REGRETS

2 | Je te vois

   Adam tient son visage dans le creux de sa main, la joue écrasée, laissant entrouverte sa bouche. Il hésite : soit le cours d'histoire est vraiment trop ennuyeux, soit c'est la voix lente du professeur qui l'endort, bien qu'il ait profité de son week-end pour dormir toute la journée. Soudain, un capuchon de stylo atterrit en plein dans le nez du petit bouclé. Il se redresse d'un coup en cherchant qui vient de faire un tel acte, l'air choqué, comme s'il venait de vivre la fin du monde.
   – Celui qu'a fait ça, t'es mort !
   Tout le monde explose de rire. Adam a l'habitude d'être l'humoriste de la classe quand il n'est pas affalé sur sa chaise, à moitié endormi. Le professeur se retourne.
   – Adam ! Tu veux aller faire tes menaces de mort chez le directeur ?!
   Adam souffle et pose son visage entre ses mains.
   Un papier en boule tombe à ses pieds, il le ramasse et l'ouvre péniblement, "1000 points". Tony. Il se retourne et regarde deux tables derrière lui. Il voit son pote en train de s'étouffer de rire.
   – Ok Tony, t'es mort.
   Mr. Pounto se retourne et cri "ADAM !", il lui lance un regard noir. La sonnerie s'enclenche. Adam ne bouge plus. Le professeur ferme les yeux et soupire. Un rictus moqueur se dessine sur les lèvres du garçon, puis il démarre une course-poursuite avec Tony, qui lui, éclate encore plus de rire.
   Comme maintenant chaque lundi, Adam et ses acolytes sortent le plus vite possible dans la cour, ne pouvant pas supporter de rester enfermés plus longtemps entre les murs lugubres du lycée. Le soleil est toujours là. Cette fois, aucun nuage ne lui fait face.
   Adam accélère le pas et saute sur Tony en laissant tout son poids retomber sur lui. Les deux gars, similaires à des enfants, tombent par terre et se marrent. Ni une ni deux, les trois autres complices d'Adam, Sam, Antoine et Matt leur bondissent dessus.
   – Dégagez putain... Vous me saoulez, lance Adam froidement.
   Un blanc suit son grognement. Puis chacun se rappelle qu'Adam est un sacré mauvais joueur et qu'il n'est content que lorsque c'est lui qui est le supérieur. Ils pouffent tous de rire en montrant du doigt le vaincu pour l'énerver. Il marmonne des jurons et s'aide de son bras pour se relever. Il frotte ses vêtements et jette un coup d'œil à travers la cour, pour voir qui aurait pu être spectateur de son humiliation.
   Elle. Cette fille aux cheveux de feu, toujours avec son livre entre les mains, en train de l'observer, un sourire aux coins des lèvres. En s'apercevant que le jeune homme venait de la remarquer, elle baisse les yeux et fait disparaître son expression amusée du visage. Adam se frotte l'arrière de la tête et se pince doucement les lèvres.
   – Bah alors blondasse, tu veux qu'on t'aide à te recoiffer ? demande Antoine en ricanant.
   Tout le groupe se met à tirer les cheveux d'Adam. Celui-ci empoigne le bras d'un d'eux et le porte comme un sac, sur son épaule. Sam, le fameux bagage, gesticule comme un poisson hors de l'eau pour se dégager de l'emprise de son ami, en vain. Les bras d'Adam sont musclés et fort. Le jeune homme se dirige vers la poubelle de la cour en tenant son camarade qui s'agite comme un animal prit dans un piège. Il le dépose comme un colis. Sam se retient au bord de la poubelle pour ne pas s'enfoncer et hurle de toute sa force avant qu'une fenêtre ne s'ouvre au-dessus d'eux et qu'une surveillante leur gronde de respecter les élèves en cours. Adam se tord de rire, fier de sa connerie et se tourne, toujours un grand sourire aux lèvres, en regardant la fille sur le banc. Elle lui rend un sourire en secouant délicatement la tête.