Aujourd'hui, le destin a choisi de me faire commencer par anglais, avec le prénommé Monsieur Smith. Ce genre de vieux prof moche et méchant que personne n'aime. Heureusement il n'était que huit heures, et j'avais cours avec lui à neuf heures.
Camilla, Annaëlle et moi avions décidé de traîner un peu dans le collège entre huit et neuf heures. Mais il fallait se faire discret si nous ne voulions pas aller en permanence. La permanence le matin, c'est pas un moment de rigolade, les surveillants sont de mauvaise humeur et il y a toujours trois classes entières, et les salles sont relativement petites.
Nous nous étions posées dans un endroit assez discret: la cour du lycée.
Camilla parlait de ses mésaventures qui lui étaient arrivées il y a quelques jours: elle s'est faite convoquée par la CPE car Monsieur Domingues était venu se plaindre comme quoi Camilla n'arrêtait pas de le suivre. Une deuxième convocation, accompagnée de sa mère et Monsieur Domingues lui-même, l'attendait dans les jours qui suivent. Et elle stressait comme une dingue! La convocation allait se passer jeudi, à onze heures. J'aurai bien voulu l'accompagner mais je n'étais pas disponible à onze heures, et nan, moi j'avais français à onze heures, dommage... ça aurait pu être une opportunité pour ne pas aller en cours.
La sonnerie résonnante indiquait qu'il était neuf heures. C'était l'heure pour moi d'aller en anglais avec l'un des pires profs de ce collège. Mon envie de changer de vie était pressante. Je ferai tout pour ne pas assister à ce cour idiot. Monsieur Smith est ce que je qualifierai comme un « mauvais prof ». Il n'aide pas du tout ses élèves, une heure de cour avec lui est comme un court voyage en enfer. Sans aller dans les détails, sa présence me dégoûte amplement. Il a une de ces odeurs de vieux mégot rien qu'il s'approche de nous. Il a l'air tout le temps énervé pour un rien.. bref. Et ça, c'est l'un des pires profs du collège. J'imagine même pas au lycée alors.
Le cours avait commencé depuis un bon quart d'heure, la classe était silencieuse sous le regard sévère du professeur. En même temps c'était normal, nous étions en plein contrôle. Un contrôle qui finira sur un huit sur dix, encore, je suppose. Mais en même temps ses contrôles étaient impossibles. Même les plus grands intellos de la classe avaient du mal à avoir tout bon à ce contrôle.
Au final nous étions tous ressortis en sueur, et pourtant c'était le premier cours de la matinée.
Nous suivions par français, mais heureusement, avant tout, il y avait la récréation.
J'allais à mon endroit habituel en attendant Camilla et Annaëlle. Elles, elles sortaient d'espagnol il me semble. Camilla était toute émoustillée tandis qu'Annaëlle, elle, était bien contente de sortir de cette salle maudite.
—
-Jeudi prochain c'est la réunion parents-professeurs, je vais vous distribuer les papiers pour les informations! Le seul point sur lequel j'insiste c'est que vous venez avec vos parents, hein? insista Monsieur Brown en empoignant les fiches pour choisir les profs qu'on voudra voir lors de ce jour inventé par Satan en personne.
Je le savais, comme d'habitude, ma mère allait choisir tous les profs. Dont Monsieur Brown évidemment, étant donné que c'était mon prof principal. Et on y était obligé de toute façon, c'était lui qui nous l'avait imposé. Je sentais que ça allait être une superbe réunion.
—
Ouille, je commençais cette fameuse réunion parents-profs avec l'unique prof d'espagnol du collège: Monsieur Domingues. J'avais un peu peur malgré ma moyenne en espagnol (17), mais j'avais surtout peur qu'il dise à ma mère comme quoi Camilla le suivait jusqu'à chez lui (j'avoue y avoir un peu participé).
Il y avait aussi mes deux petites cousines, l'une de neuf ans, Mel, l'autre de sept ans, Zoé. La petite Zoé a une maladie, elle ne parle pas beaucoup et elle crie beaucoup quand elle s'énerve.
—
J'ai donc commencé cette réunion parents profs très stressée, car c'était la première fois que je participais vraiment à une réunion parents profs, les autres fois c'était seulement ma mère qui y allait. L'ambiance était spéciale: chaque élève stressait un peu à l'idée de savoir ce qu'allaient dire les profs, sauf les intellos évidemment qui étaient sûrs d'eux.
Donc la salle pour rejoindre le prof d'espagnol était au dernier étage, dans la salle C32. Nous y arrivâmes et il nous accueillît avec un sourire chaleureux. Il nous fit chacun une poignée de main puissante, ce qui me détruisit la main, merci. Et nous nous installâmes sur des tables mises au hasard au fond de la salle. Donc il m'expliqua ce qui allait, ce qui n'allait pas. J'avais beaucoup de positif et moins de négatif, je travaillais bien en général, je suis, sans me vanter, une plutôt bonne élève.
Au final nous sortîmes tous soulagés. Il n'avait pas du tout insisté sur le fait que je l'avais suivi avec ma pote, et heureusement car je ne sais pas ce que ma mère allait en penser.
De fil en aiguille nous allions de salles en salles, voir de nouveaux profs. A un moment Zoé était fatiguée, elle s'était mise à pleurer. Ce qui amplifia un sentiment de malaise au sein du bâtiment. Tout le monde nous regardait. Certaines amies de ma classe qui passaient ne pouvaient pas s'empêcher de glousser à la vue de la pauvre petite qui était en train de se rouler par terre. Moi, j'essayais de me faire toute petite.
Après être passée voir Monsieur Ryan, Mel était silencieuse, elle rougissait beaucoup, et elle était hypnotisée par la trombine de celui-ci. Je pense qu'une petite fille en pinçe pour le prof d'histoire!
—
Assise dans les escaliers du bâtiment, alors que j'étais honteuse et que Zoé, toujours sur les nerfs, était en train de péter un plomb (elle retirait ses chaussures et les balançait par terre), j'entendis une voix grave prononcer mon nom.
-Lindsay?
Je me tournis vers le son de la voix et vis mon prof principal, le dénommé Monsieur Brown.
-Lindsay tu es passée? m'adjura t-il.
Bien évidemment que je n'étais pas passée. Pourquoi poser une question aussi évidente?
-Bah non. lui répondis-je communément, en le regardant toujours avec ce regard noir permanent qu'il aime tant.
Je le suivis accompagnée de ma mère et mes deux petites cousines dans la salle dans laquelle il se trouvait pour la réunion. Nous nous installâmes à une table, non loin d'une autre prof, Madame Mora la prof d'allemand, avec qui ils se partageaient la salle pour cet après midi.
J'étais très gênée, tellement gênée que je ne pouvais pas m'empêcher de me faire toute petite. Et Zoé continuait à crier jusqu'à en détruire les tympans. C'était très gênant, et Monsieur Brown était très embêté de ne pas pouvoir discuter de mes notes avec ma mère et moi. Et même si Monsieur Brown essayait tant bien que mal de m'expliquer dans quoi je devais m'améliorer, la discussion devait s'arrêter ici.
J'étais quand même soulagée, quoique un peu triste que Monsieur Brown n'aie pas pu terminer son discours.