper de sa fille de la bonne façon.

Même Lenka a compris que son papa ne va pas bien. Elle se réveille dans son sommeil encore cette nuit. Elle n'arrive pas à dormir quand son papa pleure. Elle voudrait aller le voir. Cependant, son papa n'est plus tout à fait lui-même ces temps-ci. Quand elle essaie de lui parler, il ne l'entend pas toujours. Elle doit s'y prendre à plusieurs reprises pour qu'il la détecte.

Elle était si heureuse de sortir de l'hôpital, de retourner dans sa maison avec son papa et sa maman. Malheureusement, maman n'est pas à la maison.

Lenka entend son papa dire le nom de sa maman en pleurant. Elle aussi, elle a mal. En silence, à chaque nuit depuis son retour, elle se met à verser des larmes en espérant voir sa maman. Oncle Mikuo et tante Miki s'occupe bien d'elle quand papa ne peut pas. Et Maika lui rend visite après l'école.

L'école, Lenka a hâte. À cause de l'hôpital, elle doit attendre encore un peu avant de pouvoir y aller. Mais maman et papa ne vont pas bien, alors elle n'a plus envie d'y aller.

Au rez-de-chaussé, la chandelle s'éteint dans un souffle. Le filet de fumée s'élève et courbe sous l'effet du souffle de Len. L'homme regarde de ses yeux sans vie la fumée fragile. Elle se dissipe rapidement avant qu'il se cache la tête dans ses bras, appuyés sur la table. Il s'endort sur la table en pensant :

- Quand va-tu ouvrir les yeux, Miku ?

*-*-*-*-*-*

- Hey, Len. Réveille-toi.

Une main sur l'épaule du blond endormi devant lui, Mikuo tente de le réveiller. Quand il est arrivé, il a fait signe à sa fiancée de ne pas faire de bruits, histoire de laisser quelques minutes de sommeil au malheureux Len. Possédant un double des clefs, ils ont pris pour habitude d'aller dès le matin chez le couple célèbre pour s'occuper de la petite fille qui n'a presque plus de parents pour prendre soin d'elle. Comme toujours, Lenka a été inquiète en voyant son papa endormi dans un endroit improbable.

Mikuo secoue légèrement plus fort son beau-frère en espérant pouvoir le réveiller. Il est inquiet pour sa soeur, oui, mais Len commence à tout autant l'inquiéter avec ses mauvaises nuits. L'homme commence à grogner en se réveillant et découvre l'homme aux cheveux turquoise comme celle qu'il aime à côté de lui.

- Tu devrais sérieusement prendre soin de toi, Len, lui recommande Mikuo. Ton humeur désastreuse n'aide pas ta fille.

Len soupire. Il en a assez de se faire sermonner. Il n'arrive pas à faire autre chose que de se ronger les sangs à propos de Miku. Hier encore, elle n'ouvrait pas les yeux. Cela fait deux semaines qu'elle est endormie et qu'elle ne bouge pas, ne donne aucun signe.

- Va te coucher, dit l'homme qui vient de le réveiller. Je vais te prévenir quand nous irons voir Miku.

Le blond sert les dents. Il ne peut pas se permettre de dormir. Il doit rester éveillé.

- Sérieusement, fait Mikuo. Va dormir, ça va te faire du bien. Dans un lit cela dit.

Len maugrée contre lui et va s'allonger dans le lit qu'il partage habituellement avec Miku.

Mikuo, lui, prépare un déjeuner à Lenka. La petite fille reste étonnamment calme face à l'attidue de son père.

- Dis, Mikuo, fait la blondinette.

- Oui, Lenka ?

- Papa va redevenir normal si maman va mieux ?

La pauvre Lenka ne souhaite plus qu'une chose; que son papa arrête de pleurer la nuit et qu'il s'occupe d'elle comme avant. Son oncle s'approche d'elle et se penche à sa hauteur. Il voit dans les yeux bleus de la petite fille qu'elle retient des larmes d'apparaître. Il sourit tristement en posant ses deux mains de chaque côté du visage de sa nièce.

- Oui, sans aucune doute il ira mieux quand ta maman ira mieux.

- Alors je veux que ce soit tout de suite ! pleurniche-t-elle.

C'est la première fois qu'il la surprend en train de pleurer. Il la serre dans ses bras en la réconfortant et Miki se joint à eux rapidement.

*-*-*-*-*-*

°Point de vue de Miku°

- Vous allez vous en remettre, il n'y a pas de doutes.

Le médecin quitte ainsi la pièce. Que s'est-il passé ? Ma tête me fait mal. Il y a un tambour à l'intérieur. Je pose ma main sur mon front. J'ai eu trop d'infirmières dans la chambre. Je ne me sens pas très bien. On m'a dit de me reposer et de ne rien faire aujourd'hui. Comment puis-je simplement accepter cette demande ? Je suis chanteuse ! Je dance sur scène, je donne des conférences, je suis pleine d'énergie... Je devrais simplement restée couchée sur ce lit et accepter ça ?

L'idée me dégoûte, mais je me sens incapable de faire quoi que ce soit. Je me sens fatiguée...

Ils disent tous que je suis horriblement chanceuse de m'en sortir avec si peu. L'impact aurait été violent. J'ai tellement mal au dos, je ne vois pas en quoi je suis chanceuse. C'est sans parler de mes bras extrêmement lourds...

Par chance, ils ont ouverts le rideau de ma chambre. Je peux observer le ciel et les nuages... Pourtant, j'aurais besoin d'autre chose pour me faire oublier mon malheur... Les trois dernières heures ont été éprouvantes avec tout ce personnel qui me posait un tas de questions... J'en ai marre...

Affrontons la vie { 4 }Où les histoires vivent. Découvrez maintenant