Après cette annonce je suis sortie de son cabinet toute chamboulée. Je ne m'y attendais pas. Au fond j'espérais qu'il me dise que je n'avais rien. Je ne m'attendais pas à ce qu'on me dise que mon cœur pouvait s'arrêter du jour au lendemain à cause d'une « situation de stress ou de nervosité ». Je lui avais demandé ce qui m'aiderait, s'il y avait un traitement il avait répondu négativement. Comme si le sort s'acharnait. J'ai voulu savoir comment calmer mon cœur. Il m'avait dit qu'aucun traitement n'existait pour soulager le mal qui l'oppressait. Il m'a conseillé de faire du yoga, de me détendre... Me détendre ? Je ne savais pas ce que c'était. Et ce qui m'acheva encore plus, c'est lorsqu'il me dit que je devais faire attention au sport et ne pas pousser mes capacités à l'extrême. Alors que c'était la seule manière que je connaissais pour me détendre. Je n'ai plus rien ajouté et suis sortie...
En sortant, j'ai marché un petit peu. J'avais envie de pleurer. De hurler. Mais aucun son ne sortait de ma bouche. Aucune larme ne sortait de mes yeux. Je me suis alors posé une question. Devais-je en parler à ma famille ? J'ai jugé bon de ne rien dire pour le moment. Je ne savais pas comment leur dire. Et encore moins quand. Alors je me suis tue. Une fois de plus. Je savais à présent que mes silences me consumaient. Mais j'en avais pris l'habitude. Je ne savais pas comment faire autrement. Je n'ai rien dit. Me terrant toujours autant dans un silence profond. J'étais l'ombre de moi-même, alors que les gens me croyaient briller comme un soleil. J'ai continué à marcher oubliant l'heure qu'il était. Comme d'habitude j'étais dans mon monde, dans mon univers, dans mes pensées. Essayant d'imaginer ce que la vie aurait été. J'essayais de me rappeler de celle que j'étais avant ce 14 mars. Mais ça me paraissait tellement loin. Cette période me paraissait être à des années lumières de celle que j'étais devenue maintenant. Ma chute avait été courte mais rapide. Très rapide. Trop rapide.
A force de marcher, j'avais débouché sur un parc. Un parc où la vie était plus que présente. Alors que moi, j'avais l'impression de ne refléter que la mort. J'avais presque l'impression que ma place n'était pas ici alors je me suis installée sur un banc un peu à l'écart. Le regard vide. Je regardais le monde autour de moi. Est-ce que j'étais la seule à souffrir en silence faisant semblant de sourire ? Est-ce que quelqu'un réussirait à déceler une quelconque once de souffrance dans mes yeux ? Je ne connaissais personne. Personne ne me connaissait. J'étais comme un fantôme.
Des enfants, des parents passaient à côté de moi sans me lancer un regard. Je n'existais pas. Voilà, je me rendais compte que c'est ce que j'étais aussi aux yeux des gens qui étaient censé me connaitre. C'était une des réponses à mes questions. J'étais inutile. Même sourire me devenait compliqué.
Installée sur ce banc, inconsciemment, je me faisais du mal. Ressassant les bons moments d'avant et repassant en boucle les mauvais de ces dernières années. Je pensais sans cesse. En regardant autour de moi. Je voyais ces enfants innocents. Ils me renvoyaient à ma propre enfance. Et puis, ils me renvoyaient à ma princesse. Je revoyais les moments que j'avais passés avec elle. Ces moments de joie qui avaient laissé place à la tristesse après son décès. Je réentendais son rire. Je revoyais son sourire. Je la voyais s'émerveiller de chaque chose. Ce n'était qu'une enfant. Pourquoi m'avait-elle quittée si tôt ? J'étais assise sur ce banc. Et sans m'en rendre compte une larme coula sur ma joue. Puis une seconde. Suivi d'une troisième et d'une cascade de larme. Je pleurais. Silencieusement. J'avais appris à pleurer en silence après toutes ces nuits à pleurer au creux de mon oreiller ne souhaitant être entendue par personne. Et ce jour-là, en pleine journée, j'avais laissé mes larmes couler. Pourquoi ? Parce que dans ce parc, personne ne me connaissait, personne ne faisait attention à moi, personne ne me voyait. Alors je m'étais laissée aller.
*****
Au bout de quelques minutes, le regard encore dans le vague je sentie une présence près de moi. En tournant la tête j'ai vu un jeune garçon, d'environ mon âge. Il me regardait les sourcils froncés. Je ne comprenais pas pourquoi il me regardait de cette manière-là. Mais je détournais le regard ayant le même comportement que les gens du parc avec moi : je l'ignorais. Une larme vint s'écraser sur ma main et avant même que je ne puisse essuyer mes yeux, il tourna ma tête vers lui en prenant mon menton et essuya mes larmes. Je ne comprenais pas son geste. J'étais restée seule trop longtemps. J'avais toujours tendu la main pour aider les autres même lorsque j'étais au plus bas, sans rien recevoir en retour. Alors d'où est ce qu'il débarquait ? J'ai toujours eu horreur de la pitié. C'était une des principales raisons qui m'avait poussé à faire semblant. Alors je ne voulais pas de sa pitié. Comme je ne voulais de la pitié de personne.
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Quand le cœur est mis à prix...
RomanceLa vie devient difficile lorsqu'on perd quelqu'un pour qui on aurait donné sa vie. Ça l'est encore plus quand on apprend que la douleur psychologique déteint sur le physique... C'est ce qu'a cru vivre Zunaira. Fragilisée, elle a dû se battre pour s'...