Chapitre 2 - La fuite

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Choses se faisant, le lendemain arrivant, notre vieil homme fut réveillé sous les coups de midi. Bien que l'auberge soit calme à cette heure, son fidèle compagnon lui, ne l'était pas. Cela faisait bien trop longtemps qu'il attendait le réveil de son maître pour aller gambader. C'est donc d'un somptueux saut dans le lit qu'il décida de mettre fin à l'interminable attente, léchant activement le visage de l'homme jusqu'à ce qu'il ouvre les yeux. Ce dernier le repoussant gentiment, se redressa sur son lit. Pris quelques instants à sortir de son si profond sommeil. Impossible pour lui de se rappeler la dernière fois qu'il avait si bien dormi. Son voyage était beaucoup trop long cette pause semblait plus que nécessaire. Il tourna la tête en direction de son chien.
« Alors petit garnement ! On est impatient ? » lui adressa-t-il d'un ton chaleureux.
« Je crois que tu as raison, levons-nous ». Il s'exécuta, pris un peu de temps pour examiner la chambre. Elle n'était pas très grande, mais lui semblait être un palace comparé aux couchettes qu'il avait occupées ces derniers mois. Un lit, de quoi se laver, un petit bureau avec une chandelle. Une caisse qui servait d'armoire au bout de la couchette et un matelas de fortune sur cette dernière mais qui semblait de confection royale comparé à une place dans l'écurie. Ce logement n'était pas si mal. Il se sentait chanceux d'être tombé dessus, mais était-ce réellement un hasard ?
Il sortit de ses pensées d'un air décidé.
« Je pense que nous avons besoin de faire peau neuve toi et moi » lança-t-il vivement à l'animal. Ce dernier comprenant qu'il allait passer à la toilette n'était plus aussi joyeux qu'alors. S'en suivit une bataille qui dura une bonne demi-heure entre l'animal et son maître. Bien qu'avec difficultés il réussit à le laver mais pas sans avoir mis la pièce à coucher sans dessus dessous.. Il en profita pour se laver lui-même avant de ranger la pagaille faite pendant la rixe avec le molosse. Puis ils descendirent.
Alors qu'ils se dirigeaient vers la sortie, l'aubergiste les interpella.
« Hey ! Vous là ! Venez donc par ici ! Nous avons à faire vous et moi ! » La voix de l'homme était énergique mais pas hostile. Il était proche d'une table à manger, en train de finir de la nettoyer.
« En effet, il semblerait bien. » Le voyageur s'arrêta donc dans son élan et s'approcha de l'aubergiste.
« asseyez-vous ici s'il vous plait. » lui dit-il tout en s'asseyant aussi, avant de poursuivre :
« Mettons au clair plusieurs choses vous et moi, je peux voir tout de suite à votre allure que vous n'êtes pas n'importe qui. Pourrais-je avoir votre nom ? Vos motivations ? » Commença-t-il par lui demander.
« Votre inquiétude est légitime je suppose » soupira l'étranger.
« Mon nom n'a d'importance, appelez-moi Mumei. Cela vous facilitera la chose. Quant à mes motivations, je ne suis qu'un vieil homme qui a beaucoup de choses à raconter. Votre prochaine question sera-t-elle à propos de l'argent pour la nuit ? » lui répondit-il en retour.
« Cela faisait bel et bien partie de mes questions. J'avais une proposition à vous faire à ce sujet. Les villageois ne font que parler de vous depuis hier soir. Tout le monde attend avec impatience la suite de votre histoire, aussi sombre soit-elle. Nous n'avons pas l'habitude de recevoir des étrangers par ici. Alors la nouveauté vous savez. » Il s'arrêta un instant. Mumei le regardait d'un air calme et amical.
« Vous êtes en train de m'offrir le logement et le souper en échange de mon histoire ? » lui demanda-t-il.
« C'est exactement ce que je suis en train de faire oui. » lui répondit l'aubergiste. Avant de reprendre :
« Mais à une seule condition. » Son regard devint sérieux et lourd de sens. « Peu importe ce qui vous poursuit. Si cela vous rattrape, je vous demanderai de disparaître. »

L'air autour des deux antagonistes devint lourd, pesant, insoutenable. L'étranger attendit quelques instants avant de répondre.
« Vous portez un fardeau bien trop lourd pour vous, ne vous inquiétez pas. J'accepte toutes vos conditions soyez en sûr ».
Mumei garda son calme ainsi que son air amical. Il laissa passer quelques instants avant de poursuivre :
« Aubergiste, si cela est tout ce que vous aviez à me demander, j'ai un petit garnement qui s'impatiente » dit-il en souriant tout en désignant son chien d'un geste léger de la main.
« Je ne vous retiens pas plus ! Je vous remercie. Et surtout, n'oubliez pas, vous êtes ici chez vous ! » Lui lança-t-il avec un clin d'œil.
Les deux hommes se levèrent, l'un continuant son travail, l'autre se dirigeant vers la sortie suivit de son chien. Il atteint la sortie en quelques instants, s'apprêtait à ouvrir la porte lorsque soudain :
« Une  dernière chose ! » la voix était vive, comme un avertissement, l'aubergiste avait-il encore quelque chose à lui dire se demanda-t-il. Il se tourna naturellement vers celui-ci tout en ouvrant la porte dans le même mouvement. « Je vous écoute » lança-t-il.
« Appelez moi Karl, Cela sera plus simple non ? » Sa voix était redevenue amicale. Ce qui rassura un peu notre voyageur qui acquiesça d'un signe de la tête avant de poursuivre sa route vers la sortie.
Cette balade était à l'origine pour son chien, mais après la rapide discussion qu'il eut avec l'aubergiste, il avait bien besoin lui aussi de prendre l'air. Il marchait alors d'un air pensif. Qui était réellement Karl ? Que lui voulait-il ? Devait-il vraiment faire attention à cet homme ? Et puis plus important encore, était-ce vraiment bien de rester ici ? Dans ce village.
A vrai dire c'était un tout petit village. A peine une dizaine de bâtisses tout au plus étaient construite en son coeur. La place centrale était sans nulle doute la fontaine située en face de la maison du maire. On ne pouvait entrer dans ce village que par 2 routes. L'une venant du nord-est et l'autre partant au sud. Tout autour était disposé  dans le sens horaire en partant de 3h par rapport au nord. La mairie, la boucherie qui servait aussi de boutique d'épices et de toutes autres sortes de choses, l'église qui semblait de par l'affluence d'enfant à cette heure servir aussi d'école, un peu plus loin était construite l'écurie. Chacun des bâtiments n'avait pas vraiment fière allure, chaque bâtiments aurait bien eu besoin d'être retapés ,de par leur devantures qui pourrissaient sous la moisissure pour certains, de par l'aspect délabré, pour ne pas dire ruine des bâtisses restantes, d'ailleurs deux ou trois d'entres elle n'étaient plus utilisées aujourd'hui, signe que le village avait perdu en densité ces dernières années mais le charme qui s'en dégageait seyait parfaitement à l'accueil des villageois lors de l'histoire de la veille.
Sans s'en rendre compte, Mumei était arrivé en bordure du petit village, celle-ci était délimitée plus ou moins de manière claire grâce à la petite rivière qui contournait la petite bourgade. On pouvait y voir un miteux barrage construit afin de permettre au moulin hydraulique de fonctionner et occasionnellement, lorsque la saison s'y prêtait d'y moudre le grain cependant à en juger l'état, on ne pouvait affirmer avec certitude que quelqu'un l'utilisait encore. Le barrage était craquelé et de l'eau sortait par certaines des fissures. Sans parler du moulin en lui-même, le toit était étonnamment intact. Peut-être servait-il aujourd'hui d'abris de fortune ? Il manquait des planches à la roue hydraulique. C'était à se demander si elle pouvait encore tourner.
Notre héros qui venait de s'assoir à l'ombre d'un arbre afin de contempler la bâtisse se perdit à nouveau dans ses longues pensées. Si bien qu'il ne remarqua même pas le temps passer. Un enfant du village l'interpella vivement :
« Monsieur, Monsieur! Il fait déjà nuit ! On vous attend à l'auberge ! Pour votre histoire ».
Il lui lança un sourir chaleureux. Quelle tête en l'air il faisait. Réussir à se perdre dans ses pensées sans même voir la nuit tomber. Il se releva avec l'ardeur de son âge et suivit l'enfant jusqu'à l'auberge.
« Vite, vite ! Tout le monde est déjà-là Monsieur. » L'interpella l'enfant en lui ouvrant la porte de la bâtisse. En effet, à peine entré qu'il vit une foule qui le scrutait. Chacun, chacune, enfant comme adultes ne semblaient qu'attendre sa venu. Après avoir scruté rapidement la salle. Notre homme pris une grande inspiration, puis expira lentement en signe de soulagement. Il n'y avait une grande différence d'affluence entre ce soir et la veille.
« Installez-vous à la même place, je vous ai préparé quelque chose » put-il entendre de la part de son hôte. Ce qu'il constata en s'approchant de la cheminée. Là où il n'y avait anciennement qu'un frêle tabouret, se trouvait maintenant un tabouret qui lui semblait robuste un drap apposé sur le dessus ainsi qu'un petit guéridon comme on en trouvait par-ci par-là dans la grande salle. Il ne paraissait tout de même avoir vécu, les planches ayant servi à son rapiéçage attestent qu'il fut probablement détruit dans une ancienne bagarre. Sur son plateau était posé le souper. Le tout étant disposé de telle sorte qu'il ne soit pas trop prêts de la cheminée et assis face à l'entièreté de son futur auditoire.
Une fois assis face au gens, il se rendit compte que tout le monde était suspendu à son action. Personne ne bougeait, ne parlait, ne buvait ni ne mangeait.
« Allons donc ! Mangeons avant que cela ne refroidisse ! Nous avons bien assez de temps ce soir pour profiter d'un bon repas avant la suite. » Leur dit-il en prenant en mains les couverts. C'est ce qu'ils firent tous. L'ambiance était conviviale, joyeuse, la plupart des gens mangeaient, des enfants couraient, certains jouaient aux cartes, d'autres aux devinettes tout ceci sous le regard bienveillant mais absolu de l'expérimenté tavernier. Une bonne heure passa. Son fidèle compagnon était venu s'allonger à ses pieds, c'est seulement sur les coups de 19h que Mumei pris la parole.
« Je vous remercie grandement pour cette attente, si vous me le permettez, j'aimerai reprendre mon histoire. » On put entendre des réactions plutôt joyeuses émanant de la globalité de la petite assemblée.
« Dites moi, où en étions-nous resté ? » Interrogea-t-il.
« Le gamin suivait un mystérieux monsieur avec une torche ! » cria un petit jeune dont seule la tête dépassait au milieu de ses parents assis à une table. Mumei rigola puis lui répondit :
« Un mystérieux monsieur avec une torche dit-tu ? Il paraît moins effrayant quand c'est toi qui le raconte ! Je devrais prendre conseil à tes côtés pour adoucir mon récit ! » Tout le monde rigola, le petit rougit de honte et tenta tant bien que mal de se cacher derrière ses parents.
« Tu n'as pas à avoir honte petit, au moins je suis content que quelqu'un m'ai écouté attentivement » reprit il en lui adressant un clin d'oeil. Puis il se lança.

Dérathlyis, le destin d'un hérosOù les histoires vivent. Découvrez maintenant