Ian - 12

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Pendant une fraction de seconde, il ne se passa rien. La lumière dut aveugler nos observateurs qui fermèrent les yeux par réflexe. Un concert de grondements indignés répondit à ma torche.

Je la levai plus haut et m'avançai. Les bêtes reculèrent. Bien, le feu avait encore le pouvoir de les repousser. Yuutô me frôla, avant de se placer devant moi. Sa fourrure se hérissa, il se tendit. Après une courte inspiration, il rugit. Mes oreilles tintèrent tant ce son les satura, mon ouïe s'était affinée avec la transformation. Je clignai des yeux et bâillai pour faire passer la sensation désagréable.

Lorsque mon attention se reporta sur nos adversaires, ils fuyaient déjà.

— Une bonne chose de faite ! m'exclamai-je.

Je me sentais presque guilleret, alors que franchement, la situation ne s'était pas vraiment améliorée. Enfin, au moins, on ne se ferait pas bouffer par des loups. En parlant de manger, les deux crétins n'étaient pas revenus. Plusieurs possibilités : ils avaient fui, ils étaient perdus, on les avait enlevés. Ou ils avaient tellement fait de galipettes qu'ils étaient trop fatigués pour rentrer.

J'eus une moue irritée. J'espère que ce n'était pas la dernière proposition ou je leur en voudrais pendant un bon moment. Je me tournai vers Yuutô.

— Tu devrais te changer pour manger. Je ne suis pas sûr que la barre de céréales soit aux goûts de tes papilles de grand félin. En plus, il faut que tu reprennes un médicament.

Bon, et puis je pourrai te mater à poil au passage, ce qui ne serait pas pour me déplaire, ajoutai-je en mon for intérieur. Les yeux verts du léopard me transpercèrent, et je me retins de gigoter sur place. Par moment, ce mec me donnait l'impression de lire dans mes pensées. Je me sentais comme un gosse de cinq ans face à son institutrice contrariée.

La lumière de la torche baissa drastiquement ; le bout de tissu était à deux doigts d'être consumé. Dehors, le jour commençait à se lever. Je m'approchai du tas de petit bois et de feuilles que j'avais rassemblés et tentai d'allumer le feu. Les bruits de la transformation de Yuutô attirèrent mon attention, et je ne me gênai pas pour contempler son corps nu. Miam. Sa peau luisante me donna l'eau à la bouche. Je la savais parcourue de cicatrices diverses. Il n'en avait pas autant que sa sœur, mais assez pour que je me questionne régulièrement sur leur passé. Il se tortilla pour enfiler un pantalon, tandis que j'avalais ma salive avec difficulté.

Il se figea, me scruta. Je lui lançai un sourire ambigu. Son visage aux allures de chanteur de J-pop ne laissa apparaître aucune émotion, et pourtant, mon cœur s'emballa. L'adrénaline courait dans mes veines. J'étais hypnotisé par son regard brillant. Il était beaucoup trop sérieux pour moi. Je le sentais, mais... il avait l'air si appétissant. J'hésitai un instant à lâcher ma tentative loupée de feu de camp pour aller goûter les lèvres pulpeuses de Yuutô, quand il lâcha mon regard et se pencha pour attraper son t-shirt avant de l'enfiler sans tarder. Je ravalai un soupir frustré.

— Je m'occupe du feu, me lança-t-il, en se plaçant à côté de moi.

Il me frôlait presque l'épaule. Devais-je... ?

— Tu pourrais me donner le médicament ?

J'aurais pu me flanquer une gifle. Il était malade, et moi, je me consumais de désir. Je ravalai les restes de ma libido galopante. Être changeforme, c'était quand même bien pourri. J'avais l'impression que mes instincts prenaient le pas sur mon cerveau. Je m'agaçais moi-même.

— Ta fièvre est toujours aussi haute ?

— Je ne sais pas trop. Je me sens mieux, moins vaseux qu'avant de m'évanouir.

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