De la Terre comme au Ciel

Chapitre 2 : Pour la Survie

Aucun son ne venait troubler la parfaite quiétude de l'aube. Le sable épais, telle une douillette couverture, semblait vouloir garder le monde endormi quelques heures encore sous son manteau brun. Seules les bottes cuivrées d'Éloxim et Kéwal crissaient doucement sur la surface sablée. Au-dessus de leur tête, le ciel était d'un noir profond où l'on distinguait à merveilles les étoiles et les deux lunes. Aujourd'hui était un grand jour. Aujourd'hui, le frère et la soeur se battront pour leur village et pour leur survie.

Éloxim était serein. Détendu, il avait échauffé ses muscles tôt le matin suivant une série d'exercices. Fier, au corps long et massif, les longs cheveux noués dans son dos, il attendait, le sourire aux lèvres. Il avait hâte, mais sa jumelle se ne sentait pas aussi pressé que lui. Kéwal baya à se rompre la mâchoire. Elle était épuisée. À aucun moment elle n'a pu fermer les yeux de la nuit, coincée entre les bras puissants de son jumeau dont les ronflements l'avaient dérangés jusqu'au matin. Elle ne se sentait pas d'attaque, elle savait néanmoins que leurs efforts cèleraient le destin des habitants du village. C'est aujourd'hui que tout se décidera. C'est aujourd'hui qu'ils vaincront un monstre du désert.

Hier soir, Radame, leur oncle et le chef du village Inna-Miyadi, leur a donné l'ordre de le retrouver à la limite du village, celle même qui inspire la terreur aux enfants et dont personne ne veut s'approcher. Des carcasses et des cadavres puants gisaient encore tout autour, servant d'avertissement aux autres monstres que s'ils pointaient le bout de leur nez, c'était la mort. Et il ne s'agissait pas que de ça ! Les pierres de lune étaient les principaux remparts contre les monstres, ces cailloux aux reflets spectraux étant exposés un peu partout. En plus d'avoir semé des mines explosives dans le désert comme s'il s'agissait de plantations mortelles, les hommes montaient la garde dont le tour variait toutes les heures. Les rayons du soleil devenaient parfois si durs à encaisser qu'un malaise arrivait tous les jours.

-J'y pense, dit soudain Éloxim, sortant sa soeur de sa rêverie. Avec quoi est-ce qu'on va se battre ?

-Il (Radame) nous a dit de ne rien prendre avec nous. Il veut qu'on se serve de nos pouvoirs, tch ! Je ne le sens pas.

-Oh... Voilà enfin un bon moyen de tester notre résistance, soeurette ! Tu es prêtes à voir la tête que feront ces affreux ?

-Pas vraiment.

Son ventre se retourna rien que d'y penser. Ils n'ont avalé que leur maigre restant de la nuit passée, soit des morceaux de galettes. « Un peu de motivation », se reprocha Kéwal en serrant fort les poings. Elle enviait souvent l'enthousiasme de son frère mais se moquait de lui lorsqu'il partait en galère. Elle se frappa les joues, se répéta que tout se passerait bien et respira profondément. À cet instant, les premiers rayons du soleil rouge les éblouirent tous les deux. Ils aperçurent alors la silhouette massive de Radame. Depuis combien de temps les attendait-il ? À son coté pendait le fourreau d'une longue épée. Il en tenait aussi deux dans chaque main. Une grenade somnolait à ses pieds ainsi qu'un carquois rempli de flèches et un arc aussi grand que Kéwal. Des armes de préventions.

-Vous en avez mis du temps, les réprimanda-t-il de son air sévère habituel. Trois rôdeurs ont déjà tenté une approche sur le flanc droit du village. Heureusement, ils n'ont pas attaqué. Sinon, on serait dans un vrai pétrin.

-Vous n'avez pas dormi, fit remarquer Kéwal.

-Je ne ferme jamais les yeux. Je dois toujours me tenir sur mes gardes, peu importe les circonstances. En tant que chef du village, je dois protéger tout le monde. Je ne montre pas mes faiblesses. Et ce matin, vous me prouverez votre force et votre conviction de vouloir nous sortir de là. Nous comptons sur vous, ajouta Radame, à la surprise générale des jumeaux.