Promesse d'un Avenir (T3)

Dilemme au goût de sel

Point de vue d'Iliana

- Et si on marchait un peu ?

Elle appelle Maureen et la petite vient prendre nos mains alors que nous nous mettons en marche.

- Co-comment vous vous êtes rencontrées toute les deux ? Je les questionne pour me donne une raison valable d'observer la nouvelle venue sans paraître trop indiscrète.

Je parle à une morte. Une morte qui est juste sublime. Je réprime un soupir d'envie : même sa démarche prouve son élégance. Comment Jace a-t-il pu passer d'un canon de beauté à la fille aussi banale que j'étais ? Anna me sourit tranquillement.

- Comme j'ai pu te le dire, cela fait un moment que je t'observe et lorsque Maureen a quitté l'autre monde, j'ai mis un point d'honneur à m'occuper d'elle. Tu avais l'air de tellement y être attachée, je pensais que s'il y avait une infime chance que tu arrives à savoir qu'elle était entre de bonnes mains, tu parviendrais à tourner la page plus facilement. Mais c'est très rare que ceux du monde des vivants parviennent à rentrer en contact avec nous. Estime-toi heureuse, enfin... en quelque sorte.

Donc si elle a pris soin de Maureen, c'est pour moi ?

« En plus d'être magnifique, elle est attentionnée. »

Les injustices existent donc même après la mort.

- Pourquoi je ne devrais pas être heureuse alors que je me sens si bien ?

- Parce que si tu es ici, cela veut dire que ton heure va bientôt sonner. Il faut se faire à l'idée que le monde va continuer de tourner sans toi, que ceux que tu aimes affronteront les épreuves sans que tu sois à leur côté...

- Je dois avouer que j'ai eu le temps de m'y préparer.

- C'est ce que tu crois.

Maureen aperçois un papillon et nous abandonne pour aller lui courir après. Cette vue devrait me réjouir mais je garde en tête les mots d'Anna.

- Je croyais aussi qu'être libérée de la douleur suffirait à effacer la distance avec ma famille, mais je me suis rapidement rendue compte que je m'étais leurrée. Bientôt, j'ai souhaité souffrir mille fois plus que ce que j'avais enduré plutôt que de les voir se déchirer sans moi. Mes parents ne se sont toujours pas remis complètement de ma mort, même après si longtemps, et ma sœur s'empêche toujours de vivre tellement elle elle craint la cruauté du monde. Quant à ma chère petite Lola, c'est pire que tout. Je crains qu'elle finisse par faire une bêtise et Dieu sait que son père souhaite l'en empêcher.

- Henri est ici lui aussi ?! Je m'exclame en me retournant, comme s'il nous suivait.

Anna tapote gentiment mon épaule.

- Bien sûr. Il a hâte de te rencontrer, mais je lui ai demandé de patienter un peu, je voulais d'abord que l'on parle seule à seule.

Le sujet de discussion qu'elle veut aborder n'est pas bien compliqué à deviner :

- J'imagine que tu souhaites que l'on parle de Jace.

Elle m'adresse un sourire de connivence.

- Tu as tout compris.

Elle s'arrête et s'installe à une table qui, quelques secondes auparavant, n'était pas présente dans le paysage. J'hésite un instant, encore un peu secouée par les mystères de ce lieu qui semble se transformer au gré de nos envies. Anna rabat ses cheveux en un chignon fou puis place sa joue dans sa paume.