Chapitre 4

28 5 2
                                    

Je me réveille en sursaut, en sueur. J'ai fait un cauchemar. Les mots de Shadow tournent en boucle dans ma tête.  Quand les premiers signes apparaîtront, tu penseras à moi. Mais quel abruti. Je me tourne et retourne dans mon lit. Une sensation de peur se niche au creux de mon ventre, impossible de la faire partir...

Prise d'un élan incontrôlable, je me lève et dévale les escaliers. J'ouvre le tiroir où se trouvent nos documents administratifs et attrape brusquement mon carnet de santé et celui de mes deux parents. J'ouvre le mien précipitamment et tourne les pages. Trouvé. Groupe sanguin de l'individu : B+.

Une vague de soulagement me terrasse. Je sais que je ne devrais pas accorder autant d'importance aux paroles d'un illustre inconnu, mais c'est presque instinctif. Je suis soulagée, si Je suis B+, mes parents doivent l'être aussi. J'ouvre le carnet de ma mère et étouffe un cri. Groupe sanguin de l'individu: O-. Tremblante, je saisi celui de mon père. AB+. Des larmes emplissent mes yeux. Bordel de merde.

Je range les carnets précautionneusement, comme si j'avais commis un crime en lisant ces pages. Les données s'embrouillent dans ma tête, je remonte dans ma chambre et fini par m'endormir, terrassée par un sentiment de panique extrême.

Lorsque je me réveille le lendemain matin, je mets un moment à me rappeler l'épisode d'hier soir. Je me retiens d'éclater de rire. Je suis stupide de croire à des choses pareilles. Ce ne sont que des foutaises. Je me lève le coeur léger. Tout va bien, il me reste du temps. Je m'habille en quatrième vitesse et prends le chemin du lycée. Sur le chemin je me connecte au forum. Le post de Shadow a été supprimé, et il ne reste plus de traces de notre conversation. Inquiétant.

Quelques dizaines de minutes plus tard, me voilà à nouveau assise dans cette foutue salle pour de longues heures. J'observe la classe. Ils paraissent bien agités ce matin. Le cours démarre même si le prof peine à se faire entendre. Les minutes s'égrènent affreusement lentement. Enfin la cloche sonne pour la pause de midi. Je range mes affaires et sors en trombe sans adresser un seul regard au professeur.  Je déverouille mon téléphone pour consulter les informations comme à mon habitude. Rien de bien intéressant. Je parcours la rubrique des faits divers. Un titre attire mon attention et je laisse presque tomber mon téléphone.

Foyer épidémique dans un village russe: la maladie n'est pas encore identifiée.

Alors là je panique complètement. Je sens mon coeur battre à une vitesse ahurissante. Je parcours l'article rapidement.

Dans un petit village russe reculé, une maladie s'est répandue et a plongé 18 personnes dans le coma. 9 sont décédées dans la nuit, de tout âges,  de tout sexes, de toutes origines. On soupçonne une bactérie  d'être la cause de cette épidémie, elle se serait trouvée dans le lait que les habitants de ce village consommaient. En attendant plus d'informations, tous les produits laitiers ont été retirés de la vente et récupérés dans les habitations afin d'être détruits.

J'espère de tout coeur qu'ils ont raison. Mais au fond de moi, j'ai toujours cette affreuse impression. La boîte de Pandore vient d'être ouverte. La tête me tourne, je manque d'air. Je m'appuie contre le mur pour reprendre mon souffle. Pas question de retourner en cours après ça, je récupère mon sac que j'avais laissé tomber, et je rentre chez moi au pas de course. J'envoie rapidement un message à ma mère pour la prévenir que je ne me sentais pas bien et que je préférais passer l'après midi à la maison. Elle va mal le prendre, mais tant pis.

Sur le chemin je m'arrête dans un magasin de sport, un vrai coffre au trésor pour moi. Je parcours rapidement les rayons, C'est peut être ma paranoïa, mais il faut que je complète cette liste plus rapidement, heureusement que je viens de récupérer mon argent de poche du mois. Je repère un sac à dos de taille correcte qui inclut une poche à eau et un sac de couchage pour des températures extrêmes. Parfait, même si mes économies s'apprêtent à partir en fumée. La file d'attente pour accéder aux caisses est immense. Comme si j'avais du temps à perdre. Je souffle. Enfin, je finis par sortir du magasin avec mes articles en main. Après ce détour, direction maison.

Sur le pas de la porte, je sens mon téléphone vibrer. La réponse de ma mère sans doute. Je le deverouille et lis la notification. Putain de merde.

Une épidémie se répand à vitesse record dans l'Ouest de la Russie. Déjà 178 morts.

J'ouvre en tremblant l'application.

La maladie se présente sous forme bactérienne qui infecte les personne par voie aérienne avant des les plonger dans le coma et de stopper une à une les fonctions vitales. Elle se propage à une vitesse très rapide, le temps d'incubation avoisine les deux heures maximum. Aucun lien n'a encore été effectué entre les victimes, l'état russe tente d'endiguer la propagation mais on recense déjà moins un cas avéré en Hongrie.

178 décès en si peu de temps. Ça ne sent pas bon du tout. Je monte dans ma chambre et consulte mon ordinateur. Dans un état second, je récupère la liste des victimes de la maladie et consulte leurs dossiers médicaux sur la base d'information de la police. Merci papa et ses cachettes merdiques pour les mots de passe. Je parcours rapidement le groupe sanguin de chacun d'entre eux. Shadow n'était peut être pas cinglé en fin de compte. Aucun B+ n'apparaît. Soudain, un bruit me sort de ma stupeur: la porte qui claque. J'entends des pas monter quatre à quatre les escalier. Mon père débouche dans ma chambre, l'air tendu :

-Ta mère m'a prévenu, tu te sens mal? Tu ne quittes jamais l'école d'habitude, tu as un problème ? Tu veux en parler?

Je le dévisage, bouche bée. D'habitude c'est ma mère qui endosse le rôle de l'inquiétée de service.

- Mais... Qu'est ce que tu fais à la maison si tôt ? Depuis quand as tu l'autorisation de prendre des congés ? Je demande surprise.

Il soupire et secoue la tête.

-Dis moi juste que tu vas bien Néa, que je rassure ta mère.

- Je vais bien. Explique moi pourquoi tu es rentré maintenant.

Il plante son regard grave dans le mien. Il se passe définitivement quelque chose qui va bouleverser nos vies, bien plus tôt que je ne l'imaginais.


Pour qu'on se souvienneOù les histoires vivent. Découvrez maintenant