Chapitre 15

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Quand je me réveillai, il faisait nuit. Je ne voyais pas grand-chose dans la chambre, à part le reflet de la fenêtre sur le sol, éclairée faiblement par la lune. Je ne l'avais jamais vu d'aussi près. J'avais l'impression qu'elle était seulement à quelques mètres de moi. C'était une pleine lune ce soir. Je me rallongeai pensant attendre demain matin que l'on vienne me voir, quand je sentis que mon oreiller avait redoublé d'épaisseur. J'essayais vainement de voir ce qui était posé dessus, quand je compris que cela devait être les vêtements tant attendu que Nathan cherchait, et que l'on avait dû me déposer pendant que je dormais. Je les attrapai et les explorai de la main. Nathan m'avait laissé un legging plutôt fin, un débardeur, et un pull trop grand pour moi, mais qui avait l'air de tenir chaud. J'enfilais le tout sur mon lit et décidai de me lever. Je savais que je ne pouvais pas en temps normal, les infirmières me l'avaient dit, mais je me sentais d'une force surhumaine et qui ne tente rien a rien.

La première tentative fut désastreuse. En effet, je perdis l'équilibre et m'écroulai sur le parquet qui me le reprocha d'un grincement à m'en arracher les oreilles. Ma jambe gauche qui n'avait aucune sensation en temps normal m'était plutôt douloureuse. Heureusement, c'était supportable. Je tentai une seconde fois mais en vain, je m'écroulai à nouveau, me prenant le barreau du lit sur le front, de quoi m'étourdir durant un bon moment. Ma troisième tentative fut la bonne. Je m’accrochai sur le bord du lit, réussissant à me tenir debout. Petit à petit, j'essayai de m'éloigner du rebord et je finis par réussir à marcher nonchalamment, mais à marcher quand même. J'aurai bien aimé que les infirmières soit là pour le voir, histoire de leur montrer qu'elles avaient eu tord sur cette analyse-là. Je me dirigeai vers la porte, quand je remarquai un miroir de la taille d'une personne accroché sur le côté de l'armoire. Il m'était impossible de résister. Malgré, la faible clarté de lumière que la lune me donnait, je voulais essayer de voir à quoi je ressemblais, de savoir qui j'étais physiquement.

Je m'approchai du miroir, légèrement anxieuse. Je levai la tête et me regardai. Je ne pouvais pas voir les détails de mon visage, mais par effets d'ombres, je pouvais savoir que mes lèvres étaient pleines, mon nez un peu trop petit à mon goût et mes cheveux étaient épais et ondulés et me tombaient sur les hanches. Je n'étais pas aussi jolie que Cassiopée, mais je n'étais pas laide non plus. J'avais une poitrine assez envahissante, et j'étais beaucoup trop maigre en comparaison. Après tout, c'était normal, je venais de sortir d'un hôpital. J'étais aussi très petite contrairement à Cassiopée qui avait la taille d'un mannequin. Je ne devais pas passer le mètre soixante...

Tout ce qui est petit est mignon !

Je remerciai la voix dans ma tête et décidai de sortir de la chambre pour visiter la maison. Je sais, drôle d'idée de visiter un lieu inconnu en pleine nuit. J'avais simplement envie de ne croiser personne. Je ne pensais pas être très douée pour me présenter aux autres.

J'ouvris la porte et descendis en bas. Le couloir était sombre, l'escalier aussi. Je ne savais pas vraiment où j'allais, ma main me guidait sur le mur et de toutes manières je n'avais pas beaucoup d'autres choix de routes possibles. Arrivé en bas, du fait des nombreuses autres fenêtres et de mes yeux qui s'étaient habitués à la pénombre, je voyais pratiquement tous les recoins du salon. En face de moi, en bas des escaliers, il y avait une porte d'entrée qui menait dehors. A ma gauche, se trouvait la cuisine et à ma droite, le salon. C'était un chalet plutôt grand, les murs étant principalement composés de baies vitrées, et les meubles de bois et de tapisseries de montagne. Ce décor me faisait rêver. C'était la maison typique d'un montagnard qui aimait les paysages, l'altitude et la neige. En effet, dehors, on pouvait voir la neige tomber et la lune me paraissait s'être encore plus rapprochée. C'était magnifique.

Je fis un tour dans les deux salles qui se rejoignaient, car aucun murs ne les séparaient et décidai d'aller dehors. Je m'approchais de la porte d'entrée et l'ouvris. Je me sentis emporter. Mes pieds avaient quittés le sol. J'étais en total lévitation au-dessus de la neige. Les flocons me brûlaient la peau. Mon pull, mon débardeur et mon legging se consumait au fur et à mesure que ceci me touchait. Mon corps se mit par reflex en position fœtale et je me mis à hurler inconsciemment. Oui, j'hurlais, d'une voix qui était la mienne et qui me faisait mal. Je plaçais mes mains sur mes oreilles. Mes tympans allaient exploser. J'entendais tout. Ma voix qui était amplifiée, qui se transformait en ultra son ; Les personnes vivants dans les autres chalets ; de grandes villes qui brûlaient, encore, même après la guerre, à l'autre bout du monde ; des enfants qui hurlaient la mort de leur parents ; des mères qui pleuraient la mort de leur proches ; mais aussi, le vent qui soufflait et qui m'éloignait de plus en plus du chalet de Calum ; Les animaux qui dormaient dans la forêt ; leur souffle; Les oiseaux dans les arbres ; leur sifflement ; les loups qui hurlaient dans la montagne ; les insectes qui avaient froid sous la neige et la terre ; le froissement des draps dans lesquels les gens dormaient. J'entendais tout. Chaque bruissement des feuilles ; chaque mouvement des nuages. La lumière de la lune me brûlait les yeux. J'avais l'impression que celle-ci brillait cent fois plus que tout à l'heure. La neige était si blanche que j'en voyais la terre en dessous. Plusieurs tâches rouges dans mes yeux me signalaient les êtres vivants. Je voyais leur sang couler à travers les murs, leur peau, leur corps, dans leur organes, leur veines. Je voyais chaque cellule, chaque globule rouge, chaque muscles, chaque articulations quand ils bougeaient. Je voyais leur os. Leur cerveau. Leurs neurones qui s'entrechoquaient. Je fermais mes yeux. Cela me faisait mal et j'hurlais plus fort encore de douleur. Je voyais les veines de mes paupières. J'arrivais même à voir à travers. Je n'en pouvais plus. Rien n'allait. Je perdais la tête. J'étais folle. Je ne contrôlais plus rien. Je voulais que cela s'arrêtent. S'en était trop pour moi. Mon corps, mon cerveau et mon âme ne pouvait en supporter plus que cela. Pourtant ça empirait. Je ne comprenais pas. Mon corps me faisait mal. Mes deux jambes me lançaient. Je sentais un liquide chaud couler de mes oreilles, du coin de mes yeux, de ma bouche pendant que j'hurlais. Je saignais. Petit à petit, je sentais que la vie s'éloignait de moi. J'allais mourir. Je le voulais. C'était trop douloureux, je ne pouvais pas en supporter plus. Je n'étais pas prête pour ça. Pas encore... Pas encore...

 Pas encore... .

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