J’ai du mal à enregistrer et mettre en ordre toutes les données qui viennent d’être mises à ma disposition. Non seulement je ne m’attendais pas à ce qu’il vienne m’empêcher de partir encore moins qu’il me fasse une déclaration ! Je ne sais pas quoi répondre, d’ailleurs aucun mot ne semble pouvoir sortir de ma bouche tellement elle s’est asséchée. Il ne m’évitait pas parce qu’il ne voulait pas de moi mais parce qu’il se sentait coupable vis-à-vis de ses parents. Toute la rancœur que j’ai pu ressentir pour lui vient de s’évaporer ! Je me contente de me jeter dans ses bras et là c’est lui qui m’embrasse. Je me dégage de son étreinte et le regarde avec inquiétude.
-Qu’y a-t-il Ella, me demande t-il ?
-J’ai déjà dit à mes parents que je partais sur Terre et je me vois mal leur expliquer que je reste, même si je ne leur dis pas que c’est pour toi.
-Je vois, dit-il un peu triste en me caressant la joue. Mais ne t’inquiètes pas, vas-y et reviens-moi vite.
-Mais…
-Il n’y a pas de « mais » Ella. On ne peut pas risquer d’être découvert, ils nous tueraient ! Vas sur Terre et reviens le plus tôt possible, je t’attendrai, je t’attendrai toujours.
-D’accord, dis-je sans conviction. Tu vas terriblement me manquer.
-Moi aussi, mais ça passera très vite, je te promets.
Après de longues étreintes, comme si nous ne nous reverrions jamais je regagne à contrecœur la salle aux caissons. J’ignore les regards inquisiteurs d’Udes et de Dilène. Au fond, ils savent ce qui se passe mais bizarrement ils ne semblent pas décider à nous dénoncer. Nous voyageons donc en silence vers la Terre. La maison me semble si étrangère après ces quelques jours passés sur Gaia. Je sors prendre l’air et m’étonne de ne pas voir une atmosphère bleue. Je me dirige sans m’en rendre compte vers le parc, et je m’assois sur un banc. Comment allons-nous faire pour ne pas nous faire prendre, mes parents exécuteraient-ils leur unique fille, et si on s’enfuyait sur une autre planète ? Là mes pensées dérivent indéfiniment jusqu’à ce que je me rende compte que le soleil s’est couché et que plus personne n’était dans le parc. Il fait si sombre aujourd’hui, pas une étoile n’éclaire le ciel. Je me lève et me dirige vers la sortie quand soudain un bruissement attire mon attention. Je me retourne mais ne vois rien, je presse donc le pas, il ne me reste que quelques mètres à parcourir. De nouveau le même bruissement se produit, je ne me retourne pas cette fois ci et cours jusqu’à ce que je n’aperçoive plus le parc. Je me précipite à l’intérieur de chez moi avec la vague impression d’avoir été suivie, à moins d’être devenue tout simplement paranoïaque. Après diner je monte dans ma chambre, je n’ai aucune envie d’avoir cette discussion qui me pend au dessus de la tête comme une épée de Damoclès avec mes faux parents. Je suis tellement fatiguée que je m’endors à peine que j’atterris dans mon lit.
***
Les rayons du soleil percent à travers les rideaux azurs de ma chambre. J’ouvre doucement les yeux et contemplent mon plafond blanc et nu, aucune télé ne trône au dessus de ma tête, mon lit ne m’a jamais paru aussi petit et mes murs immaculés barrés par endroit de tons vifs me semblent si extravagants. Je suis bien sur Terre. Je m’étire et me dirige vers ma salle de bain, j’ai besoin d’un long bain chaud. Lorsque je sors, le bruit au rez-de-chaussée m’indique qu’Udes et Dilène sont debout et préparent le petit déjeuner comme avant que tout ça n’arrive. Je m’approche de la fenêtre et regarde dehors pensivement, je n’aperçois nulle part Ludis en train de se promener dans les vergers, juste des buildings à perte de vue. Il me manque déjà…
Bon il est grand temps que je descende déjeuner. Je trouve Dilène dans la cuisine tandis qu’Udes est dans le salon en train de regarder les informations.