Chapitre 2

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Tout était trouble. J'avais enfin ouvert mes yeux. Il me tenait toujours la main mais je n'arrivais pas à tourner la tête pour le voir. J'avais mal, dans le cou, dans la nuque, dans le dos et je ne sentais plus mes jambes. Quelqu'un entra et dit : « Ecartez-vous, laissez la respirer. ». Une voix d'homme. Une voix froide, sans émotions. Je ne l'aimais pas.



L'homme lâcha ma main. Je me remis à paniquer. Je ne voulais pas qu'il parte ! Je voulais lui dire mais je n'y arrivais pas.



Puis, tout le monde se tut. Les pas s'étaient arrêtés près de moi et je n'entendais plus aucun son, plus aucun bruit. Le silence commençait à me faire peur. Je ne pouvais voir personne. Quand je les entendais, je savais que je n'étais pas seule. Mais là, plus personne ne parlait. Plus personne ne bougeait. J'étais de nouveau perdu.



Pourtant, je sentais leur présence. J'avais l'impression qu'ils m'observaient. Je n'aimais pas ça. Mais ça me rassurais de savoir qu'ils étaient là. J'avais l'espoir qu'il soit encore là.



Qu'est-ce que j'avais de spécial ? Pourquoi étaient-ils tous là pour moi ? J'ouvrais la bouche pour le rappeler mais je n'y arrivais pas. C'était comme si je n'avais pas de voix.



L'homme qui était entré se remit à parler : « Tu m'entends ? Je suis médecin, je suis là pour t'aider. J'aimerai savoir si tu m'entends. Comment t'appelles-tu ? » Comment je m'appelais ? Je ne m'en souvenais pas. J'avais beau chercher dans ma mémoire, les seuls souvenirs que j'avais étaient ceux du paysage blanc.



Je n'avais pas confiance en lui, le médecin. Sa voix était froide. Elle ne m'inspirait que du dégout, de la peur. Je le méprisais sans le connaitre. Je ne savais pas comment je faisais. Cela me paraissait tellement cruel. Pourtant c'est ce que je ressentais.


Suis-je cruelle ? Je ne voulais pas l'être. J'avais la chance de pouvoir recommencer. De pouvoir une nouvelle fois apprendre à me connaitre. Je voulais être quelqu'un de bien.


Je ne voyais plus trouble. Ma vue avait finis par se stabiliser. Je voulais dire au médecin que je ne m'en rappelais pas mais aucun son ne sortait. J'étais comme paralysée. Je ne pouvais même pas le regarder. Je voyais seulement le plafond gris qui me surplombait.


           


J'étais à la limite de pleurer. J'avais beau essayer de parler, je n'y arrivais pas. Tout mon corps me faisait mal. Je tremblais. J'avais chaud, trop chaud. Pourtant, je savais que ma peau était gelée.



Il reprit : « Ne panique pas. On va commencer par quelque chose de plus simple, d'accord ? Si tu m'entends essaye de bouger un doigt ou ta main. »


Je devais y arriver. Ça me paraissait déjà plus simple. Je me concentrais. Tout mon esprit était focalisé sur ma main droite. Celle qu'il avait touché.



Puis, je sentis. Mes doigts étaient immobiles, mais je sentais le tissu des draps en dessous. Je me continuais à me concentrer, j'y étais presque. Je sentais mon index se déplacer de gauche à droite pour le caresser. C'était comme si je sentais chaque particule du tissus. Chaque matière avec lequel il avait été conçu.


A présent j'étais calme. Je n'avais plus peur. Je savais que je pouvais bouger et ça me rassurait.


J'entendis des gens soupirer. Comme si ils avaient retenus leur respiration et que maintenant tout allait bien, tout étais finis, et qu'ils étaient libérés.



Le médecin continuait de me parler. Il avait l'air soulagé : « Bien. Tu as déjà énormément progressé. Tu es de nouveau parmi nous et c'est l'une des meilleures choses que l'on pouvait espérer.  Maintenant, tu vas essayer de tourner la tête et de me regarder. Si tu n'y arrive pas ce n'est pas grave, tu en as déjà fait beaucoup pour aujourd'hui. »


La seule raison pour laquelle je voulais tourner la tête c'était pour regarder l'homme. Celui qui m'avait pris la main et avait sous-entendu vouloir m'aider.



Ma nuque me faisait horriblement mal. Dès que je bougeais j'avais l'impression qu'elle allait se briser. Tout mon corps était engourdi. Comme si on m'avait anesthésiée pour m'empêcher d'avoir mal. Je ne comprenais toujours pas ce qu'il m'arrivait. Un médecin ? Mais pourquoi faire ? Je suis normal ! Je voulais être normal. Des questions se bousculaient dans ma tête. Je ne savais plus à quoi penser. Sur quoi je devais me concentrer. Je devais tourner la tête. C'est ce qu'il me demandait. Mais ce n'est pas ce que je désirais le plus. Ce que je voulais le plus, c'était parler, lui parler.



Je tournai enfin la tête. Je ressentais une douleur affreuse dans le cou. Ça me faisait réellement mal. C'est ce qui me faisait le plus mal. Je regardais le médecin. Il me regardait. Il avait l'air impressionné.


Je me mis à chercher des yeux l'homme qui m'avait parlé, Lui. Il n'était pas là. Il n'était plus là. Il avait dû partir après m'avoir lâché la main...



Il n'y avait plus que deux infirmières, une autre femme et le médecin. Je ne connaissais pas la femme. Ça devait être celle qui avait parlé de répercutions.



J'étais sure qu'elle savait où il était partit.



Je ne savais plus vraiment ce que je faisais ici. Je voulais des réponses, c'est vrai. Mais je voulais aussi savoir pourquoi l'homme n'était plus là. Où était-il partit ? Voulait-il réellement m'aider ?



Mais ce qui était sûr. C'est que maintenant que j'étais là. Je ne voulais pour rien au monde faire demi-tour. Un jour je connaitrai la vérité. Et je ferai tout pour savoir qui j'étais.


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