Chapitre 6

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Décembre

Molly Hooper était de garde à la morgue pour la veille de Noël, comme elle l'était depuis plusieurs années, puisqu'elle n'avait plus de famille ou d'amis proches avec qui le célébrer. La fête de Noël à laquelle elle était allée à Baker Street l'année précédente avait tourné au désastre quand Sherlock était parti dans ses déductions et avait embarrassé tout le monde avec le démontage caustique de son cadeau. Oui, il s'était excusé immédiatement devant tout le monde mais quand même... La morgue était plus sûre. Les morts lui racontaient leurs secrets mais personne ne blesserait ses sentiments.

Elle était tellement plongée dans ses pensées qu'elle n'avait pas entendu la porte s'ouvrir ni même se fermer.

Mais un petit coup la fit lever les yeux de son bureau. C'était Mycroft. Son parapluie frappait le sol et l'alerta. Elle se leva tout de suite, la couleur se retira de son visage. S'il avait fait tout le chemin jusqu'ici et particulièrement aujourd'hui, cela pouvait seulement dire qu'il avait des mauvaises nouvelles et voulait les lui dire en personne. Elle se sentit défaillir et se retint à la table, ouvrit sa bouche mais ne put parler.

- Mes excuses Molly, dit-il rapidement, réalisant instantanément ce que signifiait ses réactions. Je ne voulais pas t'effrayer. Il n'y a pas de mauvaises nouvelles. Je pensais juste...

Il s'éclaircit la gorge un peu maladroit maintenant.

Elle le regardait avec de grands yeux, incapable de comprendre pourquoi il était là, dans la morgue froide et lugubre à St Barts un réveillon de Noël, à lui parler, s'il n'y avait pas de mauvaises nouvelles.

- Eh bien, je pensais juste que tu ne devrais pas être seule un jour comme celui-là.

Cela étant dit, il lui tendit une boite. Elle la prit des mains tremblantes et l'ouvrit pour trouver un gâteau aux prunes. Un simple gâteau aux prunes. Elle le regarda et cligna des yeux. Soudain des larmes ininterrompues tombèrent sur sa joue.

J'ai vraiment besoin d'arrêter de pleurer autant, pensa-t-elle intérieurement. J'ai dû pleurer plus l'année dernière que dans toute ma vie d'avant. Mais Sherlock avait dû se tromper en traitant son frère d'Homme de Glace ? Un homme de glace ne comprendrait pas à quel point elle se sentait désespérément seule et malheureuse et à quel point cela la touchait profondément aujourd'hui ?

Avant qu'elle ne puisse plus y réfléchir, elle avait contourné son bureau et serrait l'Homme de Glace, qui semblait sur le point de s'évanouir. Il ne pouvait pas se rappeler de la dernière fois que quelqu'un l'avait serré dans ses bras, depuis qu'il avait 17 ans et que Maman avait insisté pour lui faire un câlin après sa cérémonie de remises des diplômes.

Molly pleurait, riait et le laissa partir, s'essuyant le visage.

- Viens, assis-toi, dit-elle, goûtons ce gâteau ! Donne- moi une minute.

Elle alla aux vestiaires, nettoya son visage, sortit une boite dans son casier et la rapporta à son bureau. Mycroft était assis là, les jambes croisées et une main tenait le pommeau de son parapluie. Elle imaginait comment il avait dû remettre son manteau après son « attaque » et elle gloussa. Elle ouvrit la boîte qu'elle tenait et la poussa vers lui.

Il regarda à l'intérieur et vit deux mince pies. Il la regarda à nouveau.

Elle haussa les épaules.

- Je les ai fait hier. J'ai besoin de nourriture réconfortante quand je suis triste.

- Mais, dit-il avant qu'il ne puisse s'arrêter, d'habitude tu cuisines les jours où je t'envoie un message. Je pensais que tu étais heureuse d'avoir des nouvelles de Sherlock.

- Comment... ??!

Elle le fixa, commença à parler puis elle réalisa. Bien sûr, il continuait de la surveiller même à l'intérieur de son appartement. Comment aurait-il pu la protéger autrement ? Non... Comment aurait-il pu protéger Sherlock autrement ? Eh bien. Il était trop tard pour être dégouté maintenant.

Elle détourna le regard.

- Oui, je suis heureuse quand j'ai des nouvelles mais ça me rend triste aussi parce que ça me rappelle encore plus qu'il est seul, loin et sans personne pour veiller sur lui.

A nouveau une larme menaça de couler sur sa joue.

Mycroft se retrouva à penser qu'il aurait préféré abattre un dangereux régime fasciste plutôt que de la voir pleurer et il n'avait aucune idée de quoi faire ou quoi lui dire. Alors, il attrapa une mince pie et prit une bouchée.

C'était parfait.

La base était croustillante et friable et le hachis était trempé dans autre chose que du brandy. Était-ce du miel ? Y avait-il un soupçon de gingembre ? Il prit deux autres bouchées pour le découvrir, la finit et lécha ses doigts. Il était tellement absorbé par l'idée de manger qu'il ne leva les yeux que quand il entendit son rire.

- Allez, dit-elle, mange la deuxième. Je peux avoir le gâteau.

Puis elle fit un signe de la main et dit :

- Ces braves gens ont tous eu leur dernier souper, et elle se mit à rire.

Il fit quelque chose qu'il n'avait pas fait depuis des années (ou peut-être jamais ?). Il sourit. Il sourit comme le chat du Cheshire invité à prendre le thé par Alice.

Il prit la seconde mince pie et dit :

- Eh bien Molly, si tu insistes...

Et en prit une grosse bouchée, cette fois fermant ses yeux pour savourer le goût.

Il en prit une de plus. Réconfort. C'était le goût que ça avait. C'était ce à quoi son cerveau réagissait.

À ce moment précis, dans cette salle de la mort, il se sentit soudain très vivant et il reconnut aussi une vague de quelque chose qui coulait dans son cerveau. Savoir qu'il y avait quelqu'un d'autre sur cette planète qui savait que son frère était vivant, ce qu'il en avait coûté pour le faire mourir et qui comprenait dans une certaine mesure le fardeau qu'il portait. C'était plus lourd que n'importe quel fardeau qu'il avait porté jusque-là et soudain, on avait l'impression qu'il s'était déplacé, juste un petit peu. Il n'était pas plus léger, mais peut-être qu'il semblait un peu plus facile à porter ?

Une partie de son cerveau réfléchissait... Peut-être que partager avec quelqu'un le rendait plus fort... Tandis qu'une autre partie chuchotait un avertissement : "Souviens toi ! La solitude nous protège..."

Mais quand il ouvrit les yeux pour regarder à nouveau Molly il sut que quelque chose avait changé de façon permanente entre eux.

Comment avait-elle fait ça ? Comment pouvait-elle être si émotionnel, prête à pleurer tout le temps et pourtant porter en elle le courage d'une petite armée ? Comment pouvait-elle continuer à aimer Sherlock alors qu'il ne l'aimait pas et ne lui rendrait jamais la pareil ? Comment pouvait -elle avoir la force d'apporter et réconforter les autres quand son propre cœur était brisé ?

Sous cette avalanche de questions, finalement son cerveau lui posa la question la plus difficile, très doucement, discrètement, dans un murmure :

« Qui a-t-elle pour trouver du réconfort ? »

Et il sut quelle serait la réponse à cette question, même s'il n'oserait jamais l'admettre correctement, même à lui-même, encore moins le dire à haute voix.

Ce serait lui.

Du mieux qu'il le pourrait, il ferait en sorte que ce soit lui.

Ce soir-là il se souvint du goût de la mince pie en lisant son livre : La soie des fils d'araignées a une résistance à la traction d'environ 1,3 GPa. La résistance à la traction indiquée pour l'acier peut être légèrement supérieure - par exemple 1,65 GPa, mais la soie d'araignée est un matériau beaucoup moins dense, de sorte qu'un poids donné de soie d'araignée est cinq fois plus résistant que le même poids d'acier.

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Mycroft est tellement pris par la bouf qu'il pourrait lui dévoiler tous les secrets d'état ^^... Enfin, il s'est décidé à bouger un peu !!! Victoire!! 

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