TOME 2: DANSER...A EN PERDRE LA RAISON

Chapitre 12

J'étais folle. Définitivement. C'était un fait.

J'avais aimé. J'avais apprécié régurgiter mon estomac. Pas sur le coup mais après. Une fois fait, je me sentais mieux. Libérée d'un poids.

J'avais l'impression de vider tout mon mal-être, le problème de mon corps, ma mère et Martin. Cela faisait énormément de bien. Et après tout, quelle différence y'avait-il entre se faire briser le cœur et avoir l'impression de se le faire arracher ?
Je n'en voyais aucune. Autant avoir l'impression de se le faire arracher puisqu'il est déjà brisé et si, en plus, cela pouvait me soulager...

-Justine ? Tu es là ? entendis-je Lila m'appeler.

La seconde d'après, elle toqua à ma porte.

-Ouvre moi Ju'...

Je me relevai alors, essuyant ma bouche du revers de mon bras pour enlever le loquet de la porte. Puis me laissai glisser contre la paroi du mur d'à côté.

Elle referma la porte derrière elle et je vis que Lynn l'accompagnait.

Elle se mirent chacune de part et d'autre de moi. Lila mit sa tête sur mon épaule et Lynn serra mon genou gauche. Alors je pleurai. Encore. Et encore. Mon nez coulait. Je me répugnais. Mais j'avais besoin de pleurer. La tête en arrière, appuyée contre le mur. Je me sentais de nouveau seule maintenant. Lila et Lynn ne me connaissaient pas comme Martin me connaissait. Comme ma mère me connaissait. Ils n'étaient plus là tous les deux. J'avais abandonné ma mère et Martin venait de me laisser tomber. Retour de bâton. Boomerang. On n'obtenait que ce que l'on méritait. Je méritais d'être comme ça. Malheureuse. Avoir un visage baigné de larmes et de la morve qui coulait (je méritais d'être crado si c'est ce que vous pensez...).

Si, au moins, je pouvais rattraper la peine que je causais à ma mère, j'allais le faire. Et pour cela, rien de plus simple. J'avais déjà commencé. J'allais m'entraîner. Danser, m'entraîner dans le cabanon, en deux fois plus dur. Il le fallait. Si pour perdre des cuisses, je devais commencer par manger moins, comme l'indiquait un site internet, je le ferai. Je ferai n'importe quoi pour elle. N'importe quoi pour la remercier de tout ce qu'elle avait dû faire pour moi. Je pouvais bien sacrifier quelques kilos puisqu'elle avait sacrifié sa vie pour le bonheur de sa fille.

Je séchais mes larmes à l'aide de la manche de mon pull fin. Avant que la cloche ne retentisse, à l'aide du sèche-main mis à disposition dans les toilettes handicapées, je fis sécher mes larmes après avoir passé de l'eau sur mon visage. Lorsque vînt la sonnerie, plus aucune trace de larme n'était sur mon visage. Lynn me remit même un peu de blush histoire de montrer à ce « crétin prétentieux que je vis ma meilleure life » (c'était elle qui le disait...)

Nous rentrâmes alors en classe d'anglais, tandis que je filai m'installer au fond à ma place habituelle, Lila et Lynn s'installèrent à quelques tables devant moi, étant donné les deux seules places restantes côte à côte hormis la mienne. Calée au fond, près de la fenêtre, je regardais le paysage.

Comment en étais-je arrivée là ? Seule ? Sans plus aucune personne me connaissant d'avant. Je relevai vivement la tête. Cela pouvait devenir mon nouveau départ. Après tout, je pouvais faire en sorte que cela devienne le point positif. Me réécrire. Réécrire mon histoire pour mieux oublier. Ou en tout cas pour mieux l'enfermer sans entendre quelqu'un qui me le rappelait sans cesse.
Il faut que je le déteste, il faut que je le déteste... me dictai ma conscience.

Un nom me fit sortir de ma rêverie :

-Lartel is not here ? demanda le prof d'anglais.

Aucune réponse. Je parcourus la salle du regard afin de savoir s'il était là ou non mais la réponse fut effectivement négative. Je fronçai les sourcils. Tout à l'heure, il n'avait aucun souci, il ne semblait pas malade ni préoccupé... avait-il séché ? Martin me dirait sûrement que oui donc je pensais que non. Martin avait toujours tort. Nouvelle philosophie pour une nouvelle vie.