Chapitre six : Furor nox

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"C'est ton corps que je veux consumer à m'en rendre dingue, à en finir fumée.



۞ ELLIPSE

22h.

        Quelques jours s'étaient écoulés. Je n'avais pas reçu de nouvel indice. Je n'avais pas, non plus, arrêté de penser à l'anonyme qui me les envoyait. Enfin, si. Parfois, je n'y pensais plus. Et ça, seulement lorsqu'une nouvelle personne bousculait mon coeur et ma raison : Ysia. La mystérieuse blonde qui m'avait sauvé deux fois : une fois en sport, et la deuxième fois sur les falaises. Elle seule arrivait à baumer mon coeur. Et quel plaisir m'eut envahi, quand enfin elle m'avait proposé de sortir, là, ce soir, toutes les deux, en tête à tête. Je haletais déjà.



        Les écouteurs fourrés dans les oreilles, je luttais contre la pénombre qui séparait nos deux corps. Bientôt, j'arrivais à sa hauteur, mais mon coeur, lui, était déjà bien trop loin. Elle me lançait un léger sourire, constatais avec plaisir que j'avais pris mon skateboard, et restais plantée là, le sien à la main. Ses cheveux brillaient dans la noirceur de cette nuit de printemps. Je me sentais bizarre. J'osais à peine affronter ses pupilles grises qui m'impressionnaient autant qu'elles me plaisaient. Je retirais mes écouteurs, et sa voix que j'aimais tant vint bercer mes tympans.


T'es en avance, ça va.

C'est plutôt toi qui est en avance, remarquais-je.

Je déteste les retards, alors je m'applique à ne jamais l'être.

Tu attends depuis longtemps?

Dix huit heures, répliquait ma blonde.


         Autrement dit, depuis qu'elle m'avait envoyé le message. Et pourtant, elle ne montrait aucun signe de fatigue. Elle rit en voyant ma mine surprise, puis touchais mon épaule en me poussant légèrement. Woa. Des frissons participaient à un marathon dans tout mon corps, excitant tout mes sens et réveillant en moi une pointe de gêne.


On y va?



        Je hochais la tête en avalant difficilement ma salive. Je n'avais aucune idée d'où on allait, mais j'étais face à ses belles prunelles, et ça mon dieu, c'était le plus beau des voyages. Elle lançait sa planche devant elle, et je fis de même. Nous démarrions, et elle était un peu plus rapide que moi. J'avais, une fois de plus, l'occasion de l'admirer de derrière. Sa chevelure dorée volait dans le ciel sombre grâce à la douce bise qui dansait au bord de ce lac. Quand enfin mon regard parvint à se détacher d'elle, je pus observer les alentours : les lumières des restaurants et habitations de la rive d'en face se reflétaient dans le point d'eau. J'entendais de la musique au loin, des bruits de klaxons, mais à chaque fois que mon pied touchait le sol pour pousser mon skate, tout cela s'éloignait. L'air était chaud : je m'en régalais.


Eh, regarde !


        Je fus interpellée par son ordre, et m'y exécutais. Son skate roulait, mais elle était sur celui-ci, face à moi, à fanfaronner en riant. Et mon coeur, une fois de plus, ne pulsait plus. J'étais totalement hypnotisée par le plus beau bijou qu'elle portait : son sourire. Il était imposant, clair et enfantin. Et la douce mélodie joviale qui en sortait à chaque fois qu'elle ricanait ne le rendait que plus délicieux. Elle se remit face à la route, et nous continuâmes un moment de rouler, au bord de ce lac, dans un quartier désaffecté...  Et désormais sur le trottoir qui longeait les rails du train qui traversait notre ville par un pont assez haut. J'étais toujours béate face à l'effet qu'elle délivrait en moi à chacune de ses expressions. Enfin, elle s'arrêtait au milieu du pont. Je l'imitais, et m'asseyais à côté d'elle, au bord du trottoir bétonné, les pieds pendants au dessus de l'autoroute bondée.

Hunting me [en réécriture]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant