12. Louis

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Les yeux perdus vers l'extérieur, j'observe la pluie tomber sur la ville.

Assis à notre table habituelle, j'attends patiemment Harry. Une dizaine de jours est passée depuis son appel nocturne et rien de nouveau n'est survenu depuis. Il n'a pas cherché de nouveau à me contacter et lors de la réunion de mardi, il n'est pas de nouveau intervenu, préférant la discrétion. Il est resté au pot d'après, mais a essentiellement échangé avec Laura. Il m'a salué, comme toujours, m'a même souri de loin, mais sans plus.

À vrai dire, je m'en doutais un peu.

Je savais qu'il y aurait des hauts et des bas, de grandes avancées comme de petits retours en arrière et on en est là. Malgré sa grande envie de guérir et sa motivation intacte, son cauchemar l'a irrémédiablement freiné. Même s'il ne m'en a pas parlé, je sais très bien que ce sont les causes de son état qui sont revenues le hanter cette nuit-là. Je ne sais pas où il en est par rapport à ça, mais je pense qu'il est en plein déni. Il ne veut pas en parler et je sais que tant qu'il gardera ça pour lui, il aura du mal à avancer.

Ce n'est pas simple.

C'est même loin de l'être.

Je le sais et je sais qu'il le sait. C'est la raison pour laquelle je le laisse aller à son rythme. Un jour ou l'autre, le moment viendra où il s'ouvrira enfin là-dessus et ce jour-là, j'espère juste que je serai là pour lui, pour l'aider à surmonter son angoisse. J'espère que je trouverai les bons mots pour le rassurer et pourquoi pas le réparer. Du moins un peu. En attendant, il faut qu'il puise au fond de lui pour remonter la pente et poursuivre son chemin.

Alors, j'ai attendu qu'il me redonne signe de vie.

Patiemment.

Parce que je savais qu'il finirait par me recontacter à un moment ou à un autre. C'est ce qu'il a fait. Hier soir, alors que je me trouvais chez Ed et que nous regardions un match de foot avec les gars, j'ai reçu un sms d'Harry qui me demandait si j'étais libre aujourd'hui. Je ne me suis pas fait prier pour lui répondre que oui et nous avons convenu d'un rendez-vous. Honnêtement, j'ai été étonné qu'il me recontacte si vite. Je pensais qu'il lui faudrait un peu plus de temps. Ce garçon est bien plus fort qu'il ne le croit.

Je soupire en regardant mon portable qui vient de vibrer. C'est Lottie qui me demande si elle peut passer ce soir. Alors que je lui réponds, la porte de la salle s'ouvre. Je relève la tête et vois arriver Harry, pile à l'heure, un parapluie dégoulinant à la main. Il le pose sur le côté et relève sa tête vers moi. Nos orbes se croisent le temps d'un battement de cil, avant qu'il ne détourne le regard, visiblement gêné.

Bonjour, Harry ! je le salue gentiment.

Salut.

Il s'approche de moi et semble hésiter une seconde avant de finalement s'asseoir sur la chaise qui me fait face. Quelques secondes de silence passent avant que je reprenne la parole.

Où veux-tu partir aujourd'hui ? je demande en désignant la mallette remplie de sachets de thé.

Il ne répond pas tout de suite, le regard perdu dans le vide. Quelques minutes passent, dans un silence total seulement brisé par le rythme de nos respirations.

Tu n'as jamais eu l'impression d'être prisonnier ? me demande-t-il subitement, dans un souffle.

Non...

Moi, c'est ce que je suis. Prisonnier de mes peurs, de mes angoisses.

Il tourne la tête vers moi et je sens mon cœur se serrer face à la détresse que reflète son regard.

Pour n'être qu'avec toi (LS)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant